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Podcasts, produits dérivés... Comment les graciés de l'attaque du Capitole sont devenus influenceurs sur X

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En janvier dernier, le président Donald Trump a gracié plus de 1.500 assaillants du Capitole. Surfant sur leur notoriété, certains sont devenus de véritables influenceurs sur X et multiplient les publications, les podcasts et surtout, les produits dérivés.

"Maintenant, je suis monétisée grâce à la grâce (de Trump, ndlr)", lance Richard Barnet, alias "the lectern guy" sur X. Son nom vous dit peut-être quelque-chose. L’homme s’est fait connaître durant l'assaut du Capitole le 6 janvier 2021 en emportant sous son bras le pupitre de Nancy Pelosi.

Après l’investiture de Donald Trump, l’attaquant, ainsi que 1.500 autres assaillants, ont été graciés par le président des Etats-Unis. Une aubaine pour Richard Barnet, qui était soumis à un accord lui interdisant de tirer profit de son nom ou de son image pendant cinq ans. Désormais, c'est une star sur X, ex-Twitter. The lectern guy est ainsi suivi par pas moins de 105.000 abonnés sur la plateforme.

"Un multivers vraiment cool"

Il y partage ses actualités, ses humeurs et surtout de nombreux messages politiques à sa communauté. Grâce à ses publications, il gagne pas moins de 500 dollars par mois. Et Richard Barnet est loin d’être une exception.

Comme le rapporte une enquête du Washington Post, une cinquantaine d'assaillants de l'attaque du Capitole, tous graciés par Donald Trump, s’emploient à tirer profit de l’événement. Ces influenceurs militants sur la plateforme d’Elon Musk, ce sont les "J6ers", J6 faisant référence au 6 janvier.

"La culture a changé", observe auprès du média américain Henry "Enrique" Tarrio, condamné pour conspiration séditieuse en raison de son rôle dans la planification de l’attentat. "Depuis que j’ai quitté la prison, je suis entré dans un multivers vraiment cool."

Il faut dire que sur le réseau social, les graciés de Donald Trump sont de véritables stars. Ils cumulent entre 50.000 et 200.000 abonnés chacun. Sur X, chacun a trouvé son créneau pour séduire son audience.

Publications, podcasts et selfies

Certains partagent simplement en ligne leurs humeurs du jour, ou leurs opinions politiques en s’érigeant en symbole de résistance. C’est le cas de Richard Barnett, qui après avoir été photographié les pieds sur le bureau de Nancy Pelosi, a profité de sa notoriété soudaine pour partager sa vie à ses 30.000 abonnés.

Ou encore de Jacob Chansley, l’assaillant connu pour son chapeau à cornes et à plumes. L’homme, surnommé le "chaman de QAnon", est suivi par 158.000 adeptes. Chacun de ses messages est partagé en masse, comme celui où il remercie le président Trump pour l’avoir gracié et où il annonce aller "acheter des armes à feu". Une publication repostée 16.000. Une notoriété qui lui permet de vendre des "consultations chamaniques" à sa communauté.

Jacob Anthony Chansley, alias Jake Angeli a été libéré de prison
Jacob Anthony Chansley, alias Jake Angeli a été libéré de prison © WIN MCNAMEE / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / GETTY IMAGES VIA AFP

D’autres enregistrent des podcasts. C’est le cas de Jessica Watkins. Après avoir été grâciée, la femme est devenue influenceuse lifestyle sur X. Chaque jour, elle partage à ses 26.000 abonnés sur X des articles sur sa nouvelle vie depuis qu’elle est sortie de prison.

Mais elle souhaite aller encore plus loin en proposant du "contenu exclusif" à ses abonnés via un podcast. Elle envisage de "questionner" ses abonnés pour leur demander "quels sujets aborder". La militante influenceuse fait également de la publicité pour des cours d’autodéfense ou des sites de vente en ligne.

Jennie Heinl, alias 6er Jennie Political Prisoner, a, elle, déjà passé le cap. En plus de ses messages pour dénoncer le "régime corrompu" et de ses selfies devant une Tesla pour montrer son soutien à Elon Musk, n’hésite pas à enregistrer des podcasts pour évoquer son amertume vis-à -vis du système.

"Je n'ai pas pu parler pendant trois ans, alors je vais bien sûr tout cracher sur X maintenant parce que je suis tellement en colère", assure-t-elle au Washington Post.

Des produits dérivés qui rapportent

Mais la grande majorité n’hésite pas à faire de la publicité en ligne pour des produits dérivés. C’est le cas de Adam Johnson, qui a lancé son petit business de produits dérivés. Sur sa boutique en ligne, il vend des magnets à 5 dollars, des tasses à 20 dollars ou encore des glacières à 30 dollars à son effigie. Des mini figurines en forme de pupitre sont elles proposées à 200 dollars. Christopher Quaglin, un autre attaquant, propose des t-shirts "Otages du J6" pour 50 dollars.

Des produits dérivés de l'attaque du capitole.
Des produits dérivés de l'attaque du capitole. © capture d'écran

Un business qui rappelle d’ailleurs celui de Donald Trump. Le président des Etats-Unis avait vendu des produits dérivés, comme des t-shirts ou des mugs, inspirés de son célèbre "mugshot".

De son côté, Debra Maimone, suivie par 196.000 abonnés sur X, n’hésite pas à mettre en avant ses produits dérivés. A la manière d’une véritable influenceuse, elle pose alors en maillot de bain, à l'effigie de Donald Trump évidemment, pour présenter un drapeau américain. Un accessoire vendu pour la modique somme 800 dollars.

Debra Maimone devant un de ses produits dérivés, vendu 800 dollars.
Debra Maimone devant un de ses produits dérivés, vendu 800 dollars. © capture d'écran

Fort de sa popularité, Mark Middleton a sollicité la générosité de sa communauté. En février dernier, le gracié a lancé un "fonds de liberté" pour l’aider à financer son voyage en camping-car à travers le pays avec sa femme. Leur objectif? Dénoncer les systèmes juridiques, policiers et pénitentiaires qu’ils considèrent comme "corrompus" et diffuser leur message au plus grand nombre.

A savoir si leur popularité soudaine durera dans le temps. Jard Holt, chercheur à l'Institut pour le dialogue stratégique, un groupe de réflexion sur la lutte contre l'extrémisme, émet quelques réserves. "Je ne pense pas que le fait d'avoir été arrêté et relâché pour avoir participé à l'émeute du Capitole suffise, en ce moment politique, à catapulter quelqu'un vers la célébrité qu'il espère", analyse-t-il.

Salomé Ferraris