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Mark Zuckerberg, Jeff Bezos... Les géants de la tech ont-ils tourné le dos à Kamala Harris?

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A quelques jours du scrutin, la bataille entre Donald Trump et Kamala Harris fait rage. Mais du côté de la Californie, les géants de la tech semblent prendre leurs distances avec la politique.

On l'imaginait futur président des Etats-Unis. Mais pour le moment, Mark Zuckerberg semble plutôt se désintéresser de la politique. Le patron de Meta (Facebook, Instagram, Whatsapp) a longtemps été un des symboles de la Silicon Valley toute puissante et surtout très progressiste.

Mais le scandale Cambridge Analytica en 2018 – du nom d'une entreprise de conseil qui a aspiré les données de Facebook pour favoriser Donald Trump – est passé par là. Les critiques acerbes contre ses réseaux aussi. Même s'il n'a jamais ouvertement soutenu de candidat, Mark Zuckerberg en a "terminé avec la politique", titrait fin septembre le New York Times.

Mark Zuckerberg sur son compte Instagram
Mark Zuckerberg sur son compte Instagram © Capture Instagram

Visiblement, il n'est pas le seul dans la Silicon Valley à vouloir prendre ses distances. Le taiseux Jeff Bezos, très discret sur ses engagements politiques - mais qui a toujours réalisé des donations pour des candidats démocrates locaux et a chaleureusement félicité Biden en 2020 - a provoqué la stupeur des lecteurs du Washington Post. Le journal, dont il est le propriétaire depuis 2013, a soutenu Obama, puis Clinton, puis Biden. Pour 2022, pas de conseil de vote, ordre du patron. Le quotidien a perdu 250.000 abonnés dans la foulée. Une "question de principe" s'est justifié Bezos.

Larry Page et Sergey Brin (co-fondateurs de Google) restent aussi discrets sur leur engagement bien que le second ait versé de l'argent pour la campagne d'Obama en 2011.

L'ominprésence de Musk

En parallèle, une autre figure de la tech se montre, au contraire, plus engagée que jamais. C'est Elon Musk, qui soutient activement Donald Trump, à la fois en versant de l'argent à sa campagne mais aussi en participant directement à ses meetings. Depuis plusieurs semaines, il a même lancé une controversée pétition qui permet aux signataires de gagner un million de dollars.

Si le patron de Tesla se revendiquait démocrate, il y encore quelques années, il fait partie de ceux qui "ont franchi le Rubicon". Marc Andreessen et Ben Horowitz, fondateurs d'un puissant fonds d'investissement, ont à leur tour rejoint la cause républicaine. Récemment, c'est David Marcus, un des anciens responsables de Messenger chez Meta et qui a co-fondé Lightspark, qui a annoncé son ralliement au candidat républicain.

Elon Musk lors d'un meeting pro-Trump en Pennsylvanie, le 20 octobre 2024
Elon Musk lors d'un meeting pro-Trump en Pennsylvanie, le 20 octobre 2024 © Michael Swensen

Donald Trump peut aussi compter sur le soutien de personnalités des cryptomonnaies. Les frères Tyler et Cameron Winklevoss, précurseurs du Bitcoin et désormais milliardaires, font partie des donateurs. Sans apporter ouvertement leur soutien aux républicains, les fondateurs de Coinbase Brian Armstrong et Fred Ehrsam ont soutenu financièrement le sénateur J.D. Vance avant que celui-ci ne soit désigné colistier de Donald Trump.

Alors la Silicon Valley, réputée pour son progressisme, est-elle en train de retourner sa veste? Pas encore. De nombreux patrons de premier plan continuent de soutenir les démocrates: Reed Hastings, le fondateur de Netflix, Reid Hoffman, celui de LinkedIn ou encore Bill Gates. Nouvelle star de la Silicon Valley, Sam Altman, puissant patron d'OpenAI, avait déjà soutenu Kamala Harris comme candidate aux primaires démocrates en 2019.

Rancunier et imprévisible

Il n'empêche, quelque chose semble s'être abîmé entre la Silicon Valley et le parti démocrate. Certes, le passage de témoin de Joe Biden à sa vice-présidente a rassuré les sceptiques mais le président actuel n'a jamais montré beaucoup d'affection pour les géants de la tech.

Il a surtout nommé la redoutable Lina Khan à l'autorité américaine de la concurrence (FTC), devenue la bête noire des Gafam. "Lina Khan est une personne qui n’aide pas l’Amérique" pestait en juillet dernier Reid Hoffman.

Trump, de son côté, a embrassé la cause des cryptomonnaies et promet moins de régulation pour l'intelligence artificielle, qui infuse toutes les startup la baie de San Francisco. Rancunier et imprévisible, le républicain ne ménagera pas ses adversaires en cas d'élection, promettant déjà de s'en prendre à Google qu'il juge partial dans la campagne électorale, ainsi qu'à Mark Zuckerberg qu'il aimerait voir en prison, malgré les récents compliments de ce dernier à son endroit.

Les mauvaises langues verront d'ailleurs dans la neutralité de Jeff Bezos la crainte de voir les contrats signés entre son entreprise spatiale Blue Origin et la Nasa être remis en cause par Trump, s'il redevient président.

Dans une Amérique chauffée à blanc, la nomination de Kamala Harris – qui a fait carrière à San Francisco - arrive probablement un peu tard pour se rabibocher totalement avec la tech.

En réalité, c'est toute une génération de jeunes entrepreneurs à sauver pour le parti démocrate. "Ils ont grandi avec un parti démocrate qui ne considère pas l’entrepreneuriat technologique et l’écosystème [du capital-risque] comme quelque chose à célébrer" résume, au Washington Post, un entrepreneur.

Thomas Leroy Journaliste BFM Business