Marseille: des peines jusqu'à 13 ans de prison et près de 10 millions d'amende prononcées au procès du clan du "Petit Bar"

La balance de la justice (photo d'illustration) - DAMIEN MEYER - AFP
Au procès du tentaculaire dossier de blanchiment des fonds occultes de la bande criminelle corse du "Petit Bar", si des pans du dossier se sont soldés par une relaxe, des peines sévères allant jusqu'à 13 ans de prison ont été prononcées mercredi à Marseille.
Des amendes pour un total de près de 10 millions d'euros ont également été infligées dans ce dossier baptisé "Email Diamant" par les enquêteurs, pour le pouvoir blanchisseur de cette pâte dentifrice.
Une "emprise mafieuse"
Pendant les trois mois d'audiences, devant le tribunal correctionnel, deux visions se sont affrontées: d'un côté le parquet, qui a dénoncé "l'emprise mafieuse" de cette équipe sur l'économie et la politique de Corse-du-Sud, en réclamant des condamnations jusqu'à 14 ans de prison, peines rarissimes dans un dossier purement financier ; de l'autre, la défense, qui avait plaidé une relaxe quasi-générale.
Mercredi, la présidente, Patricia Krummenacker, a commencé par rejeter la demande de disjonction et de renvoi déposée par Jacques Santoni, chef incontesté du "Petit Bar" selon l'accusation, assurant que son incapacité à comparaître n'avait pas été démontrée.
Tétraplégique depuis un accident de moto en 2003, Jacques Santoni, qui ne s'est jamais présenté à ce procès, ouvert en février, a été condamné à 13 ans de prison avec mandat d'arrêt, 1,5 million d'amende et une interdiction définitive de gérer une entreprise.
Il a par contre été relaxé pour le volet extorsion de l'affaire, tout comme les autres prévenus concernés, la présidente concédant que "la contrainte, les violences ou les menaces" n'ont "pas été démontrées".
Parmi les 24 prévenus, seuls François-Xavier Susini, riche commerçant de Courchevel, et Angelique Peretti, avocate et fille du marchand d'art Jean-Marc Peretti, ont bénéficié d'une relaxe complète.
Train de vie dispendieux
La présidente a néanmoins reconnu coupable les prévenus pour blanchiment et association de malfaiteurs, pointant notamment le "train de vie dispendieux" du clan, "qui ne correspond aucunement à leurs revenus officiels", prouvant qu'ils "dispos(ai)ent indiscutablement de revenus occultes".
Concernant le noyau dur de cette bande criminelle, 12 ans de prison ont été prononcés contre Michael Ettori, le "bras droit" du chef, en fuite, ainsi qu'une amende de 1,5 million d'euros. Pascal Porri, autre "pièce maîtresse" du clan, comparaissant détenu, a lui écopé de 10 ans de prison, amende d'un million d'euros et interdiction de gérer en prime.
Décrit par l'accusation comme "le cheval de Troie du Petit Bar pour pénétrer l'économie réelle", le chef d'entreprise Antony Perrino a été condamné à cinq ans de prison dont 30 mois avec sursis --contre neuf ans demandés par le parquet--, la peine ferme devant être exécutée sous bracelet électronique. Il a également été condamné à une interdiction de gérer pendant trois ans, avec exécution provisoire, et une amende de 750.000 euros.
Parmi les compagnes ou ex-compagnes du clan, Sonia Susini, ex-épouse de Jacques Santoni, "son égale au féminin" selon la procureure, a été condamnée à cinq ans de prison dont deux avec sursis, avec mandat d'arrêt, et 150.000 euros d'amende. Gérante notamment d'une société immobilière, elle est désormais définitivement interdite de gérer une entreprise.
Saveria Lucchini, compagne de Michael Ettori et gérante d'un hôtel d'Ajaccio, a elle été condamnée à quatre ans de prison dont 18 mois avec sursis, avec mandat d'arrêt, une amende de 200.000 euros, et elle aussi une interdiction définitive de gérer une entreprise.
Contre Valérie Mouren, ex-femme de Pascal Porri, trois ans de prison dont deux ans avec sursis ont été prononcés, et une amende de 100.000 euros.
De juteuses opérations immobilières
Concernant "les financiers" du clan, selon l'accusation, Jean-Pierre Valentini, vivant entre Dubaï et la Suisse après avoir construit une fortune colossale dans le trading du pétrole en Afrique, a été condamné à quatre ans de prison avec sursis, une interdiction de gérer pendant trois ans et 750.000 euros d'amende. Le "marchand d'art" Jean-Marc Peretti, en fuite, a été condamné à cinq ans de prison avec mandat d'arrêt et 750.000 euros d'amende.
Le volet du dossier concernant des accusations de juteuses opérations immobilières, notamment autour d'un luxueux chalet dans la très select station de ski de Courchevel (Savoie), a lui donné lieu à une relaxe, les opérations ne mettant "pas en lumière de blanchiment", a déclaré la présidente.
À noter qu'une peine d'inéligibilité de cinq ans a été prononcée pour tous les prévenus condamnés, ainsi qu'une peine d'interdiction de gérer une entreprise, soit définitive soit de 3 ou 10 ans.