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Rhône: au pied des sites à risque Seveso, l'inquiétude à degré variable des riverains

Différentes communes de la Vallée de la chimie abritent des usines dont l'activité peut engendrer des incidents. Après l'explosion de Bergerac, les riverains habitant près des sites Seveso du Rhône s'inquiètent pour leur sécurité.

"Seveso." Dans la presse papier, les flash-radio ou les journaux télévisés, le terme revient avec insistance depuis mercredi. Et pour cause, deux incidents sont survenus cette semaine à Bergerac (Dordogne) et Molsheim (Bas-Rhin), dans des sites classés à risque, du nom de ce village italien où s'est produite une importante fuite chimique en 1976.

Parmi les plus de 1300 sites catégorisés Seveso en France, quelques-uns se trouvent dans le département du Rhône, dans le secteur de la Vallée de la chimie notamment.

Jacques Geoffroy vit à Feyzin. À moins de 200 mètres de son domicile: une raffinerie appartenant à Total. L'intéressé vivait déjà dans cette commune bordant le Rhône, située au sud de Lyon, quand une explosion s'est déclenchée sur le site il y a plus de 50 ans. Le bilan est lourd: 18 personnes ont péri.

Une pièce refuge dans la maison

À l'époque, personne ne savait réellement comment réagir à une telle éventualité. Les choses ont bien changé depuis. "On est quand même beaucoup plus informés, reconnaît l'homme à la moustache au micro de BFM Lyon. Il y a des tas de consignes qui sont établies."

S'il assure vivre "normalement", avec "moins de craintes" et "moins de peur" qu'auparavant, il reste conscient qu'un incident est vite arrivé. Si bien qu'une pièce de son domicile a été aménagée de manière à ce qu'il puisse s'y réfugier en cas d'explosion. "Elles sont très lourdes, ces fenêtres, montre-t-il de la main. Il n'y a aucune prise d'air extérieur au cas où il y ait des intoxications."

Jacques Geoffroy a même déjà tout prévu: une lampe de poche, un guide de conseils pour s'isoler, de l'eau et des barres de céréales ont déjà été entreposés dans la pièce.

Accusations et plaintes

Un peu plus au nord de Feyzin se trouve la commune de Pierre-Bénite. Des entreprises comme Arkema, Daikin et Elkem Silicones, pour ne citer qu'elles, y sont implantées.

Toutes présentent des activités à risque et toutes font l'objet d'accusations de rejets de polluants néfastes pour la santé et l'environnement -voire même de plaintes-, comme révélé par un reportage réalisé par l'émission Vert de Rage.

Des taux particulièrement alarmants de perfluorés (PFAS) ont ainsi été détectés à Pierre-Bénite. Dans la pelouse du terrain de football communal, le niveau de polluants est estimé plus de 80 fois supérieur à un seuil appliqué dans plusieurs pays européens.

En France, certains perfluorés ne font pas encore l'objet de normes. Mais les PFAS devront être intégrés dans les analyses sanitaires de l'eau potable d'ici à 2026.

"Ça fait des années qu'il nous ment"

Jusqu'à la diffusion du reportage, Thierry Mounib, président de l'association Bien-vivre à Pierre-Bénite, se disait "presque en confiance" malgré la proximité d'usines traitant des produits chimiques.

Il se remémore une scène: "Quand le patron de l'entreprise me regarde dans le blanc des yeux et me dit: 'Non, il n'y aucun rejet dans l'eau, aucun rejet dans l'air...' Après investigations, après les prélèvements qui ont été faits ici même, dans le sol, on s'aperçoit que ce n'est pas vrai du tout. Ça fait des années et des années qu'il nous ment et qu'il porte atteinte à notre santé".

Depuis le début du 21e siècle, certains incidents survenus dans des sites Seveso ont eu des conséquences désastreuses. En 2001, l'explosion de l'usine d'engrais AZF de Toulouse avait causé la mort de 31 personnes. Et plus récemment, en 2019, un incendie majeur s'était déclaré à l'usine Lubrizol de Rouen, entraînant la propagation d'épaisses fumées en direction des zones habitées.

Blandine D'alena avec Florian Bouhot