BFM Lyon
Lyon

Perfluorés: le maire de Pierre-Bénite annonce des résultats "plutôt rassurants", les habitants restent inquiets

placeholder video
Jérôme Moroge, édile de cette commune du sud de Lyon, a dévoilé ce lundi des conclusions moins alarmantes que prévu mais en appelle à l'État pour voir quelles sont les mesures à prendre.

Perfluorés, polyfluoroalkylés, PFAS... on les connaît sous différents noms. Ces produits chimiques utilisés pour leurs propriétés imperméabilisantes, ignifuges et antiadhésives deviennent des "polluants éternels" lorsqu'ils se retrouvent dans la nature. Depuis la diffusion d'un premier volet d'une enquête réalisée par "Vert de Rage" et diffusée sur France Télévisions au mois de mai, ils sont bien connus des habitants de la métropole de Lyon.

Bénéficiant du concours d'un scientifique hollandais, Martin Boudot, le journaliste qui a conduit les recherches, révélait que des taux de perfluorés particulièrement élevés avaient été détectés dans l'eau, les sols, l'air et même le lait maternel d'habitantes de Pierre-Bénite. Avec plusieurs interrogations majeures en suspens: quel impact sur la santé et sur l'environnement? Et quel est le degré de responsabilité des usines de la Vallée de la chimie, comme Arkema ou Daikin?

Jérôme Moroge, maire Les Républicains de la commune, a bientôt pris la décision de diligenter des expertises complémentaires, dont il a communiqué la teneur ce lundi sur le plateau de Bonsoir Lyon.

Résultats "plutôt rassurants"

"Les premiers résultats sont plutôt rassurants si je puis dire, a-t-il déclaré d'emblée. On nous avait annoncé dans le reportage des chiffres qui dépassaient des seuils -qu'on n'avait pas très bien compris- de façon extrêment importante. Au final, on se rend compte quand on compare ça à des seuils étrangers, qui opèrent en Australie, aux Pays-Bas ou ailleurs, il arrive qu'il y ait des perfluorés mais de façon beaucoup moins alarmantes que prévu."

Les résultats des prélèvements ont été dévoilés aux habitants au cours d'une réunion publique lundi soir. Deux échantillons sur trois, prélevés dans les sols de la commune, dépassent les valeurs de comparaison. Les relevés indiquent aussi la présence de perfluorés dans l'air, dans l'eau, ainsi que dans les légumes du potager communal.

Des questions sans réponse pour les habitants

A l'issue de la réunion publique, les habitants font part de leur inquiétude. "Ce qui m'intéresse en tant que simple citoyen, c'est: est-ce qu'il y a un danger pour ma santé. Je n'ai pas trouvé réponse à cette question", souligne Abdelouhab, au micro de BFM Lyon.

"Je ne suis pas très contente de la réunion, on ne sait pas, résume Martine. Je trouve qu'on ne nous parle pas assez des conséquences que ça peut engendrer."

Si pour le maire les analyses sont plus rassurantes qu'espérées, il déplore malgré tout l'absence de ligne directrice claire. Il réclame des "recommandations fermes" de la part de l'Etat. "L'État ne nous dit pas, vu la concentration, qu'il y a un sujet de santé publique", explique le maire de Pierre-Bénite.

"Je ne demande pas la Lune. Est-ce que là il y a un danger? Est-ce que là vous me conseillez de fermer? Est-ce que là vous dîtes à l'industriel ce qu'il faut faire et ne pas faire? Et est-ce qu'il y a des sanctions derrière?", s'interroge-t-il.

Plainte contre X

Dans cette affaire, dont l'Agence Nationale Sécurité Sanitaire Alimentaire Nationale (Anses) avait déjà fait écho dès 2011, Jérôme Moroge regrette que les scientifiques français n'aient toujours pas fixé de seuils ou de normes donnant des indications sur la dangerosité des perfluorés.

"Il y a deux ans, quand j'ai vu un de vos confrères qui avait publié un article sur le sujet, j'ai alerté tous les services de l'État, qui m'ont tous répondu: il n'y pas de normes, il n'y a pas de sujet. Circulez, il n'y a rien à voir", persifle celui qui a depuis porté plainte contre X pour mise en danger de la vie d'autrui.

Après les révélations de "Vert de Rage", le préfet du Rhône, Pascal Mailhos, a pris deux arrêtés visant à renforcer les contrôles des perfluorés dans les rejets liquides de l'entreprise chimique Arkema, mais aussi de celle de Daikin. De son côté, l'ARS, avait promis la mise sur pied d'une cellule de surveillance de l'eau.

L'un des arrêtés préfectoraux, rappelle l'élu Les Républicains, impose aux industriels de "diminuer très largement l'usage des perfluorés pour ne plus du tout en utiliser à la fin de l'année 2024", ce qu'avait d'ores et déjà promis Arkema. S'il salue "un premier pas", le maire estime que ce le texte "arrive bien tard".

"Des analyses, on va continuer à en faire et en refaire, aussi bien dans le sol que dans l'alimentation, insiste le maire à l'issue de la réunion avec les habitants. Après, on ira jusqu'au bout: il faut aussi qu'on nous dise pourquoi il y a des perfluorés dans l'air. C'est aussi l'objet de la plainte que nous avons déposée."

Florian Bouhot Journaliste BFM Régions