"Stockez au moins 70 à 100 euros en liquide": pourquoi la Banque centrale européenne nous recommande de garder du cash à la maison

Selon un sondage Ifop pour la société de transport de fond Brink’s, depuis le début de la crise sanitaire, un Français sur dix a été confronté à un refus de paiement en espèce. - Philippe Hughen-AFP
"Gardez votre calme et conservez de l'argent liquide." C'est le titre d'une étude publiée par la Banque centrale européenne (BCE) sur son site ce mercredi. A priori, pas le genre de message qui encourage à garder son calme, surtout lorsqu'il émane d'une institution monétaire.
Pourtant, selon la BCE, avoir toujours un bas de laine chez soi est une protection vitale en cas de défaillance des systèmes de paiement électronique. Qu'il s'agisse d'une panne électrique géante comme celle en Espagne en avril dernier, d'une cyberattaque massive ou d'une pandémie, l'argent liquide constitue "une protection à faible coût contre une instabilité systémique majeure", précise le document.
L'institution encourage même les gouvernements de chaque pays de l'UE à prendre des directives en ce sens, comme le font d'ailleurs certains comme les Pays-Bas, l'Autriche et la Finlande. La BCE recommande désormais à chaque foyer européen de conserver à la maison un minimum de 70 à 100 euros en liquide et par personne.
"Une somme suffisante pour couvrir les besoins essentiels pendant environ 72 heures", indique l'étude.
La Banque centrale suit ainsi les recommandations de la Commission européenne qui avait conseillé il y a quelques mois aux citoyens de stocker de l'eau, de la nourriture, des médicaments et de l'argent pour leur permettre de survivre au moins trois jours à des perturbations des services publics.
Le paradoxe de l'argent liquide
Entre la guerre en Ukraine, le Covid et les différentes catastrophes naturelles comme les inondations et les incendies de nombreuses infrastructures européennes ont montré leur vulnérabilité ces dernières années.
"Au-delà de ces facteurs individuels, la résilience des espèces suggère qu'elles présentent des avantages systémiques plus vastes, difficiles à quantifier, peut-on lire dans l'étude. Les espèces offrent une redondance essentielle – une "roue de secours" – au système de paiement. Cette redondance est vitale pour tout système, car aucun système n'est infaillible."
Alors que l'avenir de l'argent liquide alimente de nombreux débat (et notamment en France), que la BCE elle-même travaille à la création d'un euro numérique, cet appel a quelque chose de paradoxal. D'autant que dans le même temps, l'accès aux liquidités est de plus en plus compliqué avec la fermeture des succursales des banques et la disparition des distributeurs de billets.
Le paradoxe c'est que les paiements en cash tendent à disparaître et pourtant l'attachement à l'argent physique des citoyens est lui en hausse. En particulier pendant les périodes de crise.
L'augmentation extraordinaire durant le Covid
"L'apparition de la pandémie début 2020 a déclenché une augmentation extraordinaire et soutenue de la demande de billets en euros, illustrant le rôle crucial des espèces en période d'incertitude prolongée, rappelle la BCE. A la fin de l'année 2020, l'émission nette cumulée de billets dans la zone euro avait bondi de plus de 140 milliards d'euros."
Sur une année normale, c'est seulement 55 milliards d'euros, peut-on lire dans le rapport.
Au printemps dernier, lors de la coupure électrique en Espagne, les consommateurs se sont d'ailleurs rués sur les distributeurs de billets, une fois que le courant était revenu... et que les paiements par carte étaient de nouveau possibles.
La BCE encourage surtout les Etats et les banques à renforcer la sécurité de leurs infrastructures qui doivent être conçus pour résister à des chocs certes rares mais qui à l'heure du numérique peuvent avoir une ampleur extrême. Comme la Finlance par exemple qui développe actuellement des distributeurs automatiques qui seraient totalement hermétiques à des perturbations et des cyberattaques.
