Coupures d'eau et d'électricité, manifestations monstres... Le président de Madagascar a quitté subitement le pays dans un avion français, mais refuse la démission

Depuis plus de trois semaines, Madagascar est le théâtre d’importantes manifestations réprimées dans le sang, avec un bilan tragique d’au moins 22 morts et une centaine de blessés, selon les Nations unies. Le mouvement, initialement pacifique et porté par la Génération Z, est né pour dénoncer des coupures fréquentes d’eau et d’électricité, mais s’est rapidement transformé en rejet global de la classe politique dont le président Andry Rajoelina est devenu le symbole.
Dans ce contexte explosif, Andry Rajoelina a quitté subitement Madagascar, exfiltré par un avion militaire français selon plusieurs sources. Le président explique ce départ par une "tentative de meurtre" contre sa personne et affirme, dans une allocution diffusée depuis un lieu sécurisé, qu’il quitte le pays uniquement pour protéger sa vie. Malgré les appels populaires à la démission, il rejette fermement cette option, appelant au respect de la Constitution malgache.
La mutinerie du Capsat : une bascule décisive
Le tournant politique est intervenu avec la mutinerie d’une unité militaire puissante, le Capsat. Il y a 15 ans, c’est cette unité qui avait contribué à porter au pouvoir l’actuel président: aujourd’hui, elle contribue à sa chute. Après plus de trois semaines de manifestations parfois violentes, le Capsat a rejeté les ordres de répression contre les manifestants et s’est rangée du côté de la population. Ce ralliement a affaibli le président et marqué une rupture avec l’armée.
Des défis économiques et sociaux profonds
Au-delà de la crise politique, Madagascar fait face à des défis structurels majeurs: chômage élevé, baisse du pouvoir d’achat, corruption endémique, et d’immenses inégalités. Le pays affiche pourtant une croissance économique de 4,2% en 2024, contrastant violemment avec le fait que trois Malgaches sur quatre vivent sous le seuil de pauvreté. La contestation reflète donc une colère profonde, bien au-delà des considérations politiques.
Si la fuite du président Rajoelina marque un tournant, elle ne garantit pas la fin de la crise. Un changement de régime, qu’il soit pacifique ou forcé, pourrait apaiser temporairement la colère populaire, mais les défis économiques et sociaux resteront à relever pour garantir une stabilité à long terme.