Entrepreneurs : comment mieux anticiper les risques ?

Pouvez-vous nous présenter votre parcours ?
Ma carrière d’avocate a débuté en contentieux, et plus particulièrement en contentieux commercial. Travailler pour des cabinets d’affaires m’a permis d’assister des entreprises. Au fur et à mesure, j’ai pu développer une assez grande clientèle en matière de droit social.
C’est en 2018 que j’ai décidé de me mettre à mon compte, en me concentrant sur le droit social, tout en ayant un background de droit des affaires. Grâce à la création de mon cabinet, j’ai pu accompagner des PME qui, depuis, sont devenues de grandes sociétés, y compris à l’international. Mon parcours m’a donc amenée à m’orienter vers le conseil pour aider à anticiper, à éviter et à résoudre tout problème juridique.
D’après vous, dans un contexte déjà compliqué, quels sont les risques auxquels peuvent s’exposer les entrepreneurs ?
J'identifie quatre grands types de risques rencontrés par les entrepreneurs :
- Les risques liés à la structure de la société, minimes si l’entrepreneur est seul. En revanche, ils peuvent être conséquents dès lors que deux personnes gèrent une entreprise. Pour prévenir les conflits, elles doivent mettre en place un contrat d’association, ainsi qu’un pacte d’associés ou d’actionnaires. Un système de gouvernance et des règlements d’ordre intérieur sont également nécessaires. Ainsi, toutes les obligations liées à la structure pourront être respectées par l’ensemble des salariés ;
- Les risques contractuels, qui se divisent en deux grands aspects. D’une part, celui qui concerne les parties avec lesquelles on travaille, comme les fournisseurs. D’autre part, l’entreprise elle-même, qui peut rencontrer des difficultés financières, ou qui ne respecte pas ses obligations contractuelles. D’où l’importance de bien s’informer sur ces obligations. Je conseille toujours à mes clients de mettre en place des procédures pour réduire les risques vis-à-vis des parties avec lesquelles on contracte ;
- Les risques contentieux, qui ne peuvent jamais être complètement évités. Néanmoins, des précautions sont à prendre, notamment en matière de propriété intellectuelle, de responsabilité ou de droit social. Quel que soit le rapport de l’entrepreneur vis-à-vis d'un tiers (un employé, un fournisseur, un client), les rapports juridiques doivent être clairs et transparents sur les obligations de chaque partie.
Aujourd’hui encore, les tribunaux européens sont très encombrés, même si certaines procédures ont été simplifiées et accélérées depuis la Covid. Mieux vaut donc éviter de laisser traîner une affaire en longueur. Je conseille toujours à mes clients d’envisager des méthodes alternatives de règlement des conflits, comme la médiation ou l’arbitrage. C’est plus rapide, moins onéreux, et surtout moins stressant ;
- Les risques réglementaires, qui englobent les lois et les règlements européens. En plus de changer rapidement, ils deviennent aussi de plus en plus complexes. Or, si une entreprise ne possède pas de département juridique, il est très difficile pour elle de suivre l’actualité, et donc, d’être en conformité par rapport à son domaine d’activité.
L’entrepreneur manque de temps pour s’auto-responsabiliser sur différents sujets (GDPR, le détachement, la sécurité, la santé, l’anti-blanchiment, la discrimination, le harcèlement, etc.), et pourtant, il encourt de lourdes sanctions en cas de non-conformité. Par conséquent, un entrepreneur est parfois responsable sans même le savoir. Je le constate avec les registres que les entrepreneurs sont censés tenir. Souvent, ils découvrent qu’ils doivent tenir un registre spécial pour les repos, pour les congés, pour évaluer les risques socio-professionnels… Le mieux, pour éviter tout risque, est de savoir et d’anticiper. C’est en ce sens que j’accompagne mes clients.
Pouvez-vous justement nous donner quelques exemples d’accompagnement ?
En tant que mentor à l’université du Luxembourg, il m’arrive d’accompagner des startups créées par des étudiants fraîchement diplômés. Je ne mets pas en place les structures sociétaires, mais je revois avec eux ce qui bloque dans un contrat d’association ou dans un pacte d’associés. J’aime beaucoup les contrats qui peuvent être atypiques. J’ai par exemple travaillé avec un chasseur de têtes qui a créé sa propre société, mais qui ne souhaitait pas faire comme le reste de ses confrères. Il a été plaisant de l’aider à rédiger des conditions générales atypiques.
Aujourd’hui, l’information se trouve facilement en ligne pour créer des contrats. Certains types de contrat n’ont plus qu’à être remplis, comme le contrat de travail, disponible sur le site de l’inspection du travail. Le problème ne se situe pas dans la nature du contrat en lui-même. Le problème, c’est la situation particulière d’une profession : parfois, ses conditions ne s’appliquent pas à un modèle de contrat pré-établi.
Prenons quelqu’un qui démarre son entreprise de toiture et remplit son contrat, sans être conscient qu’il est soumis à une convention collective. Or, s’il se passe quelque chose qui est prévu par sa convention collective, alors le délai de préavis sera supérieur…
L’avocat peut sembler remplaçable sur certains points, mais mieux se tourner vers lui pour s’assurer que tout est bien conforme par rapport à son domaine d’activité.
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