Les moteurs électriques au service de l’économie

Qu’entendez-vous par « moteurs électriques spéciaux » ?
Les moteurs électriques sont dits « spéciaux » lorsqu’ils doivent répondre à des spécifications particulières, ne permettant pas d’avoir recours à des équipements standards. Il s’agit le plus souvent de moteurs prototypes ou de très petites séries.
Les systèmes de motorisation conçus et fabriqués par EN Moteurs sont principalement destinés aux environnements dits « contraints », tels que les environnements marin, sous-marin ou encore nucléaire. Ils sont très exigeants en termes de performances acoustiques et vibratoires, de tenue aux chocs, aux séismes, ou encore de tenue en température ou aux rayonnements. Nous possédons notamment un savoir-faire de très haut niveau dans la conception et la fabrication de moteurs à rotor noyé, destinés à la motorisation de pompes totalement étanches pour des applications nucléaires ou sous-marines.
Vous avez repris EN Moteurs il y a un peu plus de trois ans. Quelle est, aujourd’hui, la direction prise par l’entreprise ?
Nos savoir-faire historiques dans le secteur de la défense navale sous-marine et du nucléaire militaire nous permettent aujourd’hui d’élargir notre offre à d’autres secteurs industriels, tant pour le développement de projets neufs que pour la maintenance et le traitement des problématiques d’obsolescence.
C’est ainsi que nous nous positionnons comme acteur du secteur de l’énergie, domaine indispensable au renforcement de la souveraineté économique de la France. Nous avons pu faire, en particulier dès 2019, le pari du nucléaire. Il nous permet de nous inscrire dans le développement de cette filière incontournable pour produire une énergie décarbonée en quantité industrielle et à des prix compétitifs.
Tout en consolidant sa présence dans son secteur d’activité historique de la défense navale autour de problématiques telles que le maintien en conditions opérationnelles, l’amélioration du rendement des moteurs à rotor noyé ou la propulsion de drones, EN Moteurs est entrée dans une phase de mutation profonde. Une transformation nécessaire pour relever les défis qui s’offrent à elle, principalement autour de la transition énergétique et de la recherche de densité de puissance.
Nous poursuivons le renforcement de nos activités de recherche et développement sur des sujets tels que les hydrogénérateurs destinés à la propulsion vélique et la mobilité terrestre. Elles nous permettent de nous ouvrir plus largement aux autres secteurs industriels et d’envisager d’ici quelque temps la production de petites et moyennes séries.
Qui sont vos principaux clients ?
Nos principaux clients sont les grands donneurs d’ordres du secteur de la défense navale, à savoir Naval Group (maître d’œuvre des bâtiments de la Marine nationale) et TechnicAtome (maître d’œuvre des chaufferies nucléaires militaires), ainsi que certains de leurs fournisseurs, notamment les fabricants de pompes destinées aux réseaux fluides de ces installations.
En parallèle, nous prenons part régulièrement à la conception et la fabrication de machines tournantes spéciales, destinées à des laboratoires d’universités, comme celles de Nantes ou d’Artois.
Enfin, l’étendue de nos savoir-faire nous permet de proposer régulièrement nos services à d’autres secteurs industriels. À titre d’exemple, EN Moteurs a conçu en 2007 l’un des premiers moteurs prototypes de la Renault ZOE.
Quels sont les savoir-faire nécessaires à votre activité ?
Nos savoir-faire d’excellence sont le dimensionnement et le bobinage des circuits électromagnétiques. En quelques mots, un moteur électrique se compose de deux éléments principaux : un rotor (tournant) et un stator (fixe). C’est la génération de champs électromagnétiques par le passage d’un courant électrique à travers des bobinages de cuivre qui permet la mise en rotation du rotor.
Tout l’art du bobinier est de disposer le fil de cuivre à l’intérieur d’un feuilleté de tôles électromagnétiques (l’empilage). Dans le cas de nos moteurs, qui répondent à des exigences de performances très élevées, les bobinages sont réalisés à la main. C’est un travail de grande précision, nécessitant un très grand soin pour générer un champ magnétique de bonne qualité, et ne pas endommager le fil afin d’éviter tout risque de court-circuit à l’intérieur du moteur. Un vrai travail d’orfèvre !
Il existe très peu de formations à l’électro bobinage permettant à un apprenti d’acquérir les principes de base du métier. C’est un savoir-faire qui s’apprend avant tout sur le terrain, par la pratique et dans la durée auprès des plus anciens. La maîtrise des techniques de bobinage les plus simples mises en œuvre chez EN Moteurs requiert un minimum de trois à cinq ans de pratique. Suivant les technologies de moteurs que nous produisons (courant continu, asynchrone, aimants permanents…), les techniques de bobinage diffèrent avec des niveaux de complexité parfois extrêmement élevés.
Ensuite, le montage électromécanique et le réglage demandent eux aussi beaucoup de soin et de rigueur, en particulier lorsqu’il s’agit de moteurs installés à bord de sous-marins, qui doivent être extrêmement silencieux. Leur mise au point peut se révéler très longue.
Enfin, EN Moteurs dispose d’un banc d’essai pour tester et valider les performances des moteurs et les présenter aux clients pour recette avant livraison.
Bien entendu, tous ces travaux de fabrication ne sauraient être mis en œuvre sans le travail de notre bureau d’études, en charge du dimensionnement électromagnétique et de la conception mécanique. La proximité du bureau d’études et de la production est un atout majeur pour garantir les niveaux de performances et de qualité requis, ainsi qu’une très grande réactivité.
Quel constat dressez-vous du marché du moteur électrique, et quelles évolutions envisagez-vous ?
Les problématiques liées à la transition énergétique et à la décarbonation entraînent une mutation du moteur électrique. Hormis dans le cas de la traction ferroviaire électrifiée, et notamment en France, le moteur électrique est longtemps resté cantonné à des applications auxiliaires. Il devient aujourd’hui un moteur principal dans de très nombreuses applications. Il se spécialise de plus en plus pour assurer des fonctions de plus en plus spécifiques. La filière a donc un très grand potentiel de développement, avec un large spectre industriel.
Cependant, si le moteur électrique apporte certaines réponses aux problèmes liés à la décarbonation, il n’est pas une solution universelle. Il convient donc d’en connaître les limites. Tout d’abord parce que l’électricité est une énergie secondaire, dont la production nécessite une source d’énergie primaire (nucléaire, renouvelable ou fossile). Ensuite, parce que malgré les très grands progrès des batteries, réalisés et à venir, ou les espoirs suscités par l’hydrogène, le stockage de l’énergie électrique reste un problème techniquement et écologiquement complexe. Il impose des changements stratégiques des infrastructures de production, d’acheminement et de stockage, s’inscrivant dans le temps long. S’il n’est pas possible de développer ce sujet ici, il est important de retenir qu’il s’agit de choix qui doivent être faits avec discernement et sans idéologie.
Enfin, le très fort développement du moteur électrique, notamment dans les secteurs de la mobilité et de l’automobile, induit une très forte demande de matières premières et composants (cuivre, tôles électromagnétiques, aimants…). Elle imposera la maîtrise de plusieurs facteurs, comme l’impact écologique de l’utilisation de terres rares (pour les aimants notamment) ou encore la nécessaire flexibilité des filières de production et d’approvisionnement, qui vont devoir adapter leurs capacités pour répondre à la demande. Autant de contraintes dont EN Moteurs tient compte pour relever les défis qui se présentent à elle dans son développement.
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