TOUT COMPRENDRE - La tech doit-elle craindre pour ses financements après la faillite de SVB?

La fermeture, vendredi dernier, de la banque californienne SVB a provoqué des conséquences en chaîne qui inquiètent le monde de la finance.
Plus grande faillite bancaire américaine depuis la crise de 2008, l’établissement spécialisé dans le financement des entreprises de la tech n’a pas réussi à lever suffisamment de capital pour répondre aux demandes de ses clients qui voulaient récupérer leur argent. Une consœur, Signature Bank, a également été fermée deux jours plus tard par les autorités américaines.
Si une crise financière mondiale ne semble pas se profiler, c’est une onde de choc pour les entreprises de la tech qui se sont mobilisées ce week-end, inquiètes pour leur financement, et certaines pour leur survie.
• Pourquoi SVB était une banque importante pour le secteur de la tech?
Avec quelque 173 milliards de dépôts, Silicon Valley Bank était la 16ème plus grosse banque américaine et un établissement de référence depuis 40 ans pour les start-up de la tech et les sociétés de capital-risque.
La banque se targuait d'avoir pour clients "près de la moitié" des entreprises technologiques et des sciences du vivant financées par des investisseurs américains. Or, la grande majorité des fonds que ceux-ci avaient déposés chez SVB n’étaient pas couverts par une garantie, ils ne pouvaient donc pas retirer plus de 250.000 dollars suite à la liquidation de SVB.
Une somme modeste aux vues du rapport annuel de SVB qui stipule que la partie des dépôts non assurée se montait à environ 96% du total.
Heureusement, les autorités américaines ont assuré dimanche que tous les clients de la banque qui a fait faillite pourraient retirer l’intégralité des dépôts qu’ils avaient placés chez celle-ci qui est sous tutelle de l'agence publique Federal Deposit Insurance Corporation et cherche désormais racheteur. De quoi rassurer certaines entreprises comme la société de streaming Roku qui y avait déposé 487 millions de dollars, ou 25% de ses liquidités.
• Comment se sont mobilisées les entreprises de capital-risque et de la tech?
Aux Etats-Unis et au Royaume-Uni notamment, les sociétés se sont mobilisées ce weekend et ont demandé de l'aide.
Aux Etats-Unis d’abord, une pétition signée par plus de 5000 patrons et fondateurs de l’industrie qui représentent plus de 400.000 emplois demandait à la secrétaire du Trésor américaine, Janet Yellen, de venir en aide aux petites entreprises de la tech qui étaient en danger de ne plus pouvoir payer leurs salariés si elles ne pouvaient pas retirer leur argent déposé chez SVB.
Entre autres actions, des sociétés de capital-risque ont exprimé leur soutien et plusieurs se sont aussi déclarées prêtes à aider financièrement des jeunes entreprises qui en avaient besoin.
Au Royaume-Uni où SVB possède une succursale, le gouvernement a estimé dimanche que la faillite de la banque posait “un risque sérieux” pour le secteur de la tech national qui faisait beaucoup affaire avec la banque californienne.
Plusieurs centaines de dirigeants de start-ups britanniques auraient écrit au gouvernement la semaine dernière pour lui demander de l’aide. Le Trésor britannique, la banque d’Angleterre et HSBC ont répondu lundi matin en annonçant le rachat de SVB UK par HSBC pour un livre et en assurant que les clients pourront accéder à leurs dépôts.
En Inde aussi, SVB était une banque de choix pour les jeunes entrepreneurs de la tech qui faisait affaire avec les Etats-Unis. D’après plusieurs médias, le ministre indien de la technologie prévoit de rencontrer des start-up dans la semaine à ce propos.
Les entreprises de la tech auront-elles plus de mal à se financer à l’avenir?
“Je ne pense pas que cela remette en cause les financements sur les projets les plus sérieux,” explique Alexandre Baradez, chef de la stratégie de marché chez IG.
"Avant le Covid, tous les projets étaient financés quel que soit leur solidité, mais depuis quelques temps, il y avait un ralentissement des financements, note-t-il. “Ce n’est pas une chose nouvelle.”
Les entreprises de capital-risque vont continuer à diminuer leur voilure, c’est-à-dire qu’elles seront plus exigeantes sur la sélectivité de leur projet, il y aura davantage de ‘due diligence’, explique-t-il, mais cela n’empêchera pas les financements.
Il rajoute que si la politique monétaire se détend et que l’inflation baisse, ce qui semble se profiler, cela deviendra plus facile pour le secteur qui pourra à nouveau se financer plus facilement.
• Les start-up internationales vont-elles bouder les financements américains?
La confiance des entrepreneurs de la tech dans les financements américains pourrait être ébranlée. Notamment en Chine où SVB est présente depuis le début des années 2000.
Pour Alexandre Baradez, il est possible que les entreprises chinoises cherchent davantage à se financer ailleurs qu'aux Etats-Unis d'autant plus qu'il y a des tensions politiques entre les deux pays. "C'est un frein supplémentaire," note-t-il. Il ne pense pas, en revanche, que cela puisse avoir des répercussions similaires en Inde ou ailleurs.