Les badgeuses qui prennent les salariés en photo jugées trop intrusives par la Cnil

La CNIL s'est opposée à une expérimentation de reconnaissance faciale dans deux lycées du Sud de la France. - AFP
Souriez, vous êtes photographié! Dans certaines entreprises et administrations, les badgeuses qui sont utilisées pour "pointer" prennent dans le même temps en photo le salarié. Une pratique jugée trop intrusive par des agents publics et des salariés qui ont décidé de saisir en 2018 la Cnil, la Commission nationale informatique et libertés. Six plaintes ont été déposées.
Après plusieurs contrôles entre mars et septembre 2019, la Cnil a jugé que cette pratique collecte excessivement des données et a donc mis les organismes concernés en demeure "de rendre leurs dispositifs de contrôle des horaires conformes au RGPD (Réglement général sur la protection des données personnelles, NDLR) dans un délai de trois mois".
En effet, "tout dispositif de contrôle des horaires de travail doit respecter le principe de minimisation prévu par l’article 5(1.c) du RGPD. Ainsi, les données collectées dans ce cadre doivent être adéquates, pertinentes et limitées à ce qui est nécessaire au regard de cette finalité", peut-on lire dans un communiqué.
Contraire au RGPD
L’article L1121-1 du Code du travail, applicable aux contrats de droit privé précise égaement que "nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché".
Par ailleurs, le Conseil d’État et la Cour de cassation ont déjà eu l’occasion de préciser, à propos d’un dispositif assurant le contrôle des horaires des salariés par la collecte de leurs données de géolocalisation, que "l'utilisation (par un employeur) d'un système de géolocalisation pour assurer le contrôle de la durée du travail (de ses salariés) […] n'est licite que lorsque ce contrôle ne peut pas être fait par un autre moyen, fût-il moins efficace".
Les dispositifs classiques de contrôle sont suffisants
La CNIL a donc considéré que l’utilisation de badgeuses photo par les organismes contrevenait au principe de minimisation. "La collecte obligatoire et systématique, deux à quatre fois par jour, de la photographie de l’employé à chacun de ses pointages apparaît excessive".
La Commission rappelle que "les outils de gestion des horaires sans prise de photographie, tels que les pointeuses à badge classiques, apparaissent suffisants, sauf circonstances particulières et dûment étayées, pour remplir la finalité de contrôle des horaires de travail. Les pointeuses par badge enregistrent le jour et l’heure de pointage de la personne utilisant le badge et permettent d’assurer un contrôle satisfaisant des horaires de travail des agents".
Si les organismes ne se conforment pas à leur mise en demeure, la formation restreinte de la CNIL pourra être saisie, prononcer une sanction pécuniaire et rendre celle-ci publique.