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Le fonds activiste Amber s’attaque à Spie

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La société spécialisée dans les services à l’énergie suscite les convoitises. BPI France vient d’entrer au capital pour soutenir le PDG de Spie qui veut garder l’entreprise indépendante.

Spie est la cible d’un fonds activiste et pas n’importe lequel. Selon nos informations, le fonds activiste Amber Capital a décidé de lancer une "campagne" à l’encontre de la société dont il est actionnaire depuis un an et demi.

"Nous confirmons être actionnaire de Spie" nous explique Amber, connu pour s’être attaqué à la forteresse Lagardère, bientôt racheté par Vivendi. Il dispose de moins de 1% du capital de l’entreprise. Des contacts ont déjà eu lieu ces derniers mois avec le PDG, Gauthier Louette. Le fonds activiste tente de pousser l’entreprise à se vendre alors que son secteur des services à l’énergie est en pleine ébullition.

Vinci vient de débourser 4,9 milliards d’euros pour racheter Cobra, le leader espagnol et sud-américain des services à l’énergie et des concessions dans les renouvelables. Il y a quelques mois, c’est surtout Bouygues qui a cassé sa tirelire en payant 7,1 milliards d’euros à Engie pour lui racheter Equans, spécialisée dans les réseaux de chaleur, la climatisation ou encore l’efficacité énergétique.

Spie au centre du jeu

Un autre industriel français, Eiffage, était aussi sur les rangs et souhaite se renforcer dans ces métiers. Plusieurs fonds étaient aussi en lice comme l’américain Bain qui a été en finale contre Bouygues et proposait 6,5 milliards d’euros pour racheter la filiale d’Engie. "Tous les candidats étaient dans une logique double: tenter de racheter Equans et, en cas d’échec, se rabattre ensuite sur Spie" confie un des candidats malheureux.

Amber Capital joue aussi cette stratégie alors que Spie est convoité depuis deux ans par les groupes de BTP. Début 2021, Bouygues avait déjà discuté avec l’entreprise pour tenter de la racheter avant de décrocher Equans. "Mais Gauthier Louette ne voulait pas vendre" confie une source proche du groupe de BTP. Eiffage aussi a approché Spie à plusieurs reprises, en 2018 et l’an passé. "Mais Eiffage n’a pas formulé d’offre de rachat" précise un proche de Spie. "Nous avons comme stratégie de rester indépendant" confirme un porte-parole de l’entreprise.

L’assemblée générale du 11 mai prochain est en ligne de mire. Gauthier Louette doit être renouvelé dans ses fonctions de PDG pour un quatrième mandat. Amber souhaite qu’il abandonne ses fonctions de directeur général et ne conserve que la présidence de Spie. Mais le fonds ne déposera pas non plus de résolutions en ce sens pour l’assemblée générale. "Le succès de Spie est celui de son PDG, explique un proche de Gauthier Louette. Il est inamovibl". Il compte sur le soutien d’autres fonds d’investissement comme Boussard & Gavaudan qui détient 5%.

Le cours de Bourse est plombé par la stratégie d'indépendance

Amber aura du mal à former un front. Plusieurs gros actionnaires de Spie soutiennent son PDG. BPI France est d’ailleurs entrée en prenant 5% de son capital la semaine passée avec son fonds "lac d’argent" destiné à protéger les fleurons français. Gauthier Louette souhaitait qu’elle devienne actionnaire depuis un an pour remplacer la Caisse de Dépôts et Placement du Québec (CDPQ), qui est sortie de Spie l’an passé. BPI France disposera en plus d’un siège au conseil d’administration. Avec la Caisse des Dépôts qui détient 6%, les Peugeot (5%), les salariés (6%) et les principaux dirigeants (2%), le capital est verrouillé à hauteur de 24%.

Amber compte toutefois faire élire un administrateur plus ouvert à ses idées de consolidation alors que deux voient leur mandat se terminer à la prochaine assemblée générale. Il voit plus loin et vise à ouvrir le sujet épineux de la succession de Gauthier Louettte qui permettrait ensuite d’envisager un adossement d’ici quelques années. "La dissociation des fonctions est à la mode", reconnait un actionnaire de Spie.

La Caisse des Dépôts et les Peugeot sont actionnaires depuis plusieurs années et seront amenés à vendre leurs participations dans les années à venir. Gauthier Louette lui-même y a intérêt puisqu’il détient 1%, soit plus de 30 millions d’euros en actions Spie. Tous savent bien que le cours de Bourse de Spie ne profite pas de l’envolée de la valorisation du secteur car son PDG bloque toute vente de l’entreprise. Alors qu’il a 61 ans, sa succession sera au menu de son prochain mandat.

Matthieu Pechberty Journaliste BFM Business