Jour du dépassement: ce 2 août, l'humanité a épuisé les ressources que la Terre peut produire en un an

Depuis ce mercredi, l'humanité vit à crédit sur Terre. Et ce, pour les 151 jours restants de l'année. La population mondiale a déjà consommé l'ensemble des ressources que la planète peut produire et régénérer en un an. Soit pêché plus de poissons qu'il ne va en naître, abattu plus d'arbres qu'il ne va en pousser ou encore émis plus de gaz à effet de serre que les forêts et les océans peuvent absorber. En d'autres termes, à ce jour, il faudrait 1,75 Terre pour subvenir aux besoins de la population mondiale.
C'est ce qu'on appelle le "Jour du dépassement". Un indicateur, fort et alarmant, calculé par l'ONG américaine Global Footprint Network à partir de données des Nations unies.
Évidemment, tous les pays n'ont pas la même responsabilité face à cette dette écologique. Si tous les humains vivaient comme les Français, le jour du dépassement serait intervenu encore plus tôt, le 5 mai 2022, et il faudrait 2,9 Terres pour subsister... Une observation déjà inquiétante mais qui n'est pas la pire. Aux Etats-Unis, au Canada et aux Émirats, le jour du dépassement a été établi au 13 mars. Quant au Qatar, à peine plus d'un mois après avoir commencé l'année, dès le 10 février, le pays a essoré les ressources de la planète.
Une journée de gagnée sur 2022
Sur le papier, le Jour du dépassement intervient cette année cinq jours après celui de l'année 2022 qui était établi au 29 juillet. Mais ce progrès est surtout dû à une nouvelle méthode de calcul. Dans les faits, seules 24h ont été gagnées. L'ONG américaine souligne, dans un communiqué, "qu'au cours des cinq dernières années, la tendance s'est stabilisée" mais qu'il est difficile de déterminer dans quelle mesure cette évolution est due à un ralentissement économique ou à des efforts délibérés de décarbonisation".
Et cette journée grappillée est loin d'être suffisante. Pour atteindre l’objectif fixé par les scientifiques du Giec - de réduire les émissions de gaz à effet de serre de 43 % d’ici 2030 et in fine de limiter le réchauffement planétaire à + 1,5°C - il faudrait reculer le Jour du dépassement de 19 jours par an pendant les sept prochaines années, prévient le Global Foodprint Network.
Alors que depuis les années 70, la tendance est toute autre: en cinquante ans, la ligne rouge n'a cessé d'être dépassée de plus en plus tôt. Du 25 décembre en 1971, en passant par le 18 octobre en 1990, le 2 septembre en 2004 et désormais le 2 août en 2023. Soit quasiment un recul d'un mois par décennie... Il faut noter toutefois que cette comparaison temporelle est à prendre avec des pincettes car les méthodes de calcul, et la qualité des données, ont évolué avec les années.
"Le dépassement persistant entraîne des symptômes de plus en plus marqués, notamment des vagues de chaleur inhabituelles, des incendies de forêt, des sécheresses et des inondations, avec le risque de compromettre la production alimentaire", alerte Steven Tebbe, PDG de Global Footprint Network dans le communiqué.
Des solutions mises en avant
L'ONG présente des solutions pour inciter à changer de direction. Comme la taxation des émission de CO2, la limitation des naissances, la mise en place de politiques vertes ambitieuses par la moitié des pays ou encore l'utilisation de 75% d'énergie renouvelable contre 39% actuellement. Ces mesures permettraient de gagner respectivement 63 jours, 49, 42 et 26.
Certaines critiques s'élèvent tout de même contre cet indicateur. Le Jour du dépassement présenterait des incertitudes selon Aurélien Boutaud qui s'exprime dans le média Reporterre. Les données sur lesquelles s’appuie l'ONG sont plus ou moins fiables selon les pays et "des raccourcis et des hypothèses pas toujours visibles dans le résultat final" sont faits pour établir le calcul.
Il juge aussi que la notion de ressources piquées à la planète est anthropocentré car cela revient à considérer "que toute la biocapacité est potentiellement disponible pour répondre aux besoins de l’humanité". Or, "il faudrait probablement ne pas intervenir sur 10 à 20 % de la biosphère".