Sida, aide alimentaire… En fermant l'USAID, Donald Trump a provoqué une crise humanitaire mondiale

Le président américain Donald Trump a annoncé le 3 février dernier la fermeture brutale de l’USAID. L'Agence des États-Unis pour le développement international est une agence gouvernementale chargée du développement économique et de l’aide humanitaire dans le monde. Et elle a fait partie des premières victimes des coupes budgétaires d’Elon Musk, à la tête du département de l'Efficacité gouvernementale.
Donald Trump estime que l'agence est "dirigée par une bande de fous extrémistes".
Pourtant, l'USAID a un rôle crucial. Financée par la première puissance mondiale, elle représente à elle seule 42% du budget de l’aide humanitaire dans le monde. Surtout, l'agence est impliquée dans des programmes d'aide quelque 120 pays, et certains n'ont pas de substitut. Résultat, sa fermeture soudaine a déjà de graves conséquences.
Coup d'arrêt dans la recherche médicale et les vaccins
Déjà dans la recherche médicale. À cause de l’arrêt de l’USAID, il y aurait à peu près 30 essais cliniques gelés, dont ceux du Brilliant Consortium, qui travaille sur deux vaccins expérimentaux contre le sida en Afrique. Toujours dans la lutte contre le sida, au Kenya, des patients séropositifs ne recevront plus leur traitement d’antirétroviraux.
L'USAID avait jusqu'ici permis de sauver 1,3 million de personnes du sida en 20 ans, via le programme Pepfar, lancé en 2003 sous la présidence de George Bush.
Par ailleurs, en Angleterre, une centaine de personnes ont été vaccinées contre le paludisme via des essais financés par l'agence américaine, mais elles ne pourront désormais plus être suivies.
Enfin, des études menées en Asie, en Afrique ou en Amérique latine, pour des traitements contre le choléra, la tuberculose ou le cancer du col de l’utérus ont aussi été gelées.
Le budget ukrainien sévèrement amputé
La coupure des financements de l’USAID inquiète aussi en Ukraine. L’agence américaine a versé près de 38 milliards de dollars depuis le début de la guerre: 2,4 milliards de dollars pour l’humanitaire, 5 milliards pour l’aide au développement et plus de 30 milliards de dollars pour l’aide directe au budget ukrainien.
La disparition de ces fonds soulève des craintes autour de la cybersécurité ukrainienne, par exemple, puisque l’USAID contribue à la sécurité des réseaux de télécommunications de Kiev contre les cyberattaques russes.
Au-delà de l'Ukraine, pour une vingtaine de pays, le gel sur l'ensemble de l'année de l'aide américaine pourrait entraîner une perte de 1% de leur revenu national brut (RNB) et même de 3% pour certains comme le Soudan du Sud, la Somalie ou l'Afghanistan, a assuré le Centre du développement mondial (CGD), une ONG basée à Washington, dans un article de blog.
Pour ces pays, le coup serait particulièrement sévère, puisque l'aide américaine représente plus de 20% de l'aide totale reçue annuellement, jusqu'à 35% dans le cas de l'Afghanistan, 36% pour le Soudan du Sud et 40% pour la Somalie.
À titre d'exemple, les coupes dans l'aide américaine laissent ainsi le Ghana face à un déficit de financement de 156 millions de dollars, les secteurs de la santé et de l'agriculture se préparant à des pénuries de médicaments et d'engrais.
Des conséquences aussi aux États-Unis
Aux États Unis, aussi, cette fermeture a des conséquences. Des entreprises de fabrication de produits alimentaires, utilisés pour lutter contre la faim, s’inquiètent. À Fitzgerald, en Géorgie, 98% de la production de l’usine de Mana Nutrition était ainsi vendue à l’USAID.
L’agence gouvernementale employait, elle, 100.000 personnes. La plupart sont désormais en congé forcé. Les effectifs pourraient finalement être réduits à seulement… 300 personnes, ajoutant un drame économique local au drame humanitaire mondial. À la tête de cette équipe très très réduite: le secrétaire d'État Marco Rubio a annoncé être le nouveau chef par intérim de l'USAID afin de mettre fin à l'"insubordination".