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Pourquoi le fisc américain pourrait réclamer des impôts au pape Léon XIV et même auditer les comptes du Vatican

Le pape Léon XIV au Vatican le 8 mai 2025

Le pape Léon XIV au Vatican le 8 mai 2025 - Tiziana FABI / AFP

Léon XIV est le premier pape de nationalité américaine. Cette situation pose une question inédite: comme les autres Américains résidents à l'étranger, le souverain pontife devra-t-il payer des impôts à l'administration fiscale des États-Unis?

Sa Sainteté Léon XIV échappera-t-elle au fisc américain? La question est inédite car c'est la première fois qu'un pape possède la nationalité américaine (il a aussi la nationalité péruvienne).

Le système fiscal américain est particulier puisqu'il est l'un des seuls à imposer également ses citoyens installés à l'étranger depuis un traité adopté en 2010 par Washington qui s'appelle le Fatca.

"Il n'y a pas d'exception pour les responsables de gouvernements étrangers, et le pape ne serait pas le premier dirigeant étranger pris dans les filets du fisc", explique Brandon Mitchener, directeur de l'association Tax fairness for Americans abroad (justice fiscale pour les Américains de l'étranger) au Wall Street Journal.

L'ex-premier ministre britannique Boris Johnson en avait fait les frais en 2015. L'IRS (fisc américain) lui réclamait des impôts pour la vente de sa maison à Londres. Le responsable politique avait décidé de renoncer à sa nationalité américaine, le seul moyen pour échapper à l'administration fiscale.

Une imposition "peu probable" mais de la paperasse

Mais alors qu'en sera-t-il du pape Léon XIV? Selon les experts interrogés par le Washington Post, il s'agit d'un cas complexe. Le souverain pontife ne perçoit certes pas de salaire à proprement parler en échange de ses fonctions, mais il bénéficie de nombreux avantages en nature.

Ses frais courants sont en effet pris en charge, et théoriquement, il pourrait être à forcer à évaluer leur valeur. Par ailleurs, le pape peut recevoir des revenus issus d'autres sources, comme des droits d'auteur sur des livres.

Mais en réalité, selon Brandon Mitchener, in fine, le pape ne devrait pas avoir à payer d'impôts.

"Son immunité diplomatique, l'absence probable de richesse personnelle et son statut de chef d'État rendent peu probable une telle application", explique le spécialiste.

"Mais l'absence d'exemption formelle - même pour le pape - souligne l'absurdité d'un système fiscal qui fonctionne souvent en pilote automatique, sans aucune nuance", ajoute-t-il, appelant à réformer le système d'imposition des Américains résidents à l'étranger.

Les comptes du Vatican audités par le fisc?

D'autant que la situation pourrait être encore plus incongrue. Certains commentateurs suggèrent que Léon XIV, du fait de sa nationalité américaine, pourrait être contraint de déclarer tous les comptes bancaires du Vatican au fisc américain, la Banque du Vatican étant sous l'autorité directe du pape.

"Même si ces comptes sont institutionnels et non personnels, la loi Fatca ne fait pas toujours clairement la distinction entre les actifs privés et ceux liés à des fonctions officielles, indique Brandon Mitchener. Cela soulève la possibilité que le Saint-Siège soit soumis à une surveillance financière américaine simplement parce que le pape est américain."

Là encore son immunité de chef d'Etat pourrait l'en protéger mais il n'existe pas dans le traité Fatca, ratifié en 2015 par le Vatican, d'exemption formelle en la matière. Un zèle de l'IRS pourrait donc conduire les contrôleurs fiscaux américains d'auditer les comptes du Vatican par le simple fait que le pape est américain.

Marine Cardot