Mountain Pass, ou la renaissance sous perfusion de l'unique mine de terres rares aux États-Unis

Alors que Trump convoite les minerais stratégiques en Ukraine, dans le désert aride du Mojave, en Californie, se trouve l’unique mine de terres rares des États-Unis: Mountain Pass.
Découverte en 1949, cette mine se distingue rapidement par la richesse de ses minerais. En 1952, la Molybdenum Corporation of America (Molycorp) démarre la production de terres rares, après avoir acheté les concessions qui viennent d’être découvertes. Dans les années 1960, le site fabrique principalement de l’europium, utilisé pour produire la teinte rouge des téléviseurs couleur.
"L'ère Mountain Pass"
Durant cette période appelée "l'ère Mountain Pass”, l'entreprise devient un acteur majeur de l’industrie des terres rares. Cependant, au fil du temps, la production se délocalise hors des États-Unis, en raison de problèmes environnementaux et de la chute de la valeur des terres rares, exacerbée par l’ascension de la Chine sur le marché. En 2002, le couperet tombe: la mine ferme ses portes.
Mais l’histoire de Mountain Pass ne s’arrête pas là. En 2005, Chevron achète Unocal, alors propriétaire de la mine. En 2010, un ambitieux projet de modernisation, le "Projet Phoenix", est lancé avec un investissement de 1,5 milliard de dollars. Cependant, les résultats sont décevants, la production stagne et ne dépasse pas 12.000 tonnes par an. D’après une information du Monde, la mine se focalise sur le cérium, mais son prix a alors chuté, passant de 100 dollars le kilogramme à 1 dollar. La faillite survient en 2015.
Réduire la dépendance avec la Chine
Deux années plus tard, JHL Capital Group, dirigé par James Litinsky, prend le contrôle de la mine. L’homme d’affaires, sans expertise minière ni connaissance particulière en chimie, se lance dans la revitalisation de Mountain Pass. En 2017, la production redémarre, portée par un climat politique propice, alors que jusque-là, ces mines étaient considérées comme trop polluantes.
Le président Trump et, plus tard, Joe Biden, encouragent la production de terres rares sur le sol américain pour réduire la dépendance avec la Chine.
"Le principe de base est simple: le peuple américain ne devrait jamais être confronté à une pénurie des biens et services dont il dépend, qu’il s’agisse de sa voiture, de ses médicaments ou de la nourriture qu’il trouve à l’épicerie du coin", déclare Joe Biden.
En 2019, MP Materials atteint une production annuelle de 30.000 tonnes métriques d'oxydes de terres rares (REO), représentant 15 % du marché mondial. Un an plus tard, l’entreprise est cotée en bourse à New York. La production atteint son record en 60 ans d’existence. Deux contrats avec le Département de la défense sont signés, afin de restaurer la chaîne d’approvisionnement nationale en terres rares.
Investissements massifs pour créer une usine d'aimants
Ainsi, en 2022, MP Materials reçoit une aide de 35 millions de dollars d’aides du Département de la défense.
Par ailleurs, la Maison Blanche annonce que MP Materials va investir "700 millions de dollars supplémentaires et créera plus de 350 emplois dans la chaîne d'approvisionnement en magnets d'ici 2024." Cet investissement a deux objectifs: réduire la dépendance avec la Chine (car la société envoie ses minerais en Chine pour être raffinés), et créer une usine d’aimants à Fort Worth (au Texas), fabriqués à partir de matières premières extraites à Mountain Pass.
Pari réussi, puisque l'industriel a commencé la production d'aimants il y a un mois.
Les produits sont fournis à General Motors, client essentiel pour MP Materials, notamment pour soutenir la production de véhicules électriques. Les magnets sont aussi des composants essentiels pour les robots, les éoliennes, les drones.
"Cette étape marque un progrès majeur dans la restauration d'une chaîne d'approvisionnement intégrée de magnets en terres rares aux États-Unis", a déclaré James Litinsky, fondateur, président et PDG de MP Materials
Une stratégie qui s'inscrit dans la volonté d'être moins dépendant en terres rares, alors que la Chine représente en effet 69 % de la production mondiale de minerais de terres en 2023, loin devant les États-Unis (12 %).