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Moscou met la main sur un colossal gisement de lithium en Ukraine que les Américains lorgnaient depuis leur accord avec Kiev

Vue aérienne d'une mine de titane à ciel ouvert dans la région de Jytomyr, le 28 février 2025, en pleine invasion russe de l'Ukraine. L'Ukraine a accepté les termes d'un accord minier avec les États-Unis et pourrait le signer le 28 février 2025, ont déclaré les deux pays. Kiev espère que cette décision permettra d'obtenir de futures garanties de sécurité de la part de Washington.

Vue aérienne d'une mine de titane à ciel ouvert dans la région de Jytomyr, le 28 février 2025, en pleine invasion russe de l'Ukraine. L'Ukraine a accepté les termes d'un accord minier avec les États-Unis et pourrait le signer le 28 février 2025, ont déclaré les deux pays. Kiev espère que cette décision permettra d'obtenir de futures garanties de sécurité de la part de Washington. - AFP

En Ukraine, l’armée russe s’est emparée d’un important gisement de lithium. Et cela interroge sur l’avenir de l’accord minier conclu avec les Etats-Unis.

Le gisement de Shevchenko est situé en périphérie du village du même nom, dans l’Est de l'Ukraine. Il a été saisi par les forces russes. Considéré comme l'un des plus prometteurs d'Europe de l'Est, il s’étend sur 40 hectares. C’est l'un des gisements les plus précieux du pays en raison de sa forte concentration en lithium.

Le site renfermerait 1,2 million de tonnes de minerai, situé à une profondeur de 150 à 200 mètres. Une profondeur favorable à l'exploitation commerciale. Ce qui n’échappe pas à Moscou.

"Ce gisement a un grand potentiel. C’est un élément très important de l'économie future", affirme un haut responsable russe dans la région de Donetsk. Vladimir Ezhikov indique que Rosatom, le géant public du nucléaire a déjà manifesté son intérêt.

Lourd préjudice pour Kiev

Les Russes se réjouissent à l’inverse des Ukrainiens pour qui le préjudice est lourd. Ce gisement est le premier à tomber entre les mains de la Russie depuis la signature de l'accord minier entre Kiev et Washington. Accord prévoyant la création d'un fonds d'investissement pour la relance et la reconstruction de l’Ukraine. L’enjeu est donc majeur.

La mine de Shevchenko, réputée pour sa concentration en lithium mais aussi pour sa qualité, était censée servir de levier économique dans ce partenariat. Le ministère ukrainien de l'Économie refuse pour l’heure à tout commentaire.

Mais il est sûr que cela représente un "défi pour l’accord" conclu avec l’administration Trump, affirme Vladimir Ezhikov, directeur de Critical Metals Corp, une société américaine qui détenait par le passé une licence d'exploitation du gisement de Shevchenko.

Accord en péril?

Or Moscou en contrôle déjà beaucoup. À l'été 2022, soit quelques mois seulement après le début de l’invasion, la Russie contrôlait déjà près d'un cinquième des réserves de lithium et de terres rares de l'Ukraine. Valeur totale des gisements: estimée entre 3.000 et 11.000 milliards de dollars.

La semaine dernière, le gouvernement ukrainien a autorisé les premières étapes de l'ouverture du gisement de Dobra, un important gisement de lithium. Kiev veut attirer les capitaux étrangers mais elle a de moins en moins de ressources à offrir.

Alors l’accord pourrait-il être mis en péril? Il fait depuis le début face à plusieurs obstacles comme des procédures d'octroi de licences complexes et des études géologiques pour certaines obsolètes qui rendent difficile l’estimation de la véritable valeur des terres.

Mais c’est bien la progression russe qui représente la plus grande menace. Elle pourrait compromettre la stratégie économique du gouvernement Zelensky. Même si des licences étaient attribuées, l'exploitation des ressources reste hypothétique - les mines se trouvant, pour certaines, proches des lignes de front.

Lors des négociations, Kiev avait tenté de conditionner l’accès aux mines à un soutien militaire américain accru, arguant qu'il était dans l'intérêt des États-Unis. Mais Washington a systématiquement refusé.

Donald Trump pourrait-il décider d'accroître son soutien pour protéger ces ressources? Le temps presse. L’armée russe se rapproche désormais de nouveaux gisements de titane et d’autres matières premières comme l’uranium.

Caroline Loyer