"Les plus hauts droits de douane au monde": face à l'ultimatum américain, l'Inde espère encore trouver un accord avec Donald Trump

Le président américain Donald Trump rencontre le Premier ministre indien Narendra Modi à la Maison Blanche, à Washington DC, aux États-Unis, le 13 février 2025 (photo d'illustration). - INDIAN PRESS INFORMATION BUREAU / ANADOLU / Anadolu via AFP
Inquiets, mais pas désespérés: à l'approche de la date butoir fixée par Donald Trump, industriels et exportateurs indiens veulent croire à la possibilité d'un accord qui éviterait la hausse des droits de douanes brandie par les États-Unis. Depuis des semaines, les tractations vont bon train entre les deux pays pour parachever un traité commercial avant le 9 juillet. À défaut, le président américain imposera une taxe de 26% sur tous les produits "made in India" entrant sur son sol. L'Inde, répète-t-il, "est l'un des pays qui a les plus hauts droits de douane au monde".
Les deux pays discutent donc d'arrache-pied pour éviter cette perspective. Fidèle à sa diplomatie très extravertie, le locataire de la Maison Blanche a suggéré la semaine dernière l'imminence d'un "très gros" accord, qui ne verrait rien moins que la "suppression totale des barrières douanières" entre les deux pays. "Un accord me comblerait", a confié de son côté lundi la ministre indienne des Finances, Nirmala Sitharaman, au Financial Express. "Un grand, un bon, un bel accord. Pourquoi pas?", a-t-elle ajouté en paraphrasant Donald Trump.
Bijoux, crevettes et pierres précieuses
Pour l'Inde, l'enjeu est de taille. Si le pays le plus peuplé de la planète - 1,4 milliard d'habitants - n'est pas encore l'usine du monde qui remplacera la Chine, il a affiché en 2024 un excédent commercial de 45,7 milliards de dollars qui nourrit l'ire de Donald Trump. Parmi ses principales marchandises exportées aux États-Unis, l'électronique, les pierres précieuses, la bijouterie ou les crevettes. La pharmacie a été épargnée par les menaces américaines.
À la veille de l'échéance, le directeur général de la Fédération des entreprises exportatrices indiennes, Ajay Sahai, confie être "optimiste" sur les chances d'un accord, "au moins du point de vue du commerce". Son pays s'est "engagé de façon constructive" dans les discussions, juge-t-il, et la "situation très fluide" laisse ouverte la possibilité d'un report des sanctions. "Les échos dont je dispose suggèrent une issue positive, je suis confiant", assure Ajay Sahai.
Son homologue de l'Association indienne des exportateurs de fruits de mer, K.N. Raghavan, affiche la même espérance. Après "une certaine anxiété", il confesse désormais "plus de raisons d'espérer". "Une solution semble en vue", résume-t-il. Ces derniers jours, la presse indienne bruissait de confidences anonymes anticipant la finalisation d'un accord, malgré des difficultés sur les produits agricoles et les pièces détachées automobiles.
La ministre indienne des Finances a rappelé toutefois lundi qu'"agriculture et produits laitiers" constituaient pour son pays "de grosses lignes rouges". Et les exigences de l'Inde restent insatisfaites en matière de taxes sur l'acier et l'aluminium, et sur l'ouverture du marché américain à son textile ou ses chaussures, complète auprès de l'AFP une source au ministère du Commerce. Dans ces conditions, les observateurs penchent plutôt pour la conclusion, d'ici à la semaine prochaine, d'un texte moins ambitieux, en forme de trêve.
"Surmonter des droits de douane de 10%"
"L'issue la plus probable est un pacte commercial limité", a récemment avancé Ajay Srivastava, du centre de réflexion Global Trade Research Initiative, installé à New Delhi. Dans ce cadre-là, précise-t-il, l'Inde pourrait baisser ses barrières douanières sur certains produits industriels et offrir un accès réduit aux produits agricoles américains, en échange d'une baisse du taux dont Donald Trump la menace. Toutefois, a averti Ajay Srivastava, les discussions pourraient "s'interrompre" si Washington "continue à insister sur l'ouverture de pans entiers du secteur agricole de l'Inde ou sur l'entrée des organismes génétiquement modifiés" (OGM).
Les exportateurs de fruits de mer veulent croire, eux, que leur gouvernement ne sacrifiera pas leurs intérêts dans la dernière ligne droite des tractations. "Nous pensons pouvoir surmonter des droits de douane de 10%", explique K.N. Raghavan. "Mais si ce taux passe à 25 voire 30%, nos clients américains iront s'approvisionner ailleurs et moins cher."