Conférence de Munich: le moment de vérité pour Kiev et l'UE?

Le rendez-vous est aussi important pour l’Ukraine que pour les Européens. La conférence de Munich sur la sécurité débute aujourd’hui. Kiev espère certainement un peu plus de clarté de la part de l’administration américaine. Donald Trump a multiplié les déclarations sur l’Ukraine ces derniers jours. Après l’annonce de son coup de fil à Vladimir Poutine, il affirme désormais que le Kremlin sera représenté à Munich:
"La Russie sera là avec notre peuple. L'Ukraine est également invitée, d'ailleurs, je ne sais pas exactement qui sera là, d'aucun pays, mais des personnalités de haut niveau de Russie, d'Ukraine et des États-Unis".
Sauf que Kiev "n’envisage pas de discuter" avec Moscou. Du moins pas à ce stade. Volodymyr Zelensky pose ses conditions. Il veut d’abord une conversation avec les États-Unis et "l'élaboration d'un plan pour arrêter Poutine". Ensuite seulement accepterait-il de négocier.
Le président ukrainien semble plus que jamais sur ses gardes depuis l’annonce de l’appel entre l’allié et l’ennemi numéro 1. Washington a déjà balayé deux conditions majeures de Kiev pour convenir d’un cessez-le-feu. Le retour de l’Ukraine aux frontières de 2014, c’est-à-dire avant l’annexion de la Crimée et une adhésion à l’Otan.
Pour John Bolton conseillé à la Sécurité nationale de Donald Trump lors de son premier mandat:
"En faisant ces concessions et d'autres avant même le début des négociations, Trump a déjà capitulé face à Poutine".
Selon lui, le chef du Kremlin veut discuter seul à seul avec l’administration américaine, car il sait qu’il a plus à y gagner.
Faire front commun
Dans ce contexte, Volodymir Zelensky compte d’autant plus sur un soutien fort des Européens. Les deux parties sont unies par un désagréable sentiment d’être mises de côté. Et elles ne veulent pas l’être plus longtemps. Pas questions que des négociations se déroulent dans leur dos.
"L'Europe doit participer à toute discussion sérieuse pour une paix véritable et durable", affirme un conseiller de la présidence ukrainienne.
La fébrilité de l’UE est palpable. "Nous devons tous rester collectivement vigilants", déclare Emmanuel Macron dans les colonnes du Financial Times. Le chef de l’État redoute que Trump ne "cède tout" à la Russie.
Kaja Kallas, la cheffe de la diplomatie de l'UE, va jusqu’à faire un parallèle entre la situation actuelle et 1938, quand les accords de Munich avaient abouti à l'annexion d'une partie de la Tchécoslovaquie par l'Allemagne d’Hitler.
Un "revers embarrassant"
Les Européens font front mais seront-il entendus? S’ils ont envie d’y croire, rien ne le garantit. Politico relève que J.D. Vance ne rencontrera pas le chancelier allemand à Munich.
Certains y voient l’illustration d’un manque de considération des Etats-Unis à l’égard du bloc. Olaf Scholz, en difficulté politique, n’en demeure pas moins le dirigeant du pays hôte de la conférence.
Le vice-présent américain rencontrera Friedrich Merz, l’opposant de centre-droit d’Olaf Scholz qui est en passe de lui succéder.
Un haut diplomate d'Europe de l'Est, sous couvert d'anonymat, juge le "revers embarrassant" mais pour lui cela "montre simplement que l'Allemagne n'est pas prise au sérieux en tant qu'acteur majeur en Europe par l'équipe Trump".
L’Union européenne dans son entièreté est-elle aujourd’hui prise au sérieux par l’administration américaine? Cette conférence et les jours à venir nous le dirons.