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Chute de Bachar Al-Assad: et après?

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Bachar Al-Assad est actuellement réfugié en Russie. Sa chute a provoqué un séisme géopolitique plongeant la région dans l'incertitude.

La fin d’une ère. Un quart de siècle que Bachar Al-Assad dirigeait la Syrie d’une main de fer, comme son père avant lui. Alors qu’il avait résisté à des années de guerre civile, le régime a finalement chuté en quelques jours.

Pour envisager les conséquences dans la région, il faut d’abord voir ce qui va se passer en Syrie. Le pays est fragmenté. Il est composé de plusieurs minorités et de factions rebelles dont Hayat Tahrir Al-Cham (HTS) qui a fait tomber Damas.

Le groupe a rompu ses liens avec al-Qaïda en 2016. À sa tête, Abou Mohammed Al-Jolani. L’homme de 42 ans se présente un modéré. Il a mis en place une administration civile et multiplié les gestes envers les chrétiens dans la province d’Idleb, qu’il contrôle depuis deux ans. La charia y est appliquée mais la pratique d’autres cultes est autorisée. Al-Jolani a dissous la police islamique, les femmes peuvent conduire, aller à l’école, l’université.

On le dit particulièrement pragmatique. Jusqu’à présent, il s’est montré rassurant auprès des Syriens et la communauté internationale. Le chef de HTS a ouvert des canaux avec des factions kurde.

Il sait qu’il ne pourra pas gouverner seul et a donc intérêt à se montrer ouvert au dialogue. On se souvient qu’à leur arrivée au pouvoir les talibans avaient aussi rassuré, affirmant qu’il ne fallait pas s’inquiéter de trop pour les droits des femmes. On sait ce qui s’est passé depuis.

Notons que HTS compte aussi dans ses rangs des radicaux avec qui Abou Mohammed Al-Jolani va devoir composer.

Eviter le chaos

Toujours est-il que les Etats-Unis se disent prêt à travailler avec lui. L’objectif est d’éviter que le pays ne sombre dans le chaos comme la Libye après la chute de Kadhafi.

HTS est considéré comme un groupe terroriste par Washington et plusieurs pays occidentaux mais c’est bien lui qui aujourd’hui a le pouvoir en Syrie. Joe Biden offre de soutenir la mise en place d’une transition pacifique tout en restant prudent:

"Nous resterons vigilants. Il ne faut pas se leurrer, certains des groupes rebelles qui ont renversé Assad ont leur propre triste bilan en matière de terrorisme et de violations des droits humains."

Vigilance aussi de la part des pays voisins de la Syrie. La chute de Bachar Al-Assad, c’est un nouveau coup dur pour Téhéran. La Syrie c’était la cour-arrière du Hezbollah. Israël se retrouve de fait dans une position stratégique plus favorable. Benjamin Netanyahu a tout de suite ordonné à son armée de "prendre le contrôle" de la zone tampon du Golan, à la frontière avec la Syrie.

L’Iran, soutien indéfectible de Bachar Al-Assad, est aujourd’hui en si mauvaise posture qu’il tend la main aux nouvelles autorités disant espérer "la poursuite d’une relation amicale". Mais la diplomatie iranienne met aussi en garde en indiquant que Téhéran "adoptera une approche et des positions appropriées" en fonction "de l’évolution de la situation". Quelle sera l'attitude de la Russie face au nouveau pouvoir syrien? Les jours à venir nous le diront. Moscou, qui cette fois, n’est pas parvenu à sauver son allié.

Caroline Loyer