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Guerre en Ukraine: pourquoi les diamants russes sont dans le viseurs du G7

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En ciblant le commerce des diamants russes, les occidentaux veulent priver la Russie d'une manne de 4,7 milliards de dollars qui avait déjà commencé à se tarir depuis le début de l'invasion de l'Ukraine.

Un remake inversé des grands classiques de James Bond. Avec les nouvelles sanctions décrétées par l'Union Européenne et le G7, les occidentaux n'envoient pas de "bon baisers à la Russie" et jugent que "les diamants ne sont pas éternels". C'est d'ailleurs en ces termes que le président du Conseil européen Charles Michel a annoncé en ironisant les nouvelles sanctions européennes au sommet du G7 à Hiroshima, au Japon.

Après le Royaume-Uni, l'UE devrait en effet limiter le commerce de nombreux produits miniers russes, comme les diamants. Ces derniers étaient jusqu'alors épargnés par le train de sanctions.

La Belgique a levé ses réticences

La Belgique, pour qui le commerce de la pierre précieuse s'élève à 12 milliards d'euros par an, s'opposait en effet à des sanctions sur le diamant. La fédération du secteur, l'Antwerp World Diamond Centre, estimait qu'un tel embargo priverait le secteur de 30% de son activité. Mais les députés belges ont levé les réticences fin avril en votant l'autorisation d'interdire les importations de diamants russes.

Quand elles seront effectives, ces sanctions pourraient priver la Russie d'une manne financière conséquente. En 2021 elle aurait exporté pour 4,7 milliards de dollars de diamants, ce qui en fait le 8ème pays exportateur au monde. Le diamant représente environ 1% de la valeur des exportations russes, ce qui en fait la 13ème plus importante ressource derrière les produits pétroliers, le gaz, l'or ou encore l'aluminium.

1 milliard d'euro pour financer la guerre

Fondée en 1993 au moment de la privatisation de l'extraction minière par l'ancien président Elstine, la société russe Alrosa est aujourd'hui la plus importante productrice au monde de diamants devant le célèbre De Beers.

Elle était jusqu'à cette semaine dirigée par Sergey Ivanov, un proche de Vladimir Poutine ciblé par les sanctions occidentales, qui vient d'être remplacé au poste de PDG par Pavel Marynichev, un haut fonctionnaire nommé par le Kremlin qui détient 33% du capital d'Alrosa.

Le groupe basé en Iakoutie, en Sibérie orientale, a enregistré en 2021 un bénéfice net de 91,3 milliards de roubles (1,05 milliard d'euros au cours actuel). Une somme qui serait utilisé, accusent les occidentaux, pour financer l'effort de guerre russe en Ukraine.

L'Inde victime collatérale des sanctions

Les dirigeants des pays du G7 réunis à Hiroshima réfléchissent à la manière d'étouffer collectivement le commerce des diamants russes en recourant notamment à des méthodes de traçage de haute technologie. Le Royaume-Uni est allé plus loin de son côté en annonçant qu'il interdirait purement et simplement les diamants russes.

Une perspective qui risque par ricochet d'affaiblir l'Inde et en particulier le port de Surate, dans l'Etat indien du Gujarat, la plateforme des diamantaires déjà ébranlée par les coupes dans l'approvisionnement et la chute de la demande. Environ 90% des diamants du monde sont taillés et polis dans ce port de l'État le plus à l'ouest de l'Inde.

Au total, près d'un million de personnes, négociants et fournisseurs inclus, travaillent dans cette industrie du Gujurat qui achète un tiers de ses diamants bruts aux géants miniers russes, dont Alrosa.

Mais après l'invasion de l'Ukraine, l'offre s'est réduite sous l'effet des sanctions occidentales ayant exclu la Russie du système bancaire international Swift.

En parallèle, les exportations indiennes de diamants taillés et polis se sont effondrées, les entreprises américaines et européennes refusant déjà d'acheter des diamants provenant de Russie.

Frédéric Bianchi
https://twitter.com/FredericBianchi Frédéric Bianchi Journaliste BFM Éco