Explosion des coûts, refus d'assurer... Le dérèglement climatique va chambouler le monde de l'assurance

Ce vendredi 3 novembre, les habitants de Wimille (Pas-de-Calais) avaient les pieds sous l'eau après le passage de la tempête Ciaran. - BFMTV
Après le passage des deux tempêtes Ciaran et Domingos, l’heure est désormais au bilan. Près de 300.000 sinistres ont ainsi recensés pour une facture comprise entre 650 et 750 millions d’euros.
Un montant élevé mais loin des dégâts causés par les grandes tempêtes de ces dernières années comme Xynthia en 2010 (1,5 milliard d'euros), Klauss en 2009 (1,7 milliard) sans même parler du désastre de Lothar et Martin en 1999 et sa facture de 7 milliards (en euros constants).
Mais les sinistres des récentes tempêtes vont tout de même venir gonfler une facture qui ne cesse de s'alourdir depuis plusieurs années.
Un coût des sinistres multiplié par 2 dans les 30 prochaines années
Car le gros des sinistres ne sont pas ces tempêtes impressionnantes. C’est la sècheresse qui fait bouger les sols argileux fissurant les habitations ou encore la grêle et les chaleurs extrêmes qui détruisent les récoltes depuis plusieurs années.
En quatre décennies la facture des coûts liés aux aléas climatiques est en nette augmentation.

De 1,5 milliard d'euros par an (en tenant compte de l'inflation) à la fin des années 1980, elle n'a depuis cessé d'enfler jusqu'à atteindre 3,6 milliards d'euros durant la décennie précédente. Sans même prendre en compte l'annus horribilis passée marquée par les incendies et sa facture record de 10,6 milliards d'euros.
Et pourtant ce ne serait que le début. Selon la Fédération des assurances, le coût global de ces sinistres liés au dérèglement climatique va être multiplié par deux dans les 30 prochaines années.

Une surtaxe passée de 5,5 à 12%
Ce qui va fatalement se traduire par des hausses de primes d’assurance. Ce qui a d’ailleurs déjà commencé avec des hausses moyennes de 5% en 2023 et une augmentation de l'ordre de 6% attendue pour l'année prochaine. Car il faut le rappeler, le système français est un des plus protecteurs au monde avec l’état de catastrophe naturelle.
Qui dit protecteur, dit coûteux. Pour financer ce système, les assurés paient ainsi une surtaxe comprise dans leur prime. Initialement de 5,5% pour l'assurance habitation, elle n'a cessé de gonfler ces dernières années pour atteindre 12%. Et en 2025, le gouvernement souhaiterait la faire passer à 22% (les assureurs plaident pour 18%).
Dans tous les cas, il y aura bien une augmentation. Car cette "caisse" des catastrophes naturelles qui accuse un déficit de 1,8 milliard d'euros pour l'année 2022 sera mise à rude épreuve dans les décennies à venir.
Mais un risque plus grave plane sur ce système de protection: le refus des assureurs de protéger les biens à l'avenir. Ce qui est déjà le cas dans certains territoires où le risque de sinistre est élevé. Zones côtières, en proie aux sècheresses, bâties sur des sols argileux... Les compagnies ne refusent pas de clients mais proposent des conditions délibérément décourageantes. Des primes presque doublées pour les nouveaux assurés, des procédures à rallonge pour prouver que telle fissure ou tel orage de grêle est bien lié au dérèglement climatique, des remboursements qui mettent des années à être effectués... De quoi limiter le risque en décourageant les assurés. Avec les hausses de coûts des années à venir, ces "déserts assurantiels" pourraient se multiplier.
