Un même nom pour deux entreprises: un patron suisse accuse la SNCF de lui porter préjudice

Logo de la SNCF (image d'illustration) - Sameer Al-DOUMY / AFP
C'est un peu l'histoire du pot de fer contre le pot de terre. Mais en pire.
En novembre dernier, le Groupe SNCF annonce que suite au plan de discontinuité imposé par la Commission européenne, Fret SNCF va disparaître au 1er janvier prochain pour renaître sous la forme de deux sociétés distinctes: Hexafret pour le transport de marchandises et Technis pour la maintenance des locomotives.
Petit problème, non seulement cette marque existe déjà et est déposée au niveau international et en France depuis août 2022, mais en plus, ce Technis fournit des solutions... à la SNCF.
Technis est une entreprise fondée il y a huit ans en Suisse, sa filiale française est créée en 2018. Elle propose des solutions technologiques pour la digitalisation des espaces physiques et la gestion des flux, notamment pour les Jeux olympiques de Paris l'été dernier.
Stupéfaction
Pour la SNCF, elle fournit des solutions de taux d'occupation pour mieux dimensionner ses bureaux ou pour la gestion des flux de personnes dans ses gares.
Quand son PDG et fondateur apprend début novembre que la compagnie ferroviaire a choisi le nom de Technis pour cette nouvelle entité, c'est la stupéfaction.
"C'est sûr que je ne l'avais pas vu venir", explique Wiktor Bourée à BFM Business. "Je commence à recevoir des alertes Google avec le mot clé Technis qui ne concernent pas mon entreprise. Puis des clients me contactent, on n'a pas compris".
Très vite, décision est prise de réagir en mobilisant des avocats. "On s'est dit qu'on avait peut-être raté un truc. Mais non, notre marque est bien déposée à l'international. Et on s'est aperçu que le Technis de la SNCF était déposé à l'Inpi (l'organisme officiel de dépôt des marques, NDLR) dans la même classe que la nôtre, celle des technologies innovantes. Nos conseils nous disent 'il y a un vrai problème', et ont donc transmis une mise en demeure à la SNCF", poursuit le dirigeant.
Pour Wiktor Bourée, l'incompréhension est d'autant plus forte que les deux entreprises travaillent ensemble. "La SNCF nous répond assez rapidement, on a des discussions, mais au bout d'un mois, il n'y pas le début d'une solution, rien d'acceptable ou de concret alors qu'ils savent bien qu'il y a un problème et ils nous connaissent!".
Et de s'interroger sur le processus qui a mené le groupe à choisir ce nom... D'autant plus que selon les plaignants, la dénomination sociale Technis a été déposée le 20 novembre, alors que les deux entreprises échangeaient sur ce problème. Une modification du nom par la SNCF était alors toujours possible.
Bruit négatif
"On peut comprendre que les circuits de décision soient longs mais il n'y a aucune piste de conciliation, à part nous dire que c'est embêtant. En réalité, ils cherchent à gagner du temps et nous proposent rien. Conséquence, on est dans le flou, tout comme nos clients", ajoute Arnaud Deplanque, directeur financier et dg France.
Pour Technis, cette situation ne peut pas durer même si les activités de la future entité SNCF reste assez éloignée de la sienne. Par ailleurs, des dizaines de "Technis" existent dans tout un tas de domaines.
"On doit protéger notre marque, on ne lâchera rien. Il y a des précédents de marques similaires, mais ici, le cas est assez unique, car on prend le nom d'un de ses fournisseurs. C'est cette proximité qui nous gêne", souligne le PDG.
"Les dommages se font déjà sentir: notre référencement sur Google est en baisse et quand on veut communiquer il n'y a plus de retombées. On passe notre temps à se justifier auprès de nos clients, on est associé à du bruit négatif lié à l'actualité de Fret SNCF. Un député suisse m'a même interpellé sur cette question. L'impact est déjà là et il sera pire dans les prochains mois" quand le Technis de la SNCF sera opérationnel, regrette Wiktor Bourée.
Interrogé, SNCF Fret communique a minima. "En effet, nous avons bien connaissance de cette marque antérieure que vous évoquez. À ce stade, des échanges sont en cours entre notre conseil et celui de cette société et nous ne pouvons malheureusement pas en dire plus", indique un porte-parole.