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Les transports publics toujours affectés après deux ans de Covid

Des voyageurs tentent d'entrer dans un bus bondé à la Gare de Montparnasse, à Paris le 18 février 2022

Des voyageurs tentent d'entrer dans un bus bondé à la Gare de Montparnasse, à Paris le 18 février 2022 - Ludovic MARIN © 2019 AFP

Les chiffres de fréquentation des transports urbains ont suivi les confinements et relâchements des règles sanitaires, avec des hauts et des bas. On est actuellement à 80% du niveau d'avant la crise en Ile-de-France, aux environ de 85% en région.

Les transports publics n'ont pas retrouvé tous leurs passagers deux ans après le début de la pandémie, et s'inquiètent désormais aussi des conséquences de la crise énergétique sur leurs finances fragilisées par le Covid-19.

"On a bien remonté, mais on n'a pas retrouvé les niveaux d'avant-Covid", résume Marie-Ange Debon, patronne de l'opérateur Keolis (groupe SNCF).

Les chiffres de fréquentation des transports urbains ont suivi les confinements et relâchements des règles sanitaires, avec des hauts et des bas. On est actuellement à 80% du niveau d'avant la crise en Ile-de-France, aux environ de 85% en région.

Changements de comportement

"On n'est pas revenus à la normale, et il y a probablement un talon dur de 10% de personnes qui ont changé de comportement, et ne sont pas sûres de revenir à court terme", observe Thierry Mallet, le PDG de l'opérateur Transdev.

Ces personnes télétravaillent, se déplacent moins, ont pris leur voiture ou enfourché un vélo.

"Quelques réseaux ont beaucoup plus remonté que d'autres", poursuit-il : ceux sur lesquels "il y a beaucoup plus de captifs (les usagers n'ayant pas d'alternative, NDLR) et beaucoup moins de télétravail."

Celui de Dunkerque fait même mieux qu'avant la crise, remarque-t-il. Il faut dire qu'il est gratuit, et que l'offre venait d'être nettement améliorée.

Yo-yo à la SNCF

Même yo-yo de la fréquentation à la SNCF: elle a perdu 42% de ses passagers en 2020, en a repris 23% en 2021, et était bien repartie jusqu'à ce que la vague Omicron ne fasse à nouveau fuir les passagers en janvier.

"Depuis mi-février, nous constatons une reprise de la mobilité et de la fréquentation dans nos trains", des TGV aux TER, indique Christophe Fanichet, PDG de SNCF Voyageurs "Neuf Français sur dix ont repris les trains du quotidien, et neuf sur dix sont revenus pour les loisirs", dit-il. "En revanche, les professionnels et les abonnés ne sont pas complètement revenus."

En cause: le télétravail et les vidéoconférences. "Les +pros+, on en avait perdu un tiers l'an dernier, et aujourd'hui il y en a un sur deux qui est parti avec la crise Omicron", déplore M. Fanichet.

Autre changement d'habitude des voyageurs qui perturbe les transporteurs: on parle désormais de jours de pointe, le mardi étant le plus chargé de la semaine, tandis que le week-end s'allonge.

"Pas cher"

Avec aussi une retombée positive, pointe Mme Debon chez Keolis: "le Covid a été l'occasion d'accélérer sur le numérique. Une accélération incroyable!".

A quand le retour à la normale ? Le débat reste ouvert.

En région parisienne par exemple, l'autorité régionale Ile-de-France Mobilités prévoit de remonter à 90% à la fin de l'année et à 100% en 2024.

"Notre modélisation donne un point de sortie qui est plutôt à 90% vers 2023/24", avance la PDG de la RATP Catherine Guillouard. On retrouve les 10% perdus évoqués par Thierry Mallet, dont 6 à 7% ne se déplaceront pas parce qu'ils télétravaillent.

Le développement du réseau --avec notamment en Ile-de-France des prolongements du métro-- et la croissance devraient selon elle faire repasser ensuite la fréquentation au-delà de ses niveaux records d'avant la pandémie. En attendant le retour des touristes...

Recettes asséchées

"La bonne réponse pour faire revenir les gens, ce sera certainement de trouver une façon de redéployer l'offre" pour mieux desservir les périphéries, suggère Thierry Mallet.

Reste que la pandémie a appauvri le secteur, asséchant les recettes des collectivités locales. A Lyon par exemple, le syndicat des transports Sytral estime le manque à gagner sur sa billetterie autour de 850 millions d'euros sur la décennie. En Ile-de-France, le trou dans les caisses dépasse les 3 milliards rien que sur la période 2020-2022.

Et la guerre en Ukraine commence à sérieusement préoccuper la profession, qui doit remplir les réservoirs de ses bus.

Le conflit "a fait totalement exploser le prix du gaz naturel, multiplié par 20 depuis décembre", s'inquiète M. Mallet, en évoquant un carburant qui avait la cote ces derniers temps.

Mais cette nouvelle crise n'a pour l'instant pas eu d'impact immédiat sur la fréquentation. Et les transports publics ont au moins un atout face à la flambée des prix des carburants : "on n'est pas cher!", clame-t-on chez Ile-de-France Mobilités.

OC avec AFP