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Les avions émettent-ils vraiment de moins en moins de CO2?

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La modernisation des flottes porte ses fruits. En juillet, les émissions moyennes de CO2 par passager au kilomètre ont atteint leur plus bas niveau historique. Et la compagnie française French Bee est désormais considérée comme la plus performante au monde.

Selon le dernier rapport du cabinet IBA cité par Les Echos la moyenne mondiale des émissions de CO2 par mile et par passager a baissé de presque 6% depuis 2018 pour atteindre son plus bas niveau historique le mois dernier: 141,9 grammes, soit quasiment 6% de moins qu’en 2018.

Pour faciliter la comparaison avec d’autres modes de transport, cela signifie que dans un avion totalement rempli, un passager émet aujourd’hui en moyenne 88,7 grammes par kilomètre parcouru, soit autant que deux personnes voyageant dans un puissant SUV allemand (hors modèle électrique ou hybride).

Des avions plus performants et plus de monde dedans

L’explication tient en mot: modernisation. Les compagnies aériennes ont continué à renouveler leur flotte, en dépit de la crise, et mis au rebut les avions les plus énergivores. Elles ont aussi investi dans les modèles les plus légers, équipés des moteurs les plus performants.

Mais cette baisse des émissions moyennes par passager tient aussi à l’aménagement intérieur de leurs avions. Dans la majorité des cas, les compagnies aériennes l’ont repensé pour transporter davantage de passagers. Or, c’est mathématique, plus vous mettez de monde dans un avion, plus les émissions de CO2 par passagers se réduisent.

French Bee, champion du monde

A ce petit jeu, une compagnie excelle: la low cost long courrier French Bee. Selon IBA, elle est même aujourd'hui la plus performante au monde en termes d'émissions de CO2 par passager, grâce à une flotte composée uniquement de deux modèles très récents d’Airbus A350 dans lesquels elle fait voyager plus de 400 passagers.

Dans sa version la plus longue (l'A350-1000) elle peut même transporter 479 personnes. Avec cet avion, ses émissions moyennes par passagers sont inférieures à 57 grammes par passager. Mais il n’y a que deux classes (Eco et Premium). Et c’est évidemment cette "densification" comme on dit dans le jargon aérien qui lui permet de faire la différence avec ses concurrents.

Emirates fait moins bien qu'Air France

Cela dit faire voyager près de 500 passagers dans le même avion ne suffit pas à se classer parmi les compagnies qui émettent le moins de CO2. Emirates, dont la flotte est très majoritairement composée d’A380, affichent par exemple des performances inférieures à celle d’Air France, qui, elle s’est séparé en 2020 de ses derniers Super Jumbo.

De conception ancienne, même les plus récents des A380 d’Emirates ne peuvent pas faire le poids avec les autres avions long courrier de dernière génération. Et même si, un jour, Airbus accédait à la demande du PDG de la compagnie compagnie dubaïote de produire une version "écologique" de son A380, elle ne parviendrait pas à afficher les mêmes performances que French Bee. Car les passagers voyageant en first dans ses super Jumbo sont installés dans une "suite" avec accès à une douche. Quant à la classe affaire, dotée de sièges-lits, elle occupe une grande partie de l’avion.

Réduire les émissions par avion ne signifie pas réduire les émissions du secteur

Les avions low cost de French Bee sont-ils pour autant la panacée? Dans la mesure où ils permettent de se déplacer à l’autre bout de la terre pour un prix très attractif, ils sont une incitation à voyager davantage. Or, si le nombre de passagers transportés se remet à augmenter au même rythme qu’avant la crise, la modernisation de la flotte des compagnies ne permettra pas de réduire les émissions de CO2 des voyages en avion.

Pierre Kupferman
https://twitter.com/PierreKupferman Pierre Kupferman Rédacteur en chef BFM Éco