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Grèves à la SNCF: les demandes d'augmentations de salaire refont surface

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Si les syndicats mettent en avant le démantèlement de Fret SNCF, les négociations annuelles qui débutent ce mercredi risquent bien de peser dans le choix de faire grève ou pas.

Comme à chaque fin d'année, le spectre de la menace d'une grève bloquante plane à la SNCF. Deux préavis ont été déposés par les syndicats.

Le premier mouvement aura lieu ce jeudi afin de dénoncer à nouveau le démantèlement de Fret SNCF imposé par la Commission européenne et l'ouverture à la concurrence, notamment dans les TER où il y aura des transferts de personnels.

Mais la CGT-Cheminots, l'Unsa-Ferroviaire, Sud-Rail et la CFDT-Cheminots ont prévenu que cette journée de grève est "un ultimatum" avant "un mouvement de grève plus long et plus fort en décembre" si le gouvernement et la SNCF ne répondent pas à leurs revendications.

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Si les syndicats mettent en avant le démantèlement de Fret SNCF, les NAO (négociations annuelles obligatoires) qui débutent ce mercredi avec la direction risquent bien de peser dans le choix de faire grève ou pas.

Le ministre "dubitatif"

D'ailleurs, la direction et le gouvernement sont lucides sur la question. "La SNCF va mieux et elle le rend aux salariés. Je ne comprendrai pas que les Français soient bloqués", souligne d'ailleurs ce mardi, François Durovray, le ministre délégué aux Transports qui se dit "dubitatif" sur ces mouvements.

"Les Français ne comprendraient pas une grève longue et dure en décembre pour des questions de salaire, ils ne comprendraient pas de ne pas pouvoir rejoindre leur famille pour fêter Noël...", lançait de son côté Jean-Pierre Farandou, patron de la SNCF, ce samedi.

La direction a déjà prévenu qu'elle serait moins généreuse que lors des précédentes années, mais les syndicats ne l'entendent pas de cette oreille.

"Nos dirigeants vont nous expliquer que les résultats du groupe ne sont pas aussi bons que prévu, que les bénéfices ne sont pas au rendez-vous et qu’il n’y a plus d’argent à distribuer aux cheminots. C’est une distorsion grossière de la réalité", indique Sud-Rail.

L'organisation syndicale exige ainsi une augmentation de 400 euros pour tous les cheminots, une augmentation de toutes les primes de travail (qui rappelons-le constituent une part importante du salaire, le salaire de base étant assez bas), une revalorisation des primes de nuit, des dimanches et des jours fériés, et un 13e mois calculé sur le salaire global et non pas sur le salaire de base.

Sud-Rail veut 400 euros d'augmentation

Du côté de la CGT-Cheminots, on se veut également "offensifs" sur cette question. Le syndicat réclame également la revalorisation des primes de 300 euros en moyenne.

"Lors du conflit de fin d’année 2022, la direction sous la pression de la mobilisation a répondu partiellement à nos exigences. La direction s’est engagée à traiter à nouveau le sujet lors des NAO 2024 et 2025. Aussi, la CGT a rappelé à la direction ses engagements lors de l’audience du 3 octobre 2024. Pour la CGT, le contrat doit être strictement respecté", explique l'organisation.

Lors de cette première négociation de mercredi, la direction de la SNCF va certainement mettre en avant des bénéfices en 2023 en baisse (1,3 milliard d'euros) malgré une fréquentation en hausse contre 2,4 milliards un an plus tôt.

Surtout, elle mettra en avant les primes ponctuelles et les 17% d'augmentations moyennes consenties entre 2022 et 2024, un chiffre supérieur à l'inflation moyenne sur ces trois années (13%).

L'argument est contesté par les syndicats du fait de la construction particulière des salaires à la SNCF.

Des niveaux d'augmentations contestés

À la SNCF, la rémunération se décompose avec un salaire de base, assez bas, parfois même inférieur au Smic (entre 1.700 et 1.800 euros brut), et une multitude de primes versées en fonction de sa catégorie, de ses missions, de l'organisation du travail: primes de traction, de nuit, du dimanche, de travail, de résidence… Il y en a des dizaines.

Les cheminots dénoncent régulièrement cette construction. D'abord parce que ces primes sont très variables. Un cheminot en arrêt maladie peut ainsi perdre 40% de son salaire du fait de la non-application de ces primes.

Ensuite, certaines de ces primes sont ponctuelles. Ainsi en 2023, lorsque la SNCF annonce une augmentation globale de 4,6% cela inclut plusieurs primes de pouvoir d'achat qui n'ont pas été reconduites en 2024.

Enfin, ces primes ne sont pas prises en compte dans les cotisations retraites et donc dans le calcul des pensions lors de la fin de carrière.

Voilà pourquoi les syndicats exigent la revalorisation de ces primes tandis que Sud y ajoute 400 euros d'augmentation du salaire "en somme uniforme", c'est-à-dire sur le salaire de base.

L'augmentation de la prime de travail est un prérequis pour Sud-Rail, tout comme l'augmentation du salaire de base.

Quelle mobilisation?

"La direction doit reconnaître la technicité de nos métiers en revalorisant les primes de travail pour toutes et tous les cheminots afin de les aligner sur les primes de travail les plus heures et en les incluant dans le traitement afin d'unifier les structures de rémunération des cheminots contractuels et statutaires", écrit-il.

Bref, il faut s'attendre à un nouveau bras de fer. Reste à connaître la mobilisation en interne qui selon différentes sources ne devrait pas être massive.

Un conducteur glisse à BFM Business que pour les cheminots, il est "trop tard" pour Fret SNCF. D'autres estiment que le préavis aurait dû être déposé après la première table ronde des NAO, histoire de voir les propositions de la direction et que les syndicats "se sont tirés une balle dans le pied".

"Si le 11 décembre la grève est suivie, en quatre jours, c'est plié et on aura gagné. Si le 11 décembre la grève n'est pas suivie, en trois jours on aura repris le travail", reconnaît d'ailleurs Fabien Villedieu, secrétaire fédéral de Sud-Rail.

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business