"Des bruits étranges dans le cockpit": un vol Lufthansa se retrouve sans personne aux commandes pendant 10 minutes après le malaise du pilote

Un avion commercial de la compagnie aérienne allemande Lufthansa laisse une traînée de condensation dans le ciel, le 3 avril 2017, au-dessus de la station des Alpes suisses de Verbier - Fabrice COFFRINI © 2019 AFP
Une catastrophe évitée de peu? L'an dernier, le 17 février 2024, un vol Lufthansa entre Séville et Francfort s'est retrouvé sans pilote pendant près de 10 minutes. Le copilote s'était en effet évanoui pendant que le commandant de bord était aux toilettes, révèle l'agence allemande dpa, citant le rapport de la CIAIAC, une commission d'enquête espagnole, équivalent du BEA (Bureau d'enquêtes et d'analyses pour la sécurité de l'aviation civile) en France.
L'appareil, un Airbus A321 qui transportait alors 199 passagers, avec 6 membres d'équipage, a donc volé pendant environ 10 minutes sans pilote. Rien d'inquiétant a priori avec le pilotage automatique activé, mais les circonstances restent assez troublantes.
Un code d'urgence pour entrer dans le cockpit
Inconscient, le copilote aurait quand même manipulé involontairement les commandes, mais l'avion est resté stable, justement grâce au pilotage automatique bien actif.
L'enregistreur audio qui capte les sons dans la cabine "a enregistré des bruits étranges dans le cockpit, compatibles avec une urgence médicale aiguë", a rapporté dpa.
Le commandant de bord a mis un certain temps avant de pouvoir retourner dans la cabine. Il a d'abord saisi le code d'ouverture habituel, qui déclenche une sonnerie dans le cockpit et invite le copilote à déverrouiller la porte. Malgré cette absence de réaction de la seule personne alors présente dans le cockpit, le commandant aurait tenté ce premier code à cinq reprises, tandis qu'une hôtesse tentait de contacter le copilote via un téléphone de bord.
Le pilote aurait donc entré un code d'urgence lui permettant d'accéder à la cabine, même si le copilote aurait finalement pu ouvrir la porte malgré son malaise, juste avant l'ouverture automatique déclenchée par cette procédure. Une fois de retour aux commandes, le commandant a choisi d'atterrir à Madrid, afin que son collègue soit pris en charge dans un hôpital.
Des procédures qui ont changé depuis le crash-suicide de 2015
Si les cockpits sont devenus des coffres-forts depuis les attentats du 11 septembre 2001, le crash d'un appareil de la Germanwings en 2015 provoqué par un copilote suicidaire a en effet changé certaines pratiques.
Si un des pilotes doit se rendre aux toilettes, "ce qui a été demandé initialement c'est qu'un autre membre d'équipage, une hôtesse ou un steward, rentre dans le poste de pilotage pour ne jamais laisser un pilote seul à bord", expliquait récemment à BFMTV Charles Clair, pilote de ligne, à l'occasion des 10 ans du crash de l'A320 de la Germanwings.
Une procédure d'une deuxième personne dans le cockpit visiblement pas respectée lors de ce vol Séville-Francfort, ce qui peut s'expliquer par la diversité des mesures pratiquées et un certain flou pour des raisons de sécurité dans l'aviation civile.
"Les systèmes sont différents selon les appareils et les compagnies aériennes afin de ne pas avoir de norme standard et d'empêcher des terroristes éventuels de savoir comment cela marche d'une compagnie à l'autre et d'un type d'avion à un autre", expliquait ainsi un industriel du secteur aéronautique à l'AFP en 2015.