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Corsica Ferries: l'Etat fait un geste financier envers la Corse

Un navire de la compagnie maritime Corsica Ferries dans le port de Toulon (Var) le 5 janvier 2021.

Un navire de la compagnie maritime Corsica Ferries dans le port de Toulon (Var) le 5 janvier 2021. - NICOLAS TUCAT / AFP / POOL

Le gouvernement va mettre 50 millions d'euros sur la table pour aider la Collectivité de Corse à payer sa condamnation par la justice dans son conflit avec la compagnie maritime Corsica Ferries.

En promettant 50 millions d'euros à la Corse jeudi pour l'aider à payer à la compagnie maritime Corsica Ferries une condamnation judiciaire de 86 millions, le gouvernement fait un geste aux allures de soupape dans ses relations tendues avec l'exécutif insulaire. Le gouvernement a ainsi décidé de déposer un amendement au projet de budget 2022 permettant d'abonder l'enveloppe destinée à la Collectivité de Corse (CDC) "pour faire face aux conséquences de ce contentieux" dont le total, avec les intérêts, s'élève à 94 millions d'euros, a expliqué jeudi à l'AFP une source gouvernementale.

"C'est une avancée très significative" et "une contribution importante puisque, sur le principe, ils acceptent de prendre en charge (...) près de 60% de l'amende principale", s'est félicité auprès de l'AFP le président autonomiste Gilles Simeoni, à la tête de la Collectivité.

Il a néanmoins précisé être "encore en discussion sur certains points techniques", notamment sur "les modalités budgétaires d'utilisation de cette somme". Ce geste gouvernemental offre une pause dans le bras de fer qu'avait décidé d'engager Gilles Simeoni en refusant de payer la somme fixée fin septembre par le Conseil d'Etat en réparation du préjudice de la Corsica Ferries lié au "subventionnement illégal" de sa concurrente, l'ex-Société nationale Corse Méditerranée (SNCM) entre 2007 et 2013.

Rapport de force

Estimant que la "responsabilité politique et juridique" de l'Etat était "totale" dans l'attribution d'une aide à l'ex-SNCM, dans le cadre d'une délégation pour service public octroyée par la Collectivité territoriale de Corse (CTC), Gilles Simeoni avait expliqué fin octobre vouloir faire participer le gouvernement au paiement de cette amende. "L'Etat s'est abstenu d'exercer tout contrôle de légalité sur la convention litigieuse 2007-2013, et ne l'a pas notifiée à la Commission européenne comme il en avait l'obligation, ce qui démontre une intention de rétention", avait-il précisé à l'AFP.

Cette subvention avait été attaquée par Corsica Ferries, qui estimait subir une concurrence irrégulière et l'avait finalement emporté au terme d'un long combat judiciaire. Poursuivant sur cette ligne, le conseil exécutif de Corse s'était refusé mi-novembre à inscrire cette somme à son budget et avait annoncé attaquer l'Etat pour qu'il paye. Le préfet avait alors sommé la Collectivité de Corse de payer, sans quoi l'Etat procéderait "au mandatement d'office de la somme correspondante".

Dans ce rapport de force, le parti de Gilles Simeoni avait également appelé les Corses à manifester pour faire plier Paris. Si la mobilisation insulaire n'a pas été au rendez-vous samedi, Gilles Simeoni a donc obtenu gain de cause jeudi, au moins en partie. Arguant d'un "risque de déséquilibre" du budget de la Collectivité de Corse, "notamment sur le financement de ses investissements", le gouvernement a finalement "décidé d'aider la collectivité à faire face aux conséquences du contentieux", a-t-on expliqué à l'AFP dans l'entourage de la ministre à la Cohésion des territoires, Jacqueline Gourault.

"Sortir par le haut"

"Politiquement, ça permet de solder le passif de cette délégation de service public maritime", a-t-on ajouté de même source, insistant sur cet "effort très important de l'Etat" qui doit permettre "de sortir par le haut de ce dossier compliqué" mais ne vise pas à "transférer la responsabilité" de la collectivité à l'Etat. Ces 50 millions d'euros seront inscrits dans le Plan de transformation et d'investissement pour la Corse (PTIC), dont le financement sera discuté vendredi, dans le cadre du nouvel examen du projet de budget 2022 à l'Assemblée nationale.

J. Br. avec AFP