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Taxe GAFA: Bernard Arnault dénonce les "effets pervers" du projet d'impôt mondial

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Début juin, le G7 Finances s'est engagé sur l'objectif d'un taux d'impôt minimal mondial sur les sociétés "d'au moins 15%". Une taxe qui vise directement les GAFA mais qui ne changera pas la donne, estime le patron de LVMH.

Un coup d'épée dans l'eau? Sur RTL, le patron de LVMH, et deuxième fortune mondiale, Bernard Arnault s'est montré sceptique sur l'efficacité de l'impôt minimum mondial, décidé par les pays du G7, début juin. Les principaux pays riches, dont les Etats-Unis, se sont mis d'accord sur un taux d'imposition minimal de 15% sur les sociétés, visant implicitement les géants du numérique.

Mais cette décision, en l'état, ne change pas la donne, estime le patron de LVMH, qui évoque les "effets pervers" du projet.

"Si j'ai bien compris, il est question de faire payer à ces entreprises qui sont basées en Irlande un impôt en Irlande et non pas en France" explique-t-il. "Les entreprises américaines paieraient ce surcroît d'impôts aux Etats-Unis alors que ce qui me paraitrait justifié, c'est que l'impôt soit payé en France pour les bénéfices réalisés en France".

Dumping fiscal

En réalité, le G7 s'est mis d'accord sur deux piliers inscrits dans une réforme de l'OCDE. Le premier est une meilleure répartition des "droits d'imposition sur au moins 20 % des bénéfices" sur les 100 plus grandes entreprises mondiales dont la marge dépasse les 10%, dont une majorité de géants du numérique. L'autre pilier est un impôt mondial des sociétés avec une taxation minimum sur les sociétés d’au moins 15%.

Cette réforme en censée mettre fin au dumping fiscal qui permet aux entreprises de déplacer leurs bénéfices réalisés dans le monde entier vers des pays où les taxes sont les plus faibles voire inexistantes. Ainsi, pendant plusieurs années, les GAFA (et pas seulement eux) payaient peu ou pas d'impôts en France, en choisissant de déclarer leurs bénéfices en Irlande, par exemple, où le taux d'imposition est un des plus faible d'Europe.

L'Irlande vent debout

En réalité, un impôt minimum prendrait son sens s'il s'appliquait à tous les pays. C'est l'enjeu du prochain G20, les 9 et 10 juillet prochain à Venise, où il faudra par exemple convaincre la Chine de rejoindre le mouvement. Mais même au sein de l'Europe, la question fait débat. L'Irlande n'a ainsi aucune intention de remonter son taux nominal sur les sociétés de 12,5% (le taux réel étant même beaucoup plus faible grâce à des exonérations).

La question soulevée par Bernard Arnault concerne donc les récalcitrants: que faire des pays qui maintiennent leur fiscalité très basse? Le consensus veut que le pays d'origine de l'entreprise taxe directement la différence. Par exemple, si une entreprise américaine s'installe aux Bermudes avec un taux très faible, Washington pourrait taxer la différence jusqu'à 15%.

Donc si l'Irlande ne touche pas à son taux de 12,5% (les décisions fiscales doivent être prises à l'unanimité en Union européennes), les Etats-Unis vont donc bien récupérer la différence pour les entreprises américaines, quand bien même une partie des bénéfices a été réalisée en France. En revanche, si c'est une entreprise française, comme LVMH, c'est Bercy qui récupèrera la différence.

Thomas Leroy Journaliste BFM Business