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Prix du lait: une étude dénonce une hausse qui a plus profité aux distributeurs qu’aux éleveurs

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Alors que le prix de la brique a augmenté de 51% en 20 ans, les éleveurs ont perdu 4% de marge brute. Les distributeurs ont eux enregistré une hausse de 188% et l’industrie agroalimentaire de 64%, selon la Fondation pour la Nature et l'Homme.

"Éleveurs et consommateurs grands perdants du prix des produits laitiers". Le titre de la dernière étude de la Fondation pour la nature et l'homme (FNH) est évocateur. S'appuyant sur plusieurs bases de données, dont celle de l'Insee, la FNH conclut que la grande distribution et l'industrie agroalimentaire ont considérablement profité de l'inflation des produits laitiers.

Selon la fondation, les éleveurs ont gagné entre 0,7 et 0,9 fois le smic sur la période 2018-2021. Dans le même temps, les bénéfices de la grande distribution sont passés de 74 millions à 145 millions, et ceux de l'industrie agroalimentaire sont passés de 449 à 697 millions.

Résultat sans appel

Pour mieux comprendre ces énormes inégalités de revenu, la FNH a étudié les marges effectuées par chaque acteur sur deux produits phares du panier des ménages: un litre de lait demi-écrémé et une plaquette de beurre de 250 grammes. Le résultat est sans appel.

Entre 2001 et 2022, le prix d'une bouteille de lait est passé de 0,55 euro à 0,83 euro. Soit une augmentation de 51%. La fondation relève que les éleveurs n'y sont pour rien. Pire, alors qu'ils récupéraient 0,25 euro sur un litre, ils gagnent désormais 0,24 euro ce qui correspond à une baisse de la marge brute" de 4%. Les distributeurs et l'industrie agroalimentaire ont, respectivement, enregistré une hausse de 188% et 64% de marge brute.

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L'exemple de la plaquette de beurre, s'il est moins éloquent, confirme ces disparités. Entre 2016 et 2020, alors que le beurre connaissait une inflation de 34%, industriels et grande distribution voyaient leurs marges augmenter de 80% et 60%. Loin derrière, les éleveurs bénéficiaient d'une hausse de 11%.

Un secteur au crochet de l'État

La FNH dénonce une asymétrie des pouvoirs qui rend la négociation en faveur des éleveurs très compliquée. Selon l'étude, 3% des entreprises de la transformation réalisent 97% des bénéfices du secteur. De plus, les 71.000 exploitants n'ont pas connaissance du type de produits qui sera fabriqué à partir de leur lait, ni même du prix auquel il sera vendu. Une forme d'opacité qui joue, là aussi, en leur défaveur.

La fondation estime que sans une meilleure répartition de la valeur, la filière, qui survit grâce aux subventions publiques, ne pourra pas assurer sa transition agroécologique. "Cette pression les oblige à rester dans des logiques d’économie d’échelle incompatibles avec le développement de filières plus qualitatives à taille humaine. Cela empêche toutes alternatives de se développer massivement", observe-t-elle.

Théodore Laurent