Energies renouvelables: comment RTE participe au développement de l'éolien en mer en France

Bientôt des parcs d'éoliennes offshore sur toutes les façades maritimes françaises? Fin septembre, Emmanuel Macron inaugurait le premier parc d'éoliens en mer de la France au large de Saint-Nazaire, quelques mois avant sa mise en service effective.
Cette installation s'inscrit dans le projet d'accélération de l'Hexagone sur le déploiement des énergies renouvelables et notamment de l'éolien off-shore, domaine dans lequel accuse d'un certain retard par rapport à la plupart des pays européens bordés par la mer du Nord.
La semaine dernière, le gestionnaire du réseau de transport est revenu en détail sur le développement des éoliennes en mer d'ici 2050. Il y a cinq ans, RTE s'est vu confier un monopole pour le raccordement des parcs éoliens, le réseau en mer étant perçu comme un prolongement du réseau terrestre. Par ailleurs, ces ouvrages de raccordement sont également financés par le tarif d'utilisation du réseau public d'électricité (TURPE) tandis que le gestionnaire collabore avec l'Etat sur les phases en amont à savoir le débat public et le dialogue concurrentiel.
De 0,5 GW aujourd'hui à 40 GW en 2050
Il y a un mois jour pour jour, 9 Etats de la mer du Nord dont la France se sont réunis à Ostende en Belgique où ils ont fixé leur objectif pour les prochaines décennies: ils souhaitent atteindre une puissance de 120 GW d'éolien en mer d'ici 2030 et d'au moins 300 GW vingt ans plus tard. De son côté, l'Hexagone doit atteindre les 40 GW d'ici 2050 mais part de loin par rapport à certains pays comme le Royaume-Uni, l'Allemagne, les Pays-Bas ou encore le Danemark qui se situent déjà respectivement à 14, 8 et entre 2 et 3 GW contre seulement 0,5 GW pour la France.
D'un pays à l'autre, la répartition des rôles entre l'Etat et le lauréat varie quant à la planification ou encore l'instruction des autorisations. "Dans le modèle néerlandais, l'Etat prend un rôle plus important [...] ce qui permet de limiter l’exposition au risque financier des opérateurs industriels en charge de la réalisation effective des projets", indique RTE. En France, le transfert de responsabilité de l'Etat au producteur survient pendant les études de sites et une fois les autorisations purgées de recours aux Pays-Bas. Outre-Manche, c'est un lauréat unique qui est en charge de toute la procédure.
Standardisation, massification et simplification
Pour se donner les moyens de son ambition, l'Etat a signé un pacte avec la filière pour favoriser le développement de l'éolien en mer au cours de la prochaine programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) qui s'étendra de 2024 à 2029. Parmi les objectifs chiffrés, un volume annuel minimal de 2 GW doit être attribué dès 2025 pour atteindre le seuil des 20 GW attribués en 2030. Avant les 40 GW souhaités en 2050, l'Etat a fixé un objectif intermédiaire de 18 GW en service 2035. "La mise en oeuvre concrète de cette programmation nécessite de multiplier par 6 la capacité mise en service entre 2025 et 2035, d'attributer 3 fois plus vite les 9 prochains GW d'éolien en mer et de réduire de 2 ans le délai global entre la désignation du lauréat et la mise en service du parc, de 9 à 7 ans", précise RTE.
Pour gagner plusieurs mois dans la mise en oeuvre des projets offshore, le gestionnaire mise sur une stratégie "SMS" qui se base sur trois piliers: standardisation, massification et simplification. Dans le cadre de la standardisation, l'Etat doit mettre en place un cahier des charges type sans dialogue concurrentiel pour la procédure d'appel d'offres. En ce qui concerne la massification, volet qui doit permettre de gagner 9 à 18 mois, RTE plaide pour des accords pluriannuels avec les fournisseurs, voire un regroupement des achats avec d'autres gestionnaires. De son côté, l'Etat devrait organiser un seul débat public par façade pour réaliser plusieurs parcs et un appel d'offre global pour attribuer 9 à 10 GW à plusieurs lauréats. Enfin, la simplification doit se traduiren par un allégement des spécifications techniques et une instruction des autorisations du raccordement avant celles du parc selon RTE. Par ailleurs, le gestionnaire est favorable à une transition du rôle de l'Etat vers le modèle néerlandais.
"Une planification des espaces maritimes dédiés à l'offshore est un prérequis pour que ces leviers produisent des effets concrets, insiste RTE.
Le gestionnaire explique que "la stratégie SMS est un moyen privilégié pour contenir l'évolution du coût du raccordement des parcs éoliens maritimes" qui est amené à croître en raison d'une forte demande en composants divers. Alors que 74 GW de raccordement HVDC (courant continu à haute tension) sont planifiés avant 2035 en Europe et aux Etats-Unis dont deux tiers rien qu'entre 2029 et 2032, le risque que l'offre ne soit pas suffisante est élevé. RTE estime que le risque principal est la ressource en ingénierie et cite l'approvisionnement en cuivre et la fourniture de l'isolant fabriqué en quasi-monopole côté câbles. Pour les stations HVDC, le gestionnaire évoque la fourniture des composants électriques pour les stations qui sont fabriqués en grande majorité en Asie ou encore la construction et l'installation en mer des plateformes, notamment celles de 525 kV qui sera la technologie privilégiée après 2030.
Autre technologie qui fera l'objet d'un développement accru pour tenir l'objectif de 40 GW en 2050, l'éolien flottant devra représenter la moitié de la capacité totale à cette date. Selon RTE, cela nécessite de lever deux verrous technologiques avant 2050: les poster en mer flottants et les câbles dynamiques de forte puissance.
Où se situeront les futurs parcs d'éoliennes en mer?
Les zones d'implantation des projets sont définies en articulant la PPE et la planification de l'espace maritime. D'après le scénario N2 de RTE qui repose sur le lancement d'un programme ambitieux de construction de nouveaux réacteurs nucléaires de type EPR2, plus d'un tiers de la capacité d'éolien off-shore devrait se concentrer dans le secteur de allant de l'est de la Manche à la mer du Nord. Les façades méditerranéennes et Nord Atlantique-Manche Ouest devraient également voir plusieurs parcs émerger tandis que le sud de l'Atlantique sera peu concerné.
A l'heure actuelle, le programme industriel réseau en mer de RTE comporte 16 raccordements pour une capacité de production légèrement inférieure à 10 GW. Les sites de Saint-Nazaire, Saint-Brieuc et Fécamp sont déjà exploités. Six sont en construction, à Dieppe, dans le Calvados, à Yeu-Noirmoutier et en Méditérrannée tandis que sept autres sont encore en phase de développement sur les différentes façades maritimes.