EDF réfléchit à vendre des parts dans Dalkia et Edison

C’est un serpent de mer qui revient depuis plus de cinq ans. Mais cette fois, EDF semble prêt à vendre ses deux pépites: l’italien Edison et le spécialiste des services énergétiques Dalkia. Selon plusieurs sources, l’entreprise publique a lancé des réflexions stratégiques sur ses deux filiales.
D’abord, le gazier italien Edison, détenu par EDF depuis plus de 20 ans. Pour le moment, aucune décision n’a été prise. Selon nos informations, le PDG d’EDF, Bernard Fontana, est favorable à une vente du contrôle d’Edison.
"Il n'est pas interdit d'imaginer des respirations de portefeuille d'actifs", avait-il sobrement déclaré fin juillet, lors des résultats semestriels du groupe.
Mais le directeur exécutif Marc Benayoun, qui est surtout président d’Edison, souhaite qu’EDF conserve le contrôle, explique une source proche du dossier. Selon Reuters, une introduction en Bourse à Milan du gazier italien serait une solution de compromis, dans laquelle EDF ne cèderait qu’un tiers du capital.
"La logique est qu'Edison soit vendu en plusieurs étapes", nuance un bon connaisseur du dossier. Car l’entreprise vaut cher. Elle dégage 1,7 milliard d’euros de résultat opérationnel et vaudrait, selon des sources financières, plus de 10 milliards d’euros. Ni la Bourse, ni un industriel ne pourrait tout racheter. A moins qu’un consortium d’investisseurs ne se porte candidat.
Le rôle du gouvernement italien
EDF décidera l’année prochaine. Pour le moment, aucun contact n’a été formellement pris entre le groupe français et le gouvernement italien. "Mais il faudra anticiper et être prudent", reconnait une source proche du dossier. L’état italien dispose d’un droit d’intervention et de veto, le "golden power", dans les secteurs stratégiques comme la banque, la défense ou l’énergie.
"Le gouvernement italien n’a jamais demandé à reprendre le contrôle d’Edison", promet un bon connaisseur du dossier.
Depuis deux ans circule l’idée que l’Italie veut remettre la main sur son champion gazier qu’EDF avait racheté en deux temps, en 2002 puis en 2011.
De son côté, l’Etat français, actionnaire d’EDF à 100%, pousse l’entreprise publique à vendre des actifs depuis sa nationalisation en 2022, pour financer la construction de ses futurs nouveaux réacteurs EPR. "S’il y a des cessions, il faudra plutôt s’assurer que l’Etat ne voudra pas tout nous prendre pas des dividendes", rétorque un proche d’EDF.
Redresser Dalkia avant de vendre
L’électricien réfléchit aussi à la cession de sa filiale Dalkia, qui opère dans les services énergétiques, réseaux de chaleur et de climatisation. Là aussi, cette opération a maintes fois circulé dans les couloirs d’EDF depuis plusieurs années. Le nouveau PDG, Bernard Fontana, est prêt à la considérer dans un calendrier plus long, dans deux ans, en tout cas pas avant l’élection présidentielle de 2027.
Dalkia est un sujet sensible. L’entreprise réalise 6 milliards d’euros de chiffre d’affaires, notamment avec les collectivités locales, et emploie 22.000 salariés en France. EDF est prêt à en céder le contrôle mais souhaiterait conserver une participation minoritaire pour éviter une polémique auprès des élus. Comme EDF est détenue à 100% par l’Etat, une vente de Dalkia serait ainsi considérée comme une privatisation et nécessiterait d’obtenir l’autorisation de la commission des participations et des transferts du ministère de l’Economie.
Avant de vendre Dalkia, le PDG d’EDF veut redresser ses comptes alors que son chiffre d’affaires a reculé de 6% en 2024, même si ses marges ont progressé de 4%. Bernard Fontana s’appuie sur son directeur exécutif, Claude Laruelle qui a passé 20 ans chez Veolia, l’ancien actionnaire de Dalkia, et connait bien l’entreprise. Ils ont en ligne de mire de rafler au rival Engie le méga-contrat de 15 milliards d’euros du chauffage urbain de la ville de Paris qui se termine en 2026.
Dalkia a dégagé 425 millions d’euros de marges l’an passé et vaudrait ainsi 7 milliards d’euros. EDF se donne deux ans avant d’envisager une vente et n’exclut pas de faire évoluer la gouvernance de sa filiale. Le groupe souhaite rationaliser Dalkia sur le modèle de son concurrent Equans, l’ancienne filiale d’Engie rachetée par Bouygues en 2022. Contactée, la direction d’EDF n’a pas souhaité commenter nos informations.
Sa vente fait déjà saliver de nombreux groupes industriels. Sont régulièrement cités Vinci, Eiffage, Veolia, voire Suez dont le nouveau patron, Xavier Girre, est l’ancien directeur financier d’EDF. Des fonds d’investissement seront aussi inévitablement sur les rangs pour faire monter les enchères.