BFM Business
Défense

Le Pentagone veut s'inspirer du drone iranien Shahed et soutient le développement de ses propres modèles "kamikazes"

placeholder video
Les capacités du drone Shahed-136, initialement développé par l'Iran et désormais également produit par la Russie, suscitent un intérêt accru de l'US Air Force, qui cherche à en acquérir des copies conformes "made in USA".

Une "copie conforme" des drones Shahed-136. C'est ce que souhaite le Pentagone, qui a publié le 19 août une demande d'information à destination des industriels du secteur. L'objectif serait d'acquérir un premier lot de 16 aéronefs -avec la possibilité d'en acheter 20 supplémentaires-, qui seraient utilisés pour des essais de développement.

Le modèle "doit répondre aux exigences de design et de fonctions du Shahed-136 actuellement développé et opéré par l'Iran", indique le document.

Ainsi, l'aéronef devra être capable, selon le document, d'être lancé à partir d'un système pneumatique, de fonctionner de manière autonome au décollage et à l'atterrissage et de disposer d'une "architecture ouverte", c'est-à-dire capable d'intégrer des charges utiles – de l'explosif en priorité.

Un drone iranien produit par la Russie

Initialement conçu et développé par l'Iran (dont la forme semble s'inspirer d'un projet allemand des années 1980), le drone Shahed ("témoin" en farsi), est d'abord utilisé comme "drone kamikaze" par les forces armées iraniennes dès 2020-2021, avant que la Russie ne s'y intéresse de près pour développer ses capacités de frappe en territoire ukrainien.

D'une envergure de 2,5 mètres pour 3,5 mètres de longueur, le Shahed-136 affiche une portée de 2.500 kilomètres et une vitesse maximale de 185 km/h. Selon diverses analyses, son coût oscille entre 20.000 et 50.000 dollars pièce, indique le Center for Strategic and International Studies (CSIS).

La Russie s'est rapidement intéressée à ce drone iranien, les premières missions contre les forces armées ukrainiennes ont été documentées dès 2022. Face à la nécessité de renforcer ses capacités d'attaque aérienne, tout en soutenant son industrie de défense pour subvenir à ses besoins, la Russie a développé un partenariat technologique avec l'Iran et produit ainsi sous licence sa propre version du Shahed-136, baptisée Geran-2.

Le CSIS décrit le Geran-2 comme "la munition la plus rentable de l'arsenal de frappe aérienne russe", même si "la Russie semble prioriser la quantité par rapport à la qualité".

Le taux d'attrition de ces drones kamikazes est élevé, de l'ordre de 70 à 90%, d'où la nécessité d'en produire en grande quantité. Selon une étude de l'Institut français des relations internationales (Ifri), la capacité de production des Shahed russes était estimée "entre 310 et 444 appareils par mois en 2024".

L'intérêt de ces drones, c'est leur capacité à saturer les défenses aériennes: "ils sont tirés en masse dans des salves dans lesquelles sont noyés des missiles de croisière, plus sophistiqués et très performants", expliquait il y a quelques semaines le général Vincent Breton au cours d'un point presse du ministère des Armées.

Ces munitions "ont le potentiel de ruiner un adversaire tout en épuisant ses stocks de missiles sol-air et air-air", peut-on lire dans une autre étude de l'Ifri sur la supériorité aérienne. L'auteur évoque par ailleurs un coût "de l'ordre de 20 fois inférieur à celui d'un missile de croisière".

Des projets déjà en cours

Des entreprises du secteur travaillent déjà au développement de ce type de munition. Le Pentagone avait déjà fait part de sa volonté d'augmenter la production de drones low-cost, à la suite d'un décret présidentiel signé par Donald Trump en juin pour accélérer la production de drones de conception américaine.

Lors d'un événement tenu à la mi-juillet, le secrétaire d'État à la Défense Peter Hegseth avait déambulé au milieu de pas moins de 18 prototypes de drones produits par des entreprises américaines. Parmi elles, SpektreWorks, qui a présenté son modèle opportunément baptisé FLM 136, mais aussi Griffon Aerospace, qui a exposé son drone MQM-172 Arrowhead. Ces deux modèles affichent un design qui ressemble d'ailleurs beaucoup au Shahed russe.

Helen Chachaty