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Défense

L'Espagne va investir plus de 10 milliards d'euros dans sa défense et atteindre les 2% du PIB avec quatre ans d'avance

Le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez s'adresse aux journalistes lors d'une conférence de presse le 28 janvier 2025 au palais de La Moncloa à Madrid.

Le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez s'adresse aux journalistes lors d'une conférence de presse le 28 janvier 2025 au palais de La Moncloa à Madrid. - Borja Puig de la Bellacasa / LA MONCLOA

Le gouvernement espagnol se met en ordre de marche et acte l'augmentation de ses dépenses de défense, avec des investissements de plus de 10 milliards d'euros.

Le Premier ministre socialiste espagnol, Pedro Sánchez, a annoncé ce mardi des investissements de plus de 10 milliards d'euros, à l'issue d'un conseil des ministres au cours duquel son gouvernement a adopté un plan d'investissements d'un montant de 10,47 milliards d'euros. L'objectif est de porter dès cette année la part des dépenses militaires à 2% du Produit intérieur brut (PIB) du pays, comme le demande l'Otan. Cette annonce traduit une brusque accélération du calendrier qu'il envisageait jusque-là.

Jusqu'à maintenant, le Premier ministre avait seulement évoqué 2029 pour que les dépenses dans le secteur de la défense atteignent le seuil de 2% de la richesse nationale, malgré les pressions croissantes de l'administration américaine de Donald Trump sur ses alliés européens et celles de l'Otan.

"Il est indispensable que nous respections les objectifs d'investissement qu'exigent nos partenaires", a déclaré Pedro Sánchez, un socialiste, devant la presse à l'issue du Conseil des ministres, confirmant l'impact de ces pressions extérieures.

"Avec le plan que nous présentons aujourd'hui (mardi), l'Espagne respectera cette année l'objectif des 2% du Produit intérieur brut pour son budget en matière de sécurité et de défense", a-t-il dit, le répétant même une deuxième fois.

Le Premier ministre a indiqué que ce plan serait transmis dès mercredi à Bruxelles "pour que ses bases techniques et budgétaires soient évaluées par l'UE et par l'Otan".

Il a ajouté que ces investissements se feraient "sans augmenter les impôts, sans toucher à un centime des investissements de l'État dans les dépenses sociales et sans augmenter le déficit public".

"Un membre fiable de l'Otan"

L'Espagne, a-t-il proclamé, entend ainsi "consolider (sa place) comme un membre central et fiable de l'UE et de l'Alliance atlantique". Il a rappelé que les dépenses de Madrid en matière de défense représentaient seulement 1,4% en 2024 (et 0,9% lors de son arrivée au pouvoir, en 2018) et précisé que ces nouveaux investissements porteraient ces dépenses à plus de 33 milliards d'euros.

En mars, le secrétaire général de l'Otan, Mark Rutte, avait créé un profond embarras à Madrid en affirmant que le gouvernement espagnol s'était engagé à atteindre les 2% avant l'été, ce qui avait amené Madrid à rappeler que son objectif était de parvenir à ce seuil d'ici à 2029, sans plus de précision.

Atteindre ce seuil de 2% du PIB était d'autant plus difficile politiquement que le partenaire du Parti socialiste au sein du gouvernement minoritaire de Pedro Sánchez est une plateforme de gauche radicale, Sumar, farouchement opposée à tout accroissement des dépenses militaires.

Selon la presse espagnole, les ministres membres de Sumar se sont opposés à ce plan durant le conseil des ministres, qualifiant cette hausse du budget militaire d'"exorbitante".

Face à ces critiques, Pedro Sánchez a souligné que "moins du cinquième" des nouveaux investissements (19%) "seront destinés à l'achat d'armement dans le sens le plus traditionnel du terme", alors que près du tiers (31%) seront utilisés pour améliorer les capacités de l'Espagne dans le domaine de la cyber-sécurité.

Pas d'impact sur le budget social

Surtout, une part importante du plan (17%) servira à "renforcer les capacités à double utilisation" des forces armées espagnoles dans la lutte contre les désastres naturels commes les incendies ou les inondations, de plus en plus fréquents et de plus en plus graves en raison du changement climatique.

On ne savait pas mardi si l'UE et l'Otan accepteraient de comptabiliser ce type de dépenses au titre du budget de la défense, comme Madrid le réclame afin d'arriver plus facilement aux 2%.

Le Premier ministre espagnol a aussi assuré que ces investissements se feraient "sans augmenter les impôts, sans toucher à un centime des investissements de l'Etat dans les dépenses sociales et sans augmenter le déficit public".

Une partie du financement, a-t-il dit, proviendra d'une "réorientation" des fonds européens "Next Generation", le plan de relance élaboré en 2020 par la Commission européenne pour combattre les effets de la pandémie. En outre, il a assuré que 87% des investissements se feraient dans des entreprises espagnoles réparties dans toutes les régions du pays.

A l'en croire, ces investissements entraîneront une augmentation du PIB comprise entre 0,4 et 0,7% et permettront la création de près de 100.000 emplois (36.000 directs et quelque 60.000 indirects).

Pedro Sánchez a enfin confirmé que le plan ne serait pas soumis au vote des députés, ce qui a ulcéré l'opposition de droite.

HC avec AFP