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Défense

Bientôt une unité de robots militaires sur le champ de bataille? La robotisation "est en train d'exploser" dans l'armée de Terre française qui dévoile son plan

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L'armée de Terre prend résolument le virage de l'automatisation et se prépare à des conflits armés de plus en plus "robotisés", en développant des innovations qui font largement appel à l'intelligence artificielle.

La robotisation des armées s'accélère. Couplée à l'intelligence artificielle (IA), elle va décupler les capacités militaires. C'est en tout cas ce que présageait le chef d'état-major de l'armée de Terre la semaine dernière, lors d'une conférence de presse.

"Il y a cinq ans, on aurait dit que ça arriverait en 2030-2035, mais manifestement, cette date se rapproche, car la technologie évolue plus vite. La guerre provoque une accélération dans le domaine militaire", a affirmé le général Pierre Schill.

Même son de cloche du côté de la Section technique de l'armée de Terre (STAT), qui pilote les innovations, évalue et expérimente les idées venues des régiments.

"La robotisation est en train d'exploser, la question c'est de savoir comment on commandera ces robots pour ne pas perdre trop de temps et d'énergie pour le soldat (qui les pilotera, NDLR), de savoir comment faire interagir les robots entre eux et contrôler les missions qui leur seront donnée", explique le général Olivier Coquet, directeur de la STAT.

Projet Pendragon

Car l'objectif est de constituer une unité de robots fonctionnant avec de l'intelligence artificielle. Nom de code: Pendragon. Ce projet, coordonné par le Commandement du combat futur (CCF) et l'Agence ministérielle pour l'IA de défense (AMIAD), a pour ambition de déployer des robots terrestres et aériens capables de réaliser des missions tactiques.

Ce ne seront pas des robots qui tiendront une arme, précise le général Schill, car il n'est pas question de remplacer les soldats sur le champ de bataille, ces unités robotisées sont plutôt pensées pour réaliser des missions de type reconnaissance de terrain.

Le calendrier est serré: l'ambition est de proposer une démonstration de cette nouvelle unité, qui devrait compter une vingtaine d'appareils, dès 2026, lors d'un important exercice militaire.

Bien évidemment, l'IA est au cœur du projet Pendragon, puisqu'elle sera nécessaire à la communication entre les robots, mais aussi avec les opérateurs, car il n'est pas question de laisser les robots en totale autonomie. Les algorithmes décupleront leurs capacités en matière de détection et de localisation de cible par exemple.

Un canon dopé à l'IA

Parmi les innovations présentées par la STAT, figurait également l'Aurochs 2, un tourelleau conçu par l'armurier FN Herstal, monté sur un châssis et téléopéré. Ce système de mitrailleuse montée sur un véhicule pilotable à distance a été co-développé avec l'Institut franco-allemand de recherche Saint-Louis et le Battle Lab Terre, intégré à la STAT.

L'Institut franco-allemand de recherche Saint-Louis a dévoilé le Aurochs 2.
L'Institut franco-allemand de recherche Saint-Louis a dévoilé le Aurochs 2. © Institut Saint-Louis

L'officier programme en charge de ce projet explique que ce système est mis en œuvre par deux opérateurs, l'un pour manier la tourelle, l'autre pour piloter le véhicule. Celui-ci peut d'ailleurs être dirigé à distance ou être piloté en mode "précède-moi": l'opérateur avance derrière le véhicule et le diriger par un système de capteurs. L'Aurochs 2 est également doté d'une fonction autonome de "retour sur trace", c'est-à-dire qu'il enregistre l'itinéraire réalisé pour pouvoir revenir ensuite.

Développé pour intégrer une mitrailleuse, le système Aurochs 2 pourrait également être configuré pour accueillir d'autres équipements. Le patron de la STAT précise que la plateforme est "polyvalente": la charge utile du châssis est de 400 kg et pourrait également être dotée d'un brancard, par exemple.

Un programme à effet majeur

Le retour d'expérience de la guerre en Ukraine a mis en avant cette "robotisation du champ de bataille", qui est amenée à se développer dans les prochaines années. C'est déjà le cas avec l'utilisation des drones, dont l'emploi par les forces armées a explosé, d'ailleurs, la quasi-totalité des unités de l'armée de Terre en dispose – du micro-drone au drone tactique, en passant par les robots démineurs ou encore les drones logistiques.

La Loi de programmation militaire 2024-2030 prévoit une enveloppe de 5 milliards d'euros pour développer des programmes liés aux robots et aux drones. Le texte évoque explicitement "l'usage de robots terrestres et de systèmes capables de coopérer avec le soldat et son environnement, sous son contrôle", dans le but de "réduire l'exposition" des militaires sur le champ de bataille.

Helen Chachaty