"Homme de dialogue", "respectueux": a priori positif du secteur agricole envers Michel Barnier

Le dernier nom aura finalement été le bon. Le LR Michel Barnier a été choisi jeudi par Emmanuel Macron pour le poste de Premier ministre. À 73 ans, il a déjà une grosse carrière politique derrière lui, avec notamment les négociations du Brexit pour l'Union européenne, mais aussi, à l'échelle nationale, un passage remarqué au ministère de l'Agriculture dans le gouvernement Fillon, entre 2007 et 2009.
Le gros point fort de Michel Barnier, pour les responsables du secteur agricole que nous avons contactés, tous syndicats confondus, c'est sa bonne connaissance des dossiers, en France, mais aussi au niveau européen.
Alors que l'actuelle présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, doit annoncer sa vision sur l'agriculture d'ici début 2025, en se basant sur des recommandations d'un groupe d'experts de tous bords, "[sa] connaissance de la politique agricole commune est un avantage", souligne un gros acteur de la filière.
Depuis son départ de la rue de Varenne pour Bruxelles, Michel Barnier est resté au contact du monde agricole français, d'après plusieurs sources. Un responsable du secteur raconte qu'il a continué de le croiser régulièrement au Salon de l'agriculture. Interrogé sur Europe 1 en 2015, en plein épisode de manifestations d'agriculteurs, l'ancien ministre déclarait que l'agriculture "est une question de société" et qu'"il faut faire attention à cette souffrance agricole".
"L'agriculture ne peut pas être laissée aux seules lois du marché"
"Il a les codes", souligne un de nos interlocuteurs, qui décrit "un profil assez rassembleur et sans casserole."
"Il n'est pas forcément chaleureux, mais il est agréable et respectueux de tous. C'est un homme de dialogue, mais qui tient et défend ses positions. Il est capable de trancher avec des décisions courageuses et en rupture."
Comme en 2009, poursuit cette source, quand Michel Barnier, alors ministre de l'Agriculture, décide de "donner un grand coup de canif aux modalités de la PAC en transférant d'importants financements, qui étaient jusque-là alloués aux grandes cultures, notamment céréalières, vers les éleveurs."
"J'ai voulu donner à la PAC une orientation écologiquement responsable et économiquement plus juste", disait alors Michel Barnier. Habile négociateur, nous raconte-t-on, il "ne force pas la main, mais il reste ferme sur ses positions." Le profil de Michel Barnier fait plutôt consensus. Même du côté de la Confédération paysanne, historiquement ancrée à gauche.
Si, pour le syndicat, sa nomination à Matignon relève d'un "déni démocratique, par rapport aux élections de cet été", il se satisfait que l'homme connaisse bien l'agriculture et les enjeux européens. Et la porte-parole du mouvement, Laurence Marandola, met à son crédit une phrase, prononcée en 2008: "L'agriculture ne peut pas être laissée aux seules lois du marché", avait alors lancé le ministre de l'époque. Maintenant, elle attend d'être rapidement consultée et de voir ce que le nouveau Premier ministre va proposer "sur les prix, les revenus et la régulation du marché."
Faire de l'agriculture une "priorité immédiate"
"Il fallait avancer et nommer un Premier ministre", constate pour sa part la présidente de la Coordination rurale. Maintenant, "construisons!", lance Véronique le Floc'h, qui attend de voir à qui Michel Barnier va confier le portefeuille de l'Agriculture. Même urgence dans le communiqué cosigné par la FNSEA et les Jeunes agriculteurs, qui, après l'avoir félicité pour sa nomination, lui intiment de faire de l'agriculture "la priorité immédiate" de son gouvernement.
Les acteurs du secteur le disent et le répètent en ce début septembre : la colère couve toujours chez les exploitants, depuis les manifestations du début d'année. Ils déplorent que les mesures promises par l'exécutif sortant n'aient pas été toutes prises, que le projet de loi qui leur était consacré ait fait les frais de la dissolution de l'Assemblée nationale, et ils n'excluent pas de nouvelles actions si rien n'est fait pour apporter des réponses.