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Agriculture

35 à 40% du PIB agricole menacé d'ici 2050 sans changement de modèle, selon une étude

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D'après une étude menée par une filiale de la Caisse des dépôts, sans évolution majeure du modèle agricole français, le visage de l'agriculture française sera transformé d'ici 2050, avec une forte baisse de la production agricole.

Si aucune mesure n’est prise d'ici 2050, l’agriculture française pourrait se retrouver dans une situation dramatique, selon une étude menée par Bureau T, cellule de conseil en stratégie et prospective du Groupe SCET (filiale de la Caisse des dépôts).

L'étude dresse un tableau particulièrement sombre de l'état de l'agriculture française si aucune décision majeure n'est prise, dans un scénario "au fil de l'eau".

En effet, près de 35 à 40% de la valeur ajoutée agricole est menacée d’ici 2050. Cette baisse pourrait se chiffrer entre 14 et 16 milliards d’euros, une perte conséquente attribuée à 50% au changement climatique, 25% aux difficultés liées aux défis démographiques (notamment les défis liés à la transmission des terres agricoles) et 25% aux effets systémiques en cascade.

42% de la surface agricole utile menacée

Ce sont environ 54 départements, (représentant 42 % de la surface agricole utile) qui sont exposés à une transformation radicale, particulièrement dans la zone méditerranéenne. Selon l'étude, les régions qui connaissent un niveau d’impact majeur sont la Guadeloupe, la Martinique, la Réunion, Provence Alpes Côtes d’azur et la Corse. Celles qui connaissent un impact fort sont les Pays de la Loire, la Nouvelle-Aquitaine, l’Occitanie, l'Auvergne-Rhones-Alpes, la Guyane et Mayotte.

Pénuries d'eau

"Le secteur a besoin de savoir vers où on se dirige. Les solutions actuelles sont trop court-termistes" explique Paloma Pardineille, directrice de Bureau T.

Dans ce scénario "au fil de l'eau", c'est-à-dire sans prise de décision sur le long terme, le risque lié à la tendance à la surspécialisation épuisera les sols et réduira les rendements. Par ailleurs, l’irrigation augmentera de 30 à 40%, générant des conflits d’usage et exacerbant les pénuries d'eau, particulièrement dans le bassin versant Rhône-Méditerranée, déjà soumis à des réserves insuffisantes.

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Dès lors, l’agriculture française deviendra de plus en plus dépendante aux aides publiques et sera confrontée à une concurrence internationale accrue souligne l'étude. Les ruptures d’approvisionnement, notamment pour des produits fragiles comme la salade, deviendront monnaie courante, aggravées par une pression grandissante sur les ressources humaines.

Agir tout au long de la chaîne de valeur

"Il faut une stratégie coordonnée, qui embarque les acteurs publics, privés, les entreprises etc. tout au long de la chaîne de valeur", selon Paloma Pardineille, directrice de Bureau T.

Pour relever les défis à venir, l’étude souligne que la transition agricole doit concerner l'ensemble du secteur, à chaque étape de la chaîne de valeur.

"Le problème est systémique, il faut impacter toute la chaîne de production", appuie Paloma Pardineille, directrice de Bureau T.

Pour réussir cette adaptation dans une telle trajectoire, la transition doit s'opérer sur le terrain, en impliquant tous les acteurs du secteur à chaque étape de la chaîne de valeur. Ainsi l’étude préconise par exemple, au niveau des intrants, de "développer la recherche variétale". Concernant la production, elle insiste sur la nécessité de "diversifier les espèces et cultures", en ajustant les choix agricoles aux nouvelles conditions, afin de pallier les baisses de rendements tout en améliorant la qualité des sols et la résilience des systèmes agricoles.

Autre exemple: l’étude recommande d’"anticiper la migration des cultures", particulièrement face aux bouleversements sectoriels qui en découleraient. Cela concerne par exemple le maïs, actuellement concentré dans le Sud-Ouest et très demandeur d’eau pendant l’été, ou encore les vignes.

Louise de Maisonneuve