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"Ils investissent six fois plus que l'Europe réunie": le patron de l'Agence spatiale européenne veut qu'on prenne exemple sur les Américains

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Invité de Good Morning Business, le directeur général de l'Agence spatiale européenne Josef Aschbacher a évoqué les pistes pour renforcer la place de l'Europe dans la concurrence mondiale.

Comment l'Europe peut-elle concurrencer l'industrie spatiale américaine? La question sera au coeur des discussions de la prochaine réunion ministérielle prévue l'automne prochain à Brême. A cette occasion, le directeur général de l'Agence spatiale européenne (ESA) espère pouvoir compter sur des engagements financiers de l'Italie, de l'Allemagne mais aussi de la France.

"C'est important que l'industrie française soit présente, on a besoin de la France, assure Josef Aschbacher au micro de BFM Business. Je connais la situation budgétaire qui est compliquée en France. Pour autant, l'espace est un domaine tellement critique et stratégique qu'on ne peut pas laisser passer cette opportunité."

Et pour cause, malgré sa force, l'industrie spatiale européenne souffre d'un "phénomène de fragmentation". "Il faut veiller à ce que nous puissions consolider cette industrie pour être plus fort sur la scène et sur les marchés internationaux, souligne le dirigeant de l'ESA. On le voit très bien aux Etats-Unis: vous avez une industrie spatiale extrêmement puissante mais il ne faut pas oublier que si les Etats-Unis ont une industrie défense, c'est parce que le secteur public, à savoir la Nasa mais également le ministère de la défense, investissent six fois plus que l'Europe réunie."

"Alors évidemment l'industrie américaine peut se permettre d'avoir des tas de contrats et d'être bien plus puissante et importante par rapport à l'industrie européenne [...] L'investissement public est essentiel."

Selon Josef Ashbacher, c'est ce mode de financement "qui permet de créer une industrie de dimension mondiale" avec des acteurs globaux à l'image de SpaceX.

Réformer le retour géographique

S'il loue la capacité de l'Europe à développer des technologies, le directeur général de l'Agence spatiale européenne estime en revanche qu'elle pêche en termes de volumes. "Ce sont des centaines voire des milliers de satellites, et là l'Europe n'est pas encore suffisamment bien équipée, déplore-t-il. Il faut développer la technologie pour cela mais il faut pouvoir passer à l'échelle industrielle et là, c'est quelque chose où nous avons un retard à rattraper pour pouvoir être compétitif et pouvoir rivaliser avec Starlink ou d'autres constellations à l'avenir."

Le principe de retour géographique, qui caractérise les Etats membres par leur volonté d'avoir un retour sur investissement, constitue un frein à ce développement technologique qui incite le dirigeant de l'ESA à réformer ce système en le simplifiant. "On a déjà réglé un problème avec le juste retour, indique-t-il. Le principe est qu'on permet à l'industrie de faire le développement mais lorsqu'il a eu lieu, les Etats membres financent les coûts de ce développement." Josef Ashbacher trouve toutefois des avantages au retour géographique : "L'industrie européenne est très compétitive, on en a justement pour son argent [...] La gestion de l'argent du contribuable est plutôt bonne."

Timothée Talbi