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Jauger votre organisation ou tester votre soumission? Que répondre à un recruteur qui souhaite regarder dans votre sac à main? (Ce qui est illégal)

Entretien d’embauche (image d'illustration).

Entretien d’embauche (image d'illustration). - fizkes / Shutterstock

Il est interdit pour un recruteur de demander à une candidate de montrer le contenu de son sac à main pendant un entretien d'embauche, même si c'est pour vérifier qu'elle est bien organisée. Il s'agit d'informations personnelles.

Si on vous fait cette demande, une petite lumière rouge doit s'allumer dans votre tête. À la fin d'un entretien d'embauche pour un poste d’animatrice de vente, une candidate s'est vue poser une question pour le moins déstabilisante. Selon son témoignage recueilli par le Parisien, le recruteur lui a demandé d'ouvrir son sac à main pour qu'il puisse en regarder le contenu, et vérifier si elle était bien organisée.

"Il s’agissait plutôt d’évaluer ma soumission à l’entreprise. Le vrai test qu’on me faisait passer était de savoir si j’obéissais aveuglément", explique-t-elle au quotidien. Une pratique totalement illégale et problématique, selon l'avocate en droit du travail Agathe Lemaire.

"C'est interdit, le contenu du sac à main ne relève absolument pas du domaine professionnel, or l'employeur ne doit évaluer que des compétences ou des qualités professionnelles", explique-t-elle à BFM Business.

"Si on vous fait cette demande, je suggère de vous y opposer en expliquant que ça n’a rien de professionnel", conseille-t-elle.

Mais les candidats sont généralement dans une position d'infériorité. "J’avais besoin de ce boulot, j’ai accepté et j’ai été prise mais je ne décolère pas depuis. Je savais que cette requête n’était pas normale", témoigne la jeune femme, qui sortait d'une période de chômage de 8 mois.

"L'employeur s'expose à des poursuites"

En plus d'être illégale, ce test revêt aussi une dimension sexiste car il est plutôt adressé aux femmes (qui sont plus nombreuses que les hommes à porter des sacs à main). Par ailleurs, le recruteur pourra avoir accès au contenu du sac et prendre sa décision en fonction d'éléments très personnels, ce qui est interdit. "Il a observé attentivement mes affaires, sans fouiller. Heureusement ma boîte d’antidépresseurs était dans le fond. Il aurait pu, en plus, obtenir des informations médicales me concernant. C’est une violation totale de mon intimité", témoigne ainsi la jeune femme.

"L'employeur s'expose à des poursuites car si la candidate n'est pas retenue au poste, elle pourra très bien faire un recours pour discrimination", précise Agathe Lemaire.

Enfin, ce test est un vrai piège qui peut se retourner systématiquement contre la candidate, il est donc profondément injuste car il est impossible de s'en sortir. En effet, si la candidate refuse de montrer l'intérieur de son sac, il pourra lui être reproché de ne pas coopérer (un reproche, rappelons le, illégitime). À l'inverse, si elle accepte d'ouvrir son sac, d'autres recruteurs pourraient interpréter ce geste comme un manque de caractère et de confiance (une employée incapable de dire non).

Pas de bonne solution

Impossible néanmoins de savoir si cette pratique est répandu ou s'il s'agit d'un événement isolé. Dans tous les cas, elle s'ajoute à une myriade de tests censés "tester la personnalité", qui se révèlent généralement être des pratiques au mieux inutiles au pire abusives.

On peut ainsi citer le test de la chaise branlante: le candidat est installé sur une chaine instable et le recruteur observe sa réaction. Là encore, pas de bonne solution pour lui car l'interprétation va dépendre du recruteur.

Si le candidat ne dit rien, il pourra être perçu comme passif par les uns, ou comme résilient et maître de ses émotions pour les autres. S'il demande à changer de chaise, même logique, certains diront qu'il est pro-actif, d'autres qu'il est facilement perturbable et ne peut pas se concentrer si les conditions ne sont pas optimales. Ainsi, en plus d'être piégeux (voire vicieux), ces "tests" ne renseigne pas vraiment sur le candidat et s'avère donc passablement inutiles.

Marine Cardot