Les médecins en grève pour défendre leurs conditions de travail

28 syndicats et organisations professionnelles de médecins participent à ce mouvement de grève, selon les organisateurs. - -
Ce ne devait être au départ qu'une petite grève d'internes. Mais à l'arrivée, cela s’est transformé en un vaste mouvement de contestation qui exprime le mal-être de tous les médecins. Une grogne qui va des généralistes de campagne jusqu'aux chirurgiens esthétiques de la Côte d'Azur, en passant par tous les corps de spécialistes : chirurgiens, cardiologues, gynécologues et diverses coordinations constituées pour l'occasion. Au total, ce sont 28 syndicats et organisations professionnelles de médecins qui participent à ce mouvement, selon les organisateurs. Ce lundi les médecins sont donc en grève afin d'exprimer leur colère face à un gouvernement qui, selon eux, les stigmatise. Les internes veulent notamment défendre leurs conditions de travail et leur liberté d'installation. L'accord d'encadrement des dépassements d'honoraires médicaux, signé fin octobre sous la pression de la ministre de la Santé Marisol Touraine et jugé trop contraignant par les protestataires, cristallise également le mécontentement.
Une grève largement suivie à Lyon
A Lyon, par exemple, 90% des établissements participent à ce mouvement national à l'appel du syndicat Le Bloc. Le syndicat majoritaire chez les personnels de chirurgie proteste contre le protocole d'accord pour limiter les dépassements d'honoraires. Un accord signé pourtant par les trois syndicats majoritaires chez les praticiens généralistes et spécialisés et qui vise à limiter les prix à deux fois et demi le tarif de la Sécu. Inacceptable pour ces praticiens qui estiment avoir le droit de fixer leurs tarifs en fonction de leur travail et de la qualité des soins rendus. Par conséquent, ce lundi à la clinique du Val d’Ouest à Ecully, tout près de Lyon il n'y a aucune activité. Le directeur de l'établissement Jean-Paul Varichon confirme l'« arrêt total de l’activité. On ne peut plus faire d’accouchement si les anesthésistes ne sont pas là, si les chirurgiens gynécologiques sont absents, s’il n’y a plus de pédiatres, on ne peut pas travailler. La première chose qu’on a faite, c’est de prévenir les autorités de tutelle, ensuite on renvoie vers les hôpitaux publics ».
« On est déjà sur des pistes à l’étranger »
Marie-Victoire Sergeant est gynécologue-obstétriciene à la Clinique du Val d'Ouest. Elle se verse un salaire de 6 000 euros par mois, et paye autant de frais pour faire tourner son cabinet. Si elle devait être taxée davantage, elle pourrait licencier ou pire… s’exiler : « La première option, va être d’augmenter le rythme des consultations, de trois par heure, on passerait à six mais à ce moment-là, les patients seraient vus au lance-pierre, et puis très clairement, on licencie une secrétaire. Très clairement, il est hors de question que mon niveau de vie soit impacté. La deuxième option : l’étranger. Mon mari et moi sommes tous les deux médecins, on est déjà sur des pistes. On est censé être des élites et ne pas gagner d’argent ? Nous prenons des responsabilités médico-légales énormes, si ce n’est pas reconnu je vais aller là où ça l’est ».
« Pas le moment le plus opportun »
Si les médecins seront nombreux à être en grève aujourd’hui, certains pourtant ne sont pas favorables à ce mouvement. Une question de calendrier. « Le mouvement aujourd’hui n’est pas opportun, estime Michel Chassang, président de la Confédération des syndicats médicaux français. Surtout vis-à-vis de nos patients qui rencontrent des difficultés financières très importantes. Ce n’est donc pas le meilleur moment pour un mouvement de ce type dans la mesure où ça risque de mettre en opposition les médecins avec leurs patients ».
« On n’a pas le droit de traiter les médecins comme ça »
De son côté Jean-Paul Hamon, médecin généraliste dans les Hauts-de-Seine et Président de la Fédération des Médecins de France, est largement favorable à ce mouvement de contestation : « On n’est pas les seuls dans ce pays à être inquiet pour notre avenir. Ce qu’on veut dire à la population, c’est qu’on n’a pas le droit de traiter les médecins comme on les traite depuis six mois. On n’a pas le droit de dire qu’ils ne "travaillent pas tant que ça", on n’a pas le droit de dire qu’ils gagnent assez. Ces médecins, ils sont confrontés tous les jours à la fragilité de l’existence et rien que pour cela, ils méritent le respect ».