La loi sur la religion au travail arrive à l’Assemblée

Les entreprises sont de plus en plus souvent confrontées à des revendications religieuses sur le lieu de travail. - -
Quelle doit être la place de la religion dans l’entreprise ? Pour le moment, chaque patron décide lui-même des règles, mais l’assemblée nationale examinait ce jeudi matin une proposition de loi UMP sur le sujet. Le texte, rejeté quelques plus tard, proposait de fixer des règles de bonnes pratiques dans les entreprises qui sont en contact avec du public, règles qui seraient fixées après une négociation entre direction et représentants du personnel. L’affaire de la crèche Baby Loup a en effet remis la question sur le devant de la scène. Il y a 3 mois, la Cour de cassation a estimé que le licenciement d'une salariée de la crèche qui portait le voile constituait « une discrimination » dans la mesure où cette crèche est privée. L'observatoire de la laïcité a été chargé depuis cette affaire par le président de la République d'élaborer des propositions sur l'encadrement de la laïcité dans les structures accueillant des enfants.
Réglementer les pratiques religieuses
Les entreprises sont de plus en plus souvent confrontées à des revendications religieuses sur le lieu de travail, qui peuvent porter sur la tenue vestimentaire, la mise en place de salles de prière dans l’entreprise, ou le refus de travailler avec une personne du sexe opposé. 28% des responsables de ressources humaines reconnaissent dans un sondage récent (sondage Randstadt pour Sciences Po Rennes) qu’ils ont été confrontés à des demandes de ce type, et le pourcentage passe à 43% en région parisienne.
La proposition de loi, très courte, ne comportait que deux articles. Les députés UMP proposaient d'inclure dans le Code du travail la possibilité pour un chef d'entreprise de réglementer le port de signes et les pratiques religieuses au travail, notamment lorsque son entreprise est en contact avec le public.
« Une entreprise laïque et républicaine »
La société de recyclage Paprec compte près de 60 usines en France et 3 500 employés. Là-bas, les revendications religieuses sont beaucoup plus nombreuses qu’avant, notamment sur le port du voile dans l'entreprise. « C’est un choix qu’on fait, la personne qui le fait le vit bien, et sera bien dans son travail », explique Nadia, une des salariés. Mais parfois, les revendications vont bien plus loin, ajoute Claude Sollarz, le vice-président de la société. « Il y a quelques années, une femme s’est retrouvée avec le foulard. Comme elle était à l’accueil, elle n’acceptait plus de serrer la main ou de parler aux hommes. Il a fallu prendre une décision et dire qu’il fallait se séparer. C’est à nous d’expliquer que nous sommes une entreprise laïque et républicaine, et que si nous le faisions dans toutes les entreprises, ce serait impossible à vivre ». Mais si Claude Solarz veut des règles, pas question de discriminer qui que ce soit pour autant. « Quand je fais un buffet, je vais que partout, il y ait un buffet halal, et un buffet avec du porc. Ça rentre dans la qualité du bien vivre ensemble », estime le patron.
« Quand on n’est pas croyant, on ne peut pas comprendre »
De nombreux employés ont pourtant du mal à comprendre pourquoi les questions religieuses posent problème dans l'entreprise. Pour eux, on peut tout à fait « s'arranger », à l’image de Nadia, qui ne voit pas pourquoi on n'installerait pas de salles de prière dans son entreprise. « A partir du moment où on ne dérange pas les autres, je pense qu’on peut essayer de mettre deux salles de repos, une où on peut prendre un café, se reposer, et une autre pour les personnes qui décident de prier, sans que ça heurte les autres personnes. Tout ça, bien entendu, pendant leur temps de pause ou de déjeuner, pas pendant leur temps de travail, à aucun moment ». Musulmane, Julie estime aussi qu’elle devrait pouvoir porter un signe distinctif sur son lieu de travail. « J’aimerais bien pouvoir porter un signe religieux au travail sans être mal regardée, sans qu’on ait des préjugés sur moi. Quand on n’est pas croyant, on ne peut pas comprendre », considère la jeune femme.