Emploi des séniors: cette étude qui montre que les plus âgés ne deviennent pas plus lents (à une condition)

Les séniors souffrent de nombreux préjugés. Ils seraient moins adaptables, ne comprendraient rien aux nouvelles technologies, manqueraient de dynamisme... Autant d'a priori qui entravent leur intégration sur le marché du travail. Sans parler de leurs compétences cognitives: de précédentes recherches suggèrent qu'elles diminueraient dès l'âge de 30 ans, voire avant.
Alors que la réduction du chômage des séniors est affichée comme priorité par le gouvernement, une récente étude, publiée dans la revue Science Advances, permet d'éclairer le débat sous un jour nouveau.
"Les compétences déclinent plus tard que ce que l'on supposait auparavant", assurent les chercheurs.
Et point le plus important: ce déclin des compétences n'est pas inévitable. Il "n'est présent que pour les personnes qui n'utilisent pas beaucoup leurs compétences au travail ou à la maison".
De meilleures compétences à 65 ans qu'à 20 ans
Pour arriver à ces nouvelles conclusions, les chercheurs ont changé de méthode. Alors que de précédentes études comparaient les performances des personnes plus jeunes à celles de personnes plus âgées, ils ont décidé d'analyser les données des mêmes enquêtés et de réévaluer leurs capacités après trois ans et demi.
L'étude "montre que les compétences augmentent pour les individus jusqu'à l'âge de 45 ans en littératie et jusqu'à l'âge de 40 ans en numératie". Mais surtout, les scores obtenus à 65 ans restent supérieurs à ceux obtenus à 20 ans.
"Dans l'ensemble, nos résultats remettent en question l'idée que la loi naturelle impose un déclin inévitable des compétences avec l'âge."
Un sudoku ou un livre pour aller contre l'ordre naturel
Car avec un peu de travail, il est possible de maintenir son cerveau en bonne forme. Ainsi ceux qui réalisent fréquemment des activités comme "calculer des prix, des coûts ou des budgets" (pour les mathématiques) ou "lire des lettres, des mémos ou des courriels" (pour la lecture) ne perdent jamais leur compétence jusqu'à 65 ans (l'étude ne va pas au-delà).
Leurs compétences augmentent fortement jusqu'à la cinquantaine, puis se maintiennent. Ceux qui pratiquent moins souvent ces activités perdent en compétence dès le milieu de la trentaine, toujours selon l'étude. "Les choix comportementaux peuvent surmonter les changements biologiques naturels", affirme les auteurs.
"En principe, nos résultats offrent une certaine consolation aux pays dont la population vieillit."
Mais pour que les auteurs, ces conclusions soulignent aussi l'importance du maintien des compétences par l'activité et par l'apprentissage tout au long de la vie.
Étude publiée le 5 mars 2025 dans la revue Science Advances par Eric Hanushek de l'université américaine de Stanford, Lavinia Kinne de l'institut allemand d'études économiques à Berlin, Frauke Witthöf et Ludger Woessmann de l'institut pour la recherche en économie (IFO) à Munich.
Cette étude utilise les données du Programme pour l'évaluation internationale des compétences des adultes (PIAAC), administré par l'OCDE, qui a testé les compétences en calcul et en lecture des adultes âgés de 16 à 65 ans dans 39 pays (OCDE 2013).
Les chercheurs ont utilisé uniquement les données de l'Allemagne, qui a réinterrogés et retestés les participants trois ans et demi après l'enquête initiale.