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Emploi

Chômage : même surdiplômés, ils galèrent

Sur les 300 000 diplômés de l'enseignement supérieur qui arrivent chaque année sur le marché de l’emploi, 61% sont sans emploi six mois après l’obtention de leur diplôme.

Sur les 300 000 diplômés de l'enseignement supérieur qui arrivent chaque année sur le marché de l’emploi, 61% sont sans emploi six mois après l’obtention de leur diplôme. - -

Les chiffres du chômage pour le mois de mai sont attendus ce mercredi dans la soirée. Ils pourraient être à la hausse pour le 25e mois consécutif. Et parmi ceux qui trinquent, il y a les jeunes diplômés du supérieur, qui malgré leurs diplômes, galèrent pour intégrer le marché du travail.

C’est comme un entonnoir géant dans lequel ils s’entassent. Chaque année, 300 000 diplômés de l'enseignement supérieur arrivent sur le marché de l'emploi. Un marché saturé, qui n’arrive même plus à absorber les chômeurs, toujours plus nombreux depuis 24 mois, en attendant les chiffres du chômage pour le mois de mai révélés ce mercredi soir.
Si le diplôme reste une arme contre la galère, il ne protège plus autant: la situation des jeunes diplômés sur le marché de l'emploi se dégrade. Six mois après l'obtention de leur précieux sésame, 61% d'entre eux sont sans emploi, alors qu'ils étaient 57% l'année dernière ; et parmi ceux qui ont un emploi, seuls 22% seulement sont en CDI, selon la dernière étude de l'Association pour Faciliter l'Insertion professionnelle des Jeunes diplômés (Afij).

« Je pensais que cela allait être beaucoup plus facile »

Avec un Bac+6 en informatique, Nadia, se pensait à l’abri. Pour elle, c’est la douche froide. « Je me suis dit qu'après un Master 2 toutes les voies étaient ouvertes, mais en fait non. L'informatique, ça recrute, mais je n'arrive pas à trouver, je n'ai pas assez d'expérience en entreprise », explique-t-elle sur RMC. Même constat pour Stéphanie, qui vient d'obtenir un master 2 en économie du développement touristique international. Elle cherche un emploi depuis plusieurs mois et ne s’attendait pas à ça. « Je pensais que cela allait être beaucoup plus facile. En entretien on va me poser des questions sur mon stage, on va me dire "ah vous n'avez fait qu'un stage de 4 mois ?", "est-ce que vous êtes sûre d'avoir les compétences requises ?". J'ai 28 ans, je suis en couple et je vis dans un studio, alors que j'ai des envies de bébé avec mon compagnon », regrette-t-elle. Désemparée, elle pense reprendre les études en alternance : « Mais en même temps, on m'a dit que ce n'était pas une bonne idée d'accumuler les années d'études. Donc je suis perdue ».

« Ce qu'il leur reste, c'est de chercher du travail alimentaire »

Elle n’est pas la seule à être perdue. « Il y a malheureusement beaucoup de monde sur le marché de l'emploi, il y a un certain nombres d'entreprises qui ont fermées, rappelle Christian Darantière, directeur délégué de l'Afij, une association d'insertion. Surtout, il y a de jeunes collaborateurs bien diplômés et avec un peu d'expérience professionnelle qui sont sur le marché de l'emploi en concurrence directe avec les jeunes diplômés ». Et la concurrence est rude quand on n’a aucune expérience. « Le diplôme donne un certain niveau d'éducation, mais il ne suffit absolument pas. Ceux qui ont des difficultés à trouver de l'emploi, ce sont ceux qui justement n'ont fait que du cursus universitaire, même quelquefois du BTS, et ils manquent cruellement de pratique et d'expérience, explique Guillaume Bert, conseiller à la mission locale de Paris 13. Le paradoxe c'est qu'il est compliqué d'acquérir de l'expérience si on n'est pas embauché. Du coup, « cela devient compliqué pour ces jeunes de trouver de l'emploi dans leur branche. Finalement, ce qu'il leur reste, c'est de chercher du travail alimentaire, ou d'enchaîner les stages ou les boulots finalement sous-payés par rapport à leur niveau d'étude », poursuit Guillaume Bert. Effectivement, comme en 2012, seulement la moitié des jeunes embauchés déclarent occuper un emploi en adéquation avec leur projet professionnel, souligne l'étude de l’Afij et 60% des nouveaux diplômés estiment occuper un emploi d'attente. Après tant d’années d’études, il leur faut encore attendre avant d’avoir le droit d’occuper le poste pour lequel ils sont formés. L'entonnoir du travail est sans pitié.

Philippe Gril avec Victor Joanin