EDITO. La guerre de la dette est déclarée

Il va falloir opérer une prise de conscience: l’argent magique, gratuit et disponible à volonté, c’est fini.
S’il ne fallait retenir que trois chiffres de l'étude de l'OCDE, ce serait que l’année dernière, 25.000 milliards de dollars de dettes publiques et privées ont été émis sur les marchés. C’est quasiment deux fois plus qu’avant la pandémie et trois fois plus qu’en 2007.
Pour la première fois, l’encours global de dette a dépassé les 100.000 milliards de dollars.
Enfin, près de la moitié (40%) de ces dettes souveraines des pays de l’OCDE et de la dette obligataire mondiale des entreprises, arriveront à échéance d’ici à 2027.
Un monde de plus en plus endetté
Ces trois chiffres réunis disent une seule et même chose: nous sommes entrés dans un nouveau monde. Un monde de plus en plus endetté, où on a beaucoup sollicité la dette pour passer les crises, soutenir la reprise, et dans lequel il va falloir désormais financer l’avenir au lieu des dépenses courantes.
D’abord parce qu’il va y avoir des révolutions majeures à financer : transition climatique, démographique, numérique... Sur lesquelles vient de s’ajouter une accélération du réarmement de la planète.
Tout le monde va avoir besoin de capitaux supplémentaires: l'Europe, la Chine, les Etats-Unis. Les Etats-Unis où le déficit public dépasse désormais 2.000 milliards de dollars par an et qui vont nécessiter un financement extérieur, notamment via notre épargne européenne.
Comment se situe la France dans tout ça?
Pas au mieux. On file tout droit vers les 120% du PIB de dette. Une dette majoritairement détenue par les investisseurs étrangers, dont nous sommes donc très dépendants, et nous sommes sous la surveillance resserrée des agences de notation.
Alors qu'il faudrait renforcer notre base domestique, 100 milliards d'épargne française sonts partis s'investir en bonds du trésor américain en 2024. Si on ajoute les fonds européens de la zone euro, les fonds britanniques, norvégiens et suisses, c’est même 500 milliards qui sont partis aux Etats-Unis. Un quart de la hausse de la dette publique américaine a été acheté par des Européens l'année dernière.
Un sérieux concurrent est enfin sur le point d'arriver sur le marché européen de la dette. L’Allemagne va faire sauter son frein à l’endettement pour financer un gigantesque plan de relance de près de 1.000 milliards d'euros sur dix ans. La concurrence va être rude pour la France. Les taux ont déjà monté de 40 points de base.
Il va donc falloir revenir le plus vite possible à 3% de déficit pour stabiliser la dette, et surtout renforcer notre potentiel de croissance pour continuer à rassurer les investisseurs et rester attractifs. C'est bien connu: on ne prête qu'aux riches.