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EDITO. Budget: la France en PLS

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L'EDITO DE RAPHAËL LEGENDRE. Le projet de loi spéciale (PLS) présenté ce mercredi en Conseil des ministres ne permettra pas de redresser de nos comptes. Il y a pourtant urgence, les dépenses sociales sont hors de contrôle.

Avec 6,1% de déficit public en 2024, la France était déjà, et de loin, lanterne rouge de la zone euro. Malheureusement, avec la loi spéciale présentée ce matin en Conseil des ministres; ce sera probablement pire en 2025. Pourquoi? Parce qu'elle ne permet pas de contrôler les dépenses, notamment sociales.

À commencer par les retraites, qui vont augmenter de 2,2% au 1er janvier, pour un coût de 6,5 milliards d’euros. C’est 4 milliards de plus que ce que prévoyait le gouvernement Barnier. Pendant ce temps-là, le déficit du même régime va passer de 2,6 milliards en 2023 à 10 milliards en 2025.

Si on "dézoome", c'est toute la Sécu qui est en train de glisser: le déficit des comptes sociaux était de 10 milliards en 2023, il sera de 30 milliards l’année prochaine si on ne fait rien. Trente milliards, c’est tout simplement le pire déficit depuis 15 ans (2010), si l’on met de côté l’année 2020, année du Covid.

La situation est grave. Et le budget “PLS” que le Parlement s'apprête à adopter la semaine prochaine n'offre aucun moyen d'éviter la sortie de route.

Cette loi ne contient que trois articles. Un pour lever l’impôt, un autre pour lever de la dette et un troisième article pour augmenter de 20 milliards le plafond d’emprunt annuel de l’Acoss, à 65 milliards d'euros.

Un système à bout de souffle

Si l'on voit bien l’utilité des deux premiers articles, à quoi sert le troisième ? L’Acoss, c’est la banque de notre système social. Et si on augmente son plafond d’emprunt, c’est parce que la Cades - la Caisse d’amortissement de la dette sociale - ne peut plus amortir notre dette sociale. Elle devait fermer en 2024, mais avec le Covid, on l'a autorisé à reprendre 136 milliards de droits de tirage et de purger tout cela au plus tard en 2033.

On a rallongé sa durée de vie de 9 ans, avec chaque année une petite vingtaine de milliards d'euros de CRDS, de la CSG pour la financer.

Et bien croyez-le ou pas, les 136 milliards sont déjà atteints. En quatre ans! Et c’est pour cela qu’il faut passer le plafond d’emprunt de l’Acoss de 45 à 65 milliards. Pour se donner des marges de manœuvre, pour financer un modèle social hors de contrôle.
Mais c’est encore une fois une solution de court terme, une rustine. Une politique de Gribouille.

Alors les ministres ont beau jeu de dire que la carte Vitale fonctionnera toujours au 1er janvier, la vérité, c’est que le système est à bout. Nous avons besoin d’un arsenal juridique beaucoup plus charpenté qu’une simple loi spéciale pour éviter l’accident.
Il faut un gouvernement fort et un programme de travail solide. Malheureusement, à date, nous n’avons ni l’un, ni l’autre.

Raphaël Legendre