EDITO. 25% d'élèves en moins d'ici 2034: c'est paradoxal, mais il ne faut pas supprimer de postes d'enseignants si on veut vraiment faire des économies

Entre 2015 et 2034, les effectifs d’élèves du primaire vont baisser de 25%. Un sur quatre. Evidemment, ça fait saliver Bercy: on pourrait supprimer 50.000 postes d’enseignants, ce qui dégagerait 3,4 milliards d’euros d’économies par an.
Sauf qu’économiquement, ce que nous dit l’IPP, c’est que ça n’est pas le meilleur calcul.
Parce que derrière cette baisse démographique se cache une occasion rare qui est de réduire la taille des classes sans recruter, sans dépenser plus, juste en maintenant les effectifs. Et là, les chiffres deviennent intéressants: on passe de 22,4 à 18 élèves par classe, on améliore les performances scolaires, et donc, à terme, les trajectoires salariales. Et selon les calculs de l’IPP, on génère 4,5 milliards d’euros de gains économiques par an. Avec, au passage, 2,9 milliards de recettes fiscales pour l’État.
Evidemment, trois milliards d'économies ce n'est pas rien, surtout en ces temps de disette budgétaire. Mais si on raisonne en retour sur investissement, il faut regarder le rendement social. En l'occurence ici, 1 euro investi = 9 euros de gains économiques. Un indice d’efficacité des dépenses publiques (EDP) à 9. C’est mieux que la plupart des niches fiscales ou des crédits d’impôt.
Et puis, soyons honnêtes: cette baisse d’effectifs ne tombe pas du ciel tous les dix ans. C’est une opportunité unique de remettre à niveau un système scolaire à la traîne en Europe et qui enchaîne les mauvais classements PISA.
Mais évidemment, tout cela suppose un minimum de coordination. Or aujourd’hui, sans pilotage national, on laisse les logiques locales faire la loi: à Paris, les classes fondent alors que la démographie s’effondre. En Seine-Saint-Denis, même profil social, mais toujours autant d’élèves par classe. Cherchez l’erreur.
Mieux cibler l'investissement public
Mais peut-on vraiment se payer des classes à 18 élèves partout, voire 12 dans les zones d'éducation prioritaire comme le propose l'IPP? Oui, si l'on considère que c'est une stratégie, un investissement. Cela s’appelle cibler l’investissement public là où il rapporte le plus: dans l’éducation prioritaire, dans les territoires fragiles, chez les enfants qui ont le moins de capital scolaire.
Ce que cette note nous dit, c’est qu’il est temps d’introduire un peu de sérieux économique dans la gestion de l’Éducation nationale. Un indicateur d’efficacité territoriale, des règles de réallocation des postes fondées sur des données. Bref, c’est le moment ou jamais d’investir intelligemment dans l’éducation, pas de rogner passivement sur la dépense.
Parce qu’en matière d’école, comme en matière de finances publiques, la vraie rigueur, c’est de penser long terme.