Pourquoi les investisseurs chinois boudent l'Europe

Les investissements chinois en Europe sont tombés de 15,3 à 2,4 milliards de dollars entre le premier semestre 2018 et la même période de 2019, soit un recul de 84%. - Jacques Witt-AFP
Les investisseurs chinois se détournent-ils de l'Europe? Leurs investissements ont chuté de 15,3 à 2,4 milliards de dollars entre le premier semestre 2018 et la même période de 2019, soit un recul de 84%, selon une étude du cabinet EY. Le nombre de transactions n'a chuté lui que de 28%, tombant à 81, ajoute l'étude publiée par la branche allemande du cabinet de consultants.
Le recul a été particulièrement marqué en Allemagne, qui a cédé à la Grande-Bretagne sa place de destination favorite des investisseurs du géant asiatique, avec 17 rachats ou prises de participation entre janvier et juin de cette année, contre 11 en Allemagne et 7 en Italie et en France. En volume, les investissements chinois en Allemagne sont passés de 10,1 à 0,5 milliard de dollars sur la même période, toujours selon EY qui relève toutefois que le niveau des transactions est resté stable par rapport au deuxième semestre 2018.
L'appétit des chinois pour les PME allemandes fait peur
Outre-Rhin, l'appétit chinois pour l'acquisition de technologies européennes a aussi soulevé des résistances, comme en Allemagne après le rachat en 2016 du fabricant de robots Kuka par le groupe chinois Midea, qui a amené Berlin à se doter l'année suivante d'un droit de veto sur les acquisitions d'entreprises étrangères.
"Un étiage paraît avoir été atteint", selon Yi Sun, directrice du département China Business Services d'EY pour l'Allemagne, l'Autriche et la Suisse, qui estime que les entreprises chinoises sont toujours à la recherche de savoir-faire en Europe.
"La raison principale de l'attitude réservée des investisseurs chinois est la situation sur le marché intérieur: la conjoncture en Chine est difficile, l'incertitude est grande - notamment à cause du conflit commercial avec les États-Unis", analyse cette responsable, qui ajoute que le marché européen a aussi présenté moins d'opportunités intéressantes pour les Chinois.
L'intensification guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine a aussi des répercussions en induisant une certaine défiance des autorités européennes vis-à-vis des appétits grandissants des géants chinois, comme en témoigne "l'affaire Huawei" et les interrogations qu'elle soulève pour les opérateurs télécoms en Europe.
Des investisseurs chinois plus sélectifs
De leur côté, les investisseurs chinois se montrent aussi beaucoup plus sélectifs qu'en 2016, année où leurs investissements en Europe ont connu un pic à 85,8 milliards de dollars, rapporte encore le cabinet EY.
Ce dernier indique encore que la plus grande opération chinoise en Europe durant la première moitié de 2019 a été réalisée par le groupe Evergrande, dont la branche santé a acquis pour 930 millions de dollars en janvier 51% du capital du fabricant suédois de voitures électriques NEVS, successeur de Saab.