La BCE laisse ses taux inchangés mais ouvre la porte à une baisse prochaine

La BCE a décidé jeudi de laisser ses taux inchangés pour la zone euro pour la cinquième réunion consécutive. Le taux de dépôt est ainsi maintenu à 4,0%, son plus haut niveau depuis la création de l'euro en 1999, atteint en septembre 2023 après dix relèvements consécutifs.
Le taux de refinancement et le taux de facilité de prêt marginal se situent respectivement à 4,50% et 4,75%.
La décision était attendue par les marchés et le consensus des économistes interrogés par Reuters.
Une première baisse en juin?
"La plupart des mesures de l’inflation sous-jacente diminuent, la hausse des salaires se tasse progressivement et les entreprises absorbent une partie de l’augmentation des coûts de main-d’oeuvre à travers leurs bénéfices", constate le Conseil des gouverneurs dans un communiqué de presse.
Si les prochaines données continuent de confirmer le ralentissement de la dynamique des prix, le conseil souligne qu'il "serait opportun de réduire le caractère restrictif actuel de la politique monétaire".
En d'autres termes, à moins d'une surprise à la hausse sur l'inflation durant le printemps, les conditions seront réunies pour une baisse des taux lors de la prochaine réunion en juin.
Avant la Fed
L'institution de Francfort manque encore de données économiques pour décider un virage dans la politique monétaire. Celui-ci viendrait après une phase sans précédent de relèvement des taux d'intérêt pour calmer l'inflation.
La hausse des prix a poursuivi son ralentissement en zone euro, à 2,4% en mars en glissement annuel, soit 0,2 point de moins qu'en février. Elle se rapproche de l'objectif de 2% à moyen terme après ce recul plus fort qu'attendu.
Lors de la conférence de presse de ce jeudi, la présidente de la BCE Christine Lagarde sera interrogée sur la possibilité pour la BCE d'entamer son cycle de baisse des taux avant sa grande soeur américaine, la Réserve fédérale (Fed).
À rebours de ce qui se passe en zone euro, l'inflation aux Etats-Unis en mars a accéléré à 3,5% sur un an, selon l'indice CPI publié mercredi, dépassant les prévisions.
Quelle trajectoire?
Une première baisse des taux par la Fed n'est désormais attendue par une majorité d'analystes que lors de la réunion prévue mi-septembre, soit à peine plus d'un mois et demi avant les élections présidentielles américaines.
Mais la BCE, qui se réunit en juin une semaine avant la Fed, "ne prendra pas le risque d'attendre sur la baisse des taux", est convaincu Gilles Moec, chef économiste chez AXA.
Les deux banques centrales affrontent des situations différentes: la santé insolente de l'économie américaine accompagnée d'une inflation plus forte contraste avec la faiblesse persistante de l'activité en zone euro, où les taux élevés font baisser les prix et finissent par asphyxier la demande des entreprises et des ménages.
La perspective d'une baisse des taux en juin va "ressembler à un compromis" entre les banquiers centraux de la BCE qualifiés de "colombes", favorables à une politique souple, et les "faucons" prônant plus d'orthodoxie, écrivait Deutsche Bank début avril.
D'ici huit semaines, la BCE disposera de davantage d'informations sur les évolutions de salaires et de projections économiques actualisées susceptibles de confirmer ses prévisions sur l'inflation.
Au stade actuel de la discussion, l'institution "ne s'engage pas à l'avance sur une trajectoire de taux particulière", et elle va continuer à se fier aux données du moment pour fixer son cap monétaire, selon le communiqué.
Les économistes d'ING estiment que la BCE optera pour une politique "lente" de réduction de taux de 25 points de base tous les trimestres.