Ce que la réforme des retraites va changer pour vous: on a simulé les conséquences pour 11 profils

Report de l'âge légal de départ de 62 à 64 ans, augmentation de la durée de cotisation plus rapide que prévu via une accélération de la réforme Touraine... Sans grande surprise, la réforme des retraites dévoilée par le gouvernement la semaine dernière est encore loin de recueillir l'assentiment des Français. Selon le dernier sondage Elabe pour BFMTV, 66% d'entre eux sont opposés au projet de l'exécutif.
À une large majorité, les Français rejettent toute mesure visant à les faire travailler plus longtemps. Or, c'est précisément l'objectif de la réforme. Même si tout le monde ne sera pas touché de la même manière. Pour y voir plus clair, nous avons simulé les effets de la réforme* sur les carrières de onze profils fictifs aux caractéristiques bien différentes.
• Véronique, née en 1966, a commencé à travailler à 23 ans

Dans le système actuel, Véronique pourra partir à la retraite à 62 ans au plus tôt, avec une décote. Pour obtenir une retraite à taux plein, elle devra valider 169 trimestres, ce qui revient à travailler 42 ans et un trimestre, soit jusqu'à 65 ans et trois mois.
Avec la réforme, Véronique ne pourra pas partir avant 63 ans et six mois, comme toutes les personnes de la génération 1966, hors exceptions. L'accélération de l'augmentation de la durée de cotisation la contraindra par ailleurs à cotiser trois trimestres supplémentaires, soit pendant 43 ans, si elle veut éviter toute décote sur sa retraite de base. Véronique devra donc travailler jusqu'à 66 ans pour bénéficier d'une pension complète.
> Sans la réforme, Véronique pourrait partir à la retraite à taux plein à 65 ans et 3 mois. Avec la réforme, elle devra travailler 9 mois de plus.
• Julien, né en 1990, a commencé à travailler à 21 ans

Dans le système actuel, Julien pourra partir à la retraite à 62 ans. Avec la réforme, Le report de l'âge légal l'obligera en revanche à travailler jusqu'à 64 ans, comme toutes les personnes nées à partir de 1968, sauf cas particuliers.
En revanche, Julien n'est pas concerné par l'accélération de la réforme Touraine. Tous les actifs nés à partir de 1973 doivent déjà cotiser 172 trimestres (43 ans) pour obtenir une retraite à taux plein. Autrement dit, Julien obtiendra son taux plein à 64 ans, que la réforme soit votée ou non.
> Julien partira à taux plein à 64 ans dans tous les cas.
• Stéphane, né en 1960, a commencé à travailler à 25 ans

Avec la réforme, rien ne change pour Stéphane, les premières personnes concernées par le projet du gouvernement étant celles nées à partir de septembre 1961. Il pourra toujours partir à 62 ans et bénéficier d'une pension de base complète s'il valide 167 trimestres (41 ans et trois trimestres), soit à 66 ans et 9 mois s'il n'a pas d'interruption dans sa carrière.
> Dans tous les cas, Stéphane ne partira pas à la retraite à taux plein avant 66 ans et 9 mois
• Noémie, née en 1970, a commencé à travailler à 21 ans, a cotisé au Smic toute sa carrière

Dans le système actuel, Noémie a la possibilité de partir à 62 ans ou à 63 ans et neuf mois pour percevoir une retraite à taux plein.
Avec la réforme, Noémie devra patienter jusqu'à 64 ans pour prendre sa retraite. Elle devra aussi cotiser un trimestre de plus, soit 43 ans, ce qui lui permettra également d'obtenir une pension complète à 64 ans.
Avec une carrière complète au Smic, Noémie verra par ailleurs sa pension augmenter puisqu'elle bénéficiera de la revalorisation de la pension minimale à hauteur de 85% du Smic net, soit environ 1200 euros brut par mois.
> Avec la réforme, Noémie devra travailler 3 mois supplémentaires pour obtenir une retraite à taux plein.
• Noah, né en 1981, a commencé à travailler en apprentissage à 15 ans et 9 mois

Ayant cotisé 5 trimestres avant la fin de ses 16 ans, Noah fait partie des personnes éligibles au dispositif carrières longues. Dans le système actuel, il peut espérer partir à la retraite à 60 ans s'il a validé ses 172 trimestres. En effet, il n'a pas commencé assez tôt pour pouvoir partir à 58 ou 59 ans (45 années de cotisation requises).
Avec la réforme, Noah pourra partir légèrement plus tôt. Le projet du gouvernement prévoit que les personnes ayant travaillé avant 16 ans soient éligibles à la retraite dès 58 ans, sous réserve d’avoir cotisé la durée d’assurance requise majorée d’une année, et non plus de deux comme aujourd'hui, soit 44 ans au lieu de 45. Noah peut donc espérer prendre sa retraite à 59 ans et neuf mois.
> Avec la réforme, Noah pourra partir à la retraite 3 mois plus tôt
• Julia, née en 1985, a commencé à travailler à 17 ans

Julia a validé 5 trimestres avant la fin de ses 18 ans. Dans le système actuel, elle peut donc partir de manière anticipée à 60 ans à condition d'avoir bien cotisé 43 ans, au titre du dispositif carrières longues.
Avec la réforme, Julia devra attendre ses 61 ans avant de partir à la retraite. Dans le projet du gouvernement, il est en effet prévu que les personnes ayant commencé à travailler avant 18 ans puissent toujours partir dès 60 ans, mais "sous réserve d'avoir cotisé la durée d'assurance requise majorée d'une année", soit 44 ans au lieu de 43.
> Julia devra travailler 1 ans de plus pour partir à la retraité à taux plein
• Charles, retraité avec une pension de 950 euros

Avec la réforme et ses nouvelles règles, Charles va bénéficier de la revalorisation du minimum contributif qui concernera aussi bien les futurs retraités que les retraités actuels, à condition d'avoir cotisé une carrière complète au Smic. Dès lors, il devrait toucher une pension équivalente à 85% du Smic net, soit 1200 euros bruts par mois.
> La pension de Charles va augmenter avec la réforme des retraites
• Camille, née en 1971, a commencé sa carrière à 24 ans, avec une interruption de trois ans

Camille a commencé à travailler début 1995. Elle a toutefois arreté de travaillé pendant trois ans. Dans le système actuel, elle pourra partir à 62 ans mais devra travailler jusqu'à 67 ans, âge d'annulation de la décote, pour obtenir une pension complète.
Avec la réforme, Camille ne pourra pas partir avant 64 ans. En revanche, l'âge d'annulation de la décote, qui permet de bénéficier automatiquement d'une retraite à taux plein, restera le même, à savoir 67 ans.
> Dans tous les cas, Camille aura une retraite à taux plein à 67 ans
• Yoann, policier né en 1978, a commencé à travailler à 22 ans

Yoann fait partie des personnels actifs de la police nationale. Dans le système actuel, il peut partir à la retraite à 52 ans, à condition d'accepter une baisse de sa pension. S'il doit théoriquement avoir cotisé 172 trimestres (43 ans) pour percevoir une retraite à taux plein, il pourra l'obtenir dès 57 ans, âge d'annulation de la décote pour les policiers.
Avec la réforme, les fonctionnaires exerçant une activité dangereuse pourront continuer de partir de manière anticipée mais devront malgré tout travailler plus longtemps. Yoann ne pourra donc pas partir avant 54 ans mais pourra toujours toucher sa retraite à taux plein à 57 ans.
> Cela ne changera rien pour la retraite à taux plein de Yoann. Par contre il ne pourra pas partir à la retraite avant 54 ans, contre 52 actuellement avec la réforme.
• Malika, née en 1989, reconnue invalide

Dans le système actuel, Malika, reconnue invalide, pourra partir à 62 ans à taux plein, même si elle n'a pas validé tous ses trimestres.
Avec la réforme, il en sera de même. Même si l'âge légal passera à 64 ans, "un âge de départ anticipé sera créé pour permettre" aux personnes reconnues invalides ou inaptes "de pouvoir partir à la retraite à 62 ans à taux plein, comme aujourd'hui", indique le gouvernement.
> Rien ne change pour Malika.
• Pascal, né en 1974, a commencé à travailler à 23 ans, indépendant

Avec la réforme, comme pour les salariés du privé, Pascal devra travailler deux années supplémentaires. Il ne pourra pas donc pas partir à la retraite avant 64 ans, contre 62 ans dans le système actuel. L'accélération de la réforme Touraine ne change toutefois rien pour lui puisqu'il devait déjà cotisé 43 années pour obtenir son taux plein.
Le projet du gouvernement promet par ailleurs d'améliorer les pensions de retraite des indépendants. "Pour les travailleurs indépendants, nous souhaitons simplifier le calcul des cotisations sociales, et améliorer leur capacité à générer des droits à la retraite", peut-on lire dans le dossier de présentation de la réforme. "Nous engagerons d’ici le PLFSS 2024 les travaux techniques et de concertation pour réformer l’assiette sociale des indépendants, afin que son calcul soit simplifié et que les droits à la retraite des indépendants soient renforcés, notamment pour les plus modestes d’entre eux", est-il précisé.
> Pour Pascal rien ne change, sauf peut être le montant de sa pension, même si toutes les modalités ne sont pas encore connues.
*Par souci de simplification, cette simulation ne tient pas compte des règles relatives à la pénibilité susceptibles d'avancer l'âge de départ en retraite. Pour autant, rappellons que la pénibilité des métiers sera toujours prise en compte dans la réforme, avec quelques modifications toutefois, pour permettre aux personnes concernées de partir à 62 ans et non à 64 ans. Le projet du gouvernement prévoit également d'intégrer les périodes de congé parental dans le calcul de la durée de cotisation.