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McDonald's de Marseille: quatre points pour comprendre l'imbroglio

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Depuis l'annonce de la revente de six McDo marseillais cet été, les invectives se multiplient contre le géant du fast-food. Silencieux tout l'été, il a finalement répondu aux accusations des salariés et des politiciens ce jeudi.

Au cœur de l'été, le projet de revente de six McDonald's à Marseille a créé la polémique. Manifestations des salariés, pressions politiques, et rumeurs se sont succédé. Dans ce dossier aux enjeux plus vastes que la vente de restaurants d'un franchisé, McDo restait silencieux. À la veille du jugement du tribunal de grande instance de Marseille sur la cession, la direction de McDonald's France a répondu aux quatre accusations faites à son groupe.

> Transformer un McDo en resto halal: un plan social déguisé?

L'ACCUSATION: Les six McDo sont détenus par un franchisé, Jean-Pierre Brochiero, qui compte en revendre cinq à un autre franchisé marseillais. Le dernier des six, situé dans les quartiers Nord de Marseille, avec ses 77 salariés, représente l'un des derniers poumons économiques de ce quartier déshérité. Le franchisé prévoit de le vendre au groupe Hali Food qui le transformera en restaurant asiatique halal.

"Les porteurs de projet sont des hommes de paille qui sont là pour couler l'entreprise", a dénoncé l'avocat des salariés de McDonald's. Me Ralph Blindauer explique que le repreneur, "présenté comme devant investir 500.000 euros sur ses deniers personnels", n'avait déclaré que 8000 euros de revenus en 2017. "Au bout de trois mois, Hali Food se casse la figure, les pouvoirs publics payent les pots cassés et McDo s'en lave les mains", a-t-il prédit.

LA DÉFENSE: Le projet Hali Food est concret et réel, insiste le porte-parole de McDonald's France. Il en veut pour preuve le permis de construire déposé pour transformer le restaurant, et la présence du repreneur lors d'une réunion sur le dossier la semaine dernière à la préfecture à Marseille. "Ce sont des signes forts, de sacrées garanties, sur l'emploi, l'investissement", plaide Sébastien Bordas, vice-président de McDonald's France. Il ajoute que son entreprise, qui doit rester propriétaire des murs et du terrain, "va exonérer de loyer le futur repreneur la première année d'activité".

> La direction veut casser les syndicats des quartiers Nord?

L'ACCUSATION: Les salariés du McDonald's en question affirment que la direction France du groupe veut "couler ce restaurant où il y a des représentants syndicaux, une ambiance familiale et des avantages sociaux comme un 13e mois", affirme Tony Rodriguez, porte-parole de l'intersyndicale.

LA DÉFENSE: "La seule spécificité du McDo de Saint-Barthélemy est malheureusement d'ordre économique", déplore Sébastien Bordas, vice-président de McDonald's France. Il affirme que ses pertes s'élèvent à plus de 3 millions d'euros en neuf ans, et que ses ventes stagnent depuis son ouverture en 1997. "En 2017, le franchisé a fait 410.000 euros de pertes, alors que nous l'avions pourtant exonéré de quelque 300.000 euros de loyer", affirme-t-il.

> McDonald's touche des fonds publics puis se cache derrière ses franchisés?

L'ACCUSATION: "Une société aussi importante que McDonald's, qui a bénéficié d'une aide financière, peut faire l'effort dans le secteur nord de la ville de maintenir l'activité et l'emploi", s'est insurgé Jean-Claude Gaudin, le maire de Marseille en début de semaine. D'autres personnalités politiques, comme le leader de la France Insoumise, Jean-Luc Mélenchon, ou Samia Ghali, sénatrice socialiste des Bouches-du-Rhône, se sont mobilisées: "McDo ne peut pas gagner de l'argent sur le dos des Marseillais sans faire l'effort de maintenir les emplois", a fustigé la sénatrice, dénonçant "la politique de l'autruche" de la direction qui "refuse d'expliquer son projet autour d'une table".

LA DÉFENSE: McDonald's reconnait avoir perçu des fonds publics en 2015, comme toutes les entreprises touchées par un chantier sur la rocade, en compensation d'une perte de 30% de chiffre d'affaires liée à ces travaux. Ces sommes s'élèveraient à 404.000 euros, soit 12% des pertes cumulées depuis 2009, selon le dirigeant de McDo France. Quant à la vente des restaurants, c'est la décision du franchisé, "sa mission, sa prérogative en tant que chef d'entreprise indépendant", a estimé Sébastien Bordas ce vendredi dans La Provence. "Nous sommes coactionnaires mais l'employeur des salariés est bien Jean-Pierre Brochiero", a-t-il ajouté, tout en reconnaissant que "ces projets ont eu notre assentiment".

> La reprise des McDo promise à une "brute sociale"?

L'ACCUSATION: Le repreneur des cinq autres McDonald's, qui resteraient exploités sous la marque, serait "connu pour sa brutalité sociale" et ses "méthodes mafieuses", selon l'avocat des salariés.

LA DÉFENSE: le vice-président de McDonald's Sud, Sébastien Bordas, affirme partager "les mêmes priorités" que le franchisé qui vend ces restaurants, à savoir "maintenir l'activité et pérenniser l'emploi". "Nous sommes dans un contexte de tensions, de menaces, parfois même de violences, avec beaucoup de désinformation", a-t-il ajouté.

Nina Godart